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OCTG4 2021 IN : Fournitures tubulaires pour puits de pétrole
Énoncé des motifs — ouverture d’une enquête

De l’ouverture d’une enquête sur le dumping de certaines fournitures tubulaires pour puits de pétrole originaires ou exportées de l’Autriche.

Décision

Ottawa, le 

Le 7 juillet 2021, conformément au paragraphe 31(1) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, l’Agence des services frontaliers du Canada a ouvert une enquête sur le présumé dumping dommageable de certaines fournitures tubulaires pour puits de pétrole originaires ou exportées de l’Autriche.

Sur cette page

Résumé

[1] Le 17 mai 2021, l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) a reçu une plainte écrite d’Algoma Tubes Inc. (Sault Ste. Marie, Ontario), de Prudential Steel ULC (Calgary, Alberta), de Tenaris Global Services (Canada) Inc. (Calgary, Alberta) et de Hydril Canadian Company LP (Nisku, Alberta), ci-après « Tenaris Canada » ou « la plaignante », comme quoi les importations de certaines fournitures tubulaires pour puits de pétrole (FTPP) originaires ou exportées de l’Autriche ont fait l’objet d’un dumping. La plaignante allègue que ce dumping a causé et menace de causer un dommage aux producteurs canadiens de FTPP.

[2] Le 7 juin 2021, conformément à l’alinéa 32(1)a) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation (LMSI), l’ASFC a informé la plaignante que son dossier de plainte était complet. Elle a également envoyé un avis en ce sens au gouvernement de l’Autriche.

[3] La plaignante a présenté des éléments de preuve à l’appui des allégations de dumping de certaines FTPP en provenance de l’Autriche. Les éléments de preuve indiquent aussi, de façon raisonnable, que le dumping a causé et menace de causer un dommage à la branche de production nationale de marchandises similaires.

[4] Le 7 juillet 2021, conformément au paragraphe 31(1) de la LMSI, l’ASFC a ouvert une enquête sur le dumping de certaines FTPP en provenance de l’Autriche.

Parties intéressées

PlaignanteNote de bas de page 1

[5] Le nom et l’adresse de la plaignante sont les suivants :

Algoma Tubes Inc.
Prudential Steel ULC
Tenaris Global Services (Canada) Inc.
Hydril Canadian Company LP
(Les entreprises ci-dessus sont collectivement dénommées « Tenaris Canada ».)
400-530 8th Ave SW
Calgary AB  T2P 3S8

Tenaris Canada

[6] Tenaris Canada fabrique des FTPP par le procédé sans soudage au Canada à son usine d’Algoma Tubes Inc. (Algoma) à Sault Ste. Marie (Ontario). Algoma produit des caissons sans soudure d’un diamètre extérieur de 4,5 à 9,875 pouces selon la norme de l’American Petroleum Institute (API) et des nuances exclusives. Algoma produit des FTPP depuis plus de 30 ansNote de bas de page 2.

[7] Toutes les FTPP produites par Algoma sont des tubes verts avant leur finition. Même si Algoma possède ses propres capacités de filetage, de manchonnage et de traitement thermique, certains de ses produits sont filetés avec raccords de FTPP de qualité supérieure à l’usine de Hydril Canadian Company LP (Hydril) en AlbertaNote de bas de page 3.

[8] Prudential Steel ULC (Prudential) produisait à son usine de Calgary (Alberta) des caissons et tubages soudés par résistance électrique (SRE) d’un diamètre de 2,375 à 11,75 pouces, surtout des nuances H40, J55, mais aussi de nuances exclusives à résistance élevée. L’usine comptait des installations de filetage, de manchonnage et de mise à l’essai, mais pas de traitement thermiqueNote de bas de page 4. Les nuances exclusives à résistance élevée, comme PS80, étaient produites avec de la tôle à tube possédant la composition chimique requise. Prudential produisait des raccords API et de nuances exclusives de qualité supérieure, mais certains produits étaient filetés avec raccords de FTPP de qualité supérieure à l’usine de Hydril en AlbertaNote de bas de page 5.

[9] Tenaris Canada déplace actuellement sa capacité de production par soudage par résistance électrique (SRE), auparavant à l’usine de Prudential, vers l’usine d’AlgomaNote de bas de page 6. L’usine de Prudential a cessé la production en juillet 2020. Cette transition devrait être achevée vers la fin de 2021Note de bas de page 7.

[10] Hydril produit des raccords spécialisés de qualité supérieure pour les caissons et les tubages de FTPP. Tenaris Global Services (TGS) appuie la gestion, les ventes et la commercialisation pour les usines de production d’AlgomaNote de bas de page 8.

Autres producteurs canadiens

[11] Les producteurs canadiens ci-dessous fabriquent aussi des FTPP :

EVRAZ Inc. NA Canada (Evraz)
Case postale 1670
100 Armour Rd
Regina SK  S0G 5K0

Welded Tube of Canada Corporation (WTC)
111 Rayette Rd
Concord ON  L4K 2E9

SyndicatsNote de bas de page 9

[12] Tenaris Canada a recensé le Syndicat des Métallos comme syndicat connu représentant les personnes employées dans la production de FTPP au Canada. Les sections locales concernées pour Tenaris Canada sont 7226 (Prudential) et 9548 (Algoma). Les sections locales concernées pour Evraz sont 5890 (Regina) et 6673 (Calgary).

Exportateurs

[13] L’ASFC a recensé deux exportateurs potentiels des marchandises en cause à partir de ses propres documents d’importation et des renseignements contenus dans la plainte. Elle leur a adressé une demande de renseignements (DDR) en dumping.

Importateurs

[14] L’ASFC a recensé un importateur des marchandises en cause à partir de ses propres documents d’importation et des renseignements contenus dans la plainte. Elle lui a adressé une DDR pour importateurs.

Les produits

Définition

[15] Aux fins de la présente enquête, les marchandises en cause sont définies comme suit :

Les fournitures tubulaires pour puits de pétrole sont des caissons, des tubages et des tubes verts faits d’acier au carbone ou allié, soudées ou sans soudure, traitées thermiquement ou non, peu importe la finition des extrémités, d’un diamètre extérieur de 2 ⅜ à 13 ⅜ po (60,3 à 339,7 mm), conformes ou appelées à se conformer à la norme 5CT de l’American Petroleum Institute (API) ou à une norme équivalente ou une norme exclusive améliorée, de toutes les nuances, à l’exception des tuyaux de forage, des tubes courts, des manchons, des tubes sources pour manchons et des caissons en acier inoxydable, des tubages ou des tubes verts contenant 10,5 pour cent ou plus en poids de chrome, originaires ou exportées de l’Autriche.

Précisions

[16] Il est entendu que le terme « tube vert » désigne les caissons, tubages ou autres produits tubulaires non finis (y compris les FTPP pouvant être mises à niveau qui ont peut-être déjà été mises à l’essai, inspectées et/ou certifiées) originaires ou exportés de l’Autriche, et importés pour servir à la production ou à la finition de FTPP respectant les spécifications finales, y compris la nuance et les raccords, nécessaires pour l’utilisation au fond du puits. Les tubes verts, comme ils sont communément appelés dans l’industrie des FTPP, sont des tubages et caissons intermédiaires ou devant encore subir un complément d’ouvraison, par exemple un filetage, un traitement thermique et des essais, avant de pouvoir être utilisés comme caissons ou tubages complètement finis pour puits de pétrole et de gaz dans le cadre de leur utilisation finale.

[17] Aux fins de la présente enquête en dumping, il est entendu que la définition du produit ne comprend pas les tubes verts originaires ou exportés de l’Autriche qui sont mis à niveau de la manière décrite ci-dessus dans un pays intermédiaire avant d’être exportés au Canada. Aux fins de l’enquête, l’ASFC estime que ces tubages et caissons à résistance élevée sont originaires du pays intermédiaire en question.

[18] Les tubes courts, qui sont essentiellement de courtes longueurs de FTPP utilisées pour l’espacement dans un train de tiges de forage, sont exclus lorsque leur longueur est de 12 pieds ou moins (avec une tolérance de trois pouces), tel que défini dans la norme 5CT de l’API.

[19] Par ailleurs, les produits accessoires utilisés avec les trains de tubages et de caissons de FTPP au fond du puits, tels les raccords de tubage, les balises et les coudes, ainsi que les produits ayant subi un complément d’ouvraison qui utilisent des FTPP comme intrants pour leur production, par exemple les tubages isolés sous vide, ne sont pas visés par la définition du produit. Les tubages spiralés ne sont pas non plus visés par la définition du produit.

Utilisation et caractéristiques du produitNote de bas de page 10

[20] Les caissons servent à empêcher les parois d’un puits de pétrole ou de gaz de s’effondrer pendant les forages et après l’achèvement d’un puits. Les tubages servent à acheminer des fluides dans le puits. Il s’agit généralement d’acheminer le pétrole et le gaz naturel jusqu’à la surface, mais il peut aussi y avoir injection de vapeur dans le puits, notamment dans des applications de drainage par gravité au moyen de vapeur ou de stimulation cyclique de la vapeur.

[21] Les FTPP en cause peuvent être soudées ou sans soudure. Les extrémités finies des caissons et des tubages comprennent généralement les extrémités lisses, biseautées, surépaissies externes, filetées, ou filetées et manchonnées (y compris les raccords exclusifs de qualité supérieure ou semi-supérieure).

[22] Les FTPP doivent pouvoir résister à la pression extérieure et aux pressions de rupture à l’intérieur même du puits. De plus, les joints doivent être suffisamment résistants pour supporter leur propre poids et être munis de filets suffisamment serrés pour résister à la pression du puits lorsque les longueurs sont emboîtées. Le filetage peut être effectué par le fabricant ou par une tierce partie spécialisée. Divers facteurs limitent la profondeur globale du puits non tubé qui peut être foré à un moment donné, et il est parfois nécessaire de poser plus d’un train de FTPP concentriques dans certaines parties de la profondeur du puits.

[23] Les FTPP en cause sont appelées à se conformer tout au moins à la norme 5CT de l’API. Les FTPP de l’Autriche sont de toutes les nuances, y compris, sans s’y limiter, les nuances H40, J55, K55, N80, L80, L80 HC, L80 LT, L80 SS, C90, C95, C110, P110, P110 HC, P110 LT, T95, T95 HC et Q125, ou les nuances exclusives fabriquées pour remplacer ou améliorer ces spécifications. Le nombre associé à la nuance représente la force de rupture minimale requise pour la nuance en milliers de livres par pouce carré (ksi).

[24] Les nuances communes des caissons et tubages à faible résistance sont les nuances J55, K55 et H40. Les nuances de produits traités thermiquement (notamment L80, P110 et T95) sont des nuances de tuyaux perfectionnés et sont utilisées dans des puits plus profonds et des conditions plus rigoureuses, par exemple de basses températures, un milieu acide ou corrosif, et des conditions propres à la récupération de pétrole lourd.

[25] Les nuances de produits traités thermiquement constituent des tubages perfectionnés à résistance élevée qui sont utilisés pour des applications à l’horizontale, dans les puits plus profonds et dans des conditions d’utilisation plus rigoureuses, par exemple de basses températures, un milieu acide ou corrosif, et des conditions propres à la récupération de pétrole lourd. Ces nuances sont obtenues en utilisant un acier à composition chimique particulière (sous forme de billettes, dans le procédé sans soudage, ou de bobines d’acier, dans le procédé de SRE) et sont transformées ultérieurement avec traitement thermique pour atteindre des combinaisons particulières de propriétés mécaniques ou de résistance à la corrosion et à la fissuration causées par les conditions ambiantes.

[26] Par exemple, le traitement thermique peut conférer une résistance maximale (N80, P110 et Q125), une résistance élevée avec faible ductilité (habituellement des améliorations exclusives des nuances de l’API), ou une résistance élevée associée à une résistance à la corrosion et à la fissuration causées par les conditions ambiantes (L80, C90, C95, C110, T95 et améliorations exclusives).

[27] De même, les raccords de qualité supérieure ou semi-supérieure améliorent le fonctionnement d’un train de FTPP en apportant des caractéristiques de fonctionnement ou d’étanchéité additionnelles, qui peuvent être requises dans des applications plus exigeantes.

FabricationNote de bas de page 11

[28] Les caissons et les tubages de FTPP sont fabriqués à l’aide du même matériel de production, selon un procédé sans soudage ou un procédé de SRE.

[29] Tenaris Canada emploie le procédé sans soudage à ses installations de fabrication d’Algoma, en commençant par l’achat de barres d’acier (aussi appelées les billettes), importées auprès de sociétés sœurs. La barre d’acier est coupée pour former une billette, puis enfournée dans le four rotatif afin d’y être chauffée et préparée pour le laminoir à chaud. Une fois la billette transformée en tube par le laminoir à chaud, elle est transférée à un four à réchauffage. Le laminoir réducteur par élongation produit les dimensions finales.

[30] Selon la nuance désirée, la prochaine étape peut être le traitement thermique. La finition comprend les essais non destructifs (END), l’inspection électromagnétique (IEM), les essais hydrostatiques, l’inspection du filetage, le manchonnage, le vernissage et le marquage au pochoir.

[31] Tenaris Canada a employé jusqu’à récemment le procédé de SRE. De 1966 à juillet 2020, elle a produit des tuyaux d’acier SRE à son usine de Prudential à Calgary.

[32] La production des FTPP SRE consiste à fendre une feuille d’acier laminée à chaud en forme de bobine dans l’épaisseur désirée (tôle à tube) à la largeur nécessaire pour produire le diamètre désiré du tuyau. La tôle à tube passe ensuite par une série de galets formeurs qui courbent l’acier pour lui donner une forme tubulaire. Lorsque les extrémités se rapprochent avec la pression des derniers galets formeurs, un courant électrique est envoyé entre celles-ci. La résistance au courant chauffe les extrémités de la tôle à tube à la température de soudage, et la soudure s’effectue lorsque les deux extrémités sont réunies par pression.

[33] Les tubes d’acier sont formés selon le procédé sans soudage ou le procédé de SRE, puis sont coupés à longueur. Selon les spécifications API requises, les FTPP peuvent aussi être traitées thermiquement à cette étape-ci. Le produit est ensuite acheminé à la chaîne de finition où il est mis à l’essai (END, IEM et essais hydrostatiques), et les deux extrémités sont biseautées et filetées. Le tube peut passer par un procédé distinct de refoulement et de normalisation avant le filetage. Enfin, un manchon et un manchon protecteur sont appliqués à une extrémité du tube et un protecteur de tubage est installé à l’autre extrémité du tube avant qu’il ne soit prêt pour l’expédition. La finition comprend également le refroidissement, le dressage, l’aplanissement, les essais, l’application d’un enduit et/ou le fardelage.

Classement des importationsNote de bas de page 12

[34] Les marchandises présumées sous-évaluées sont normalement importées au Canada sous les numéros de classement tarifaire suivants :

  • 7304.29.00.11
  • 7304.29.00.19
  • 7304.29.00.21
  • 7304.29.00.29
  • 7304.29.00.31
  • 7304.29.00.39
  • 7304.29.00.41
  • 7304.29.00.49
  • 7304.29.00.51
  • 7304.29.00.59
  • 7304.29.00.61
  • 7304.29.00.69
  • 7304.29.00.71
  • 7304.29.00.79
  • 7306.29.00.11
  • 7306.29.00.19
  • 7306.29.00.21
  • 7306.29.00.31
  • 7306.29.00.29
  • 7306.29.00.39
  • 7306.29.00.61
  • 7306.29.00.69

[35] Les numéros de classement tarifaire ci-dessus sont fournis à titre purement informatif. Ils n’incluent pas toutes les marchandises en cause, et inversement, ils incluent des marchandises non en cause. Seule la définition du produit fait autorité au sujet des marchandises en cause.

Marchandises similaires et catégorie unique

[36] Le paragraphe 2(1) de la LMSI définit les « marchandises similaires » comme des marchandises identiques aux marchandises en cause ou, à défaut, dont l’utilisation et les autres caractéristiques sont très proches de celles des marchandises en cause.

[37] En se penchant sur la question des marchandises similaires, le Tribunal canadien du commerce extérieur (TCCE) tient habituellement compte de divers facteurs, notamment les caractéristiques matérielles des marchandises, leurs caractéristiques de marché, et la question de savoir si les marchandises nationales répondent aux mêmes besoins des clients que les marchandises en cause.

[38] Comme il est souligné dans la plainte, le TCCE a toujours déterminé que les FTPP soudées et sans soudure sont des marchandises similaires et que les FTPP de différentes nuances ne constituent pas des catégories distinctes de marchandisesNote de bas de page 13. Les FTPP soudées et sans soudure possèdent des caractéristiques similaires et se font généralement concurrence sur le marché intérieur.

[39] Les caissons et les tubages de FTPP sont fabriqués selon les mêmes spécifications minimales 5CT de l’API ou des spécifications équivalentes ou exclusives améliorées, et sont utilisés au fond du puits. Ils sont produits à l’aide du même matériel et ont les mêmes circuits de distribution.

[40] Même si les marchandises fabriquées par la branche de production nationale peuvent être ou ne pas être considérées comme identiques à tous égards aux marchandises en cause, l’ASFC a conclu que les marchandises canadiennes sont très proches des marchandises en cause. Par ailleurs, à l’examen des caractéristiques matérielles des marchandises, de leurs utilisations finales, et de tous les autres facteurs pertinents, elle est d’avis que les marchandises en cause constituent une catégorie unique de marchandises.

Branche de production nationale

[41] La branche de production nationale se compose des trois producteurs suivants :

[42] Tenaris Canada se divise en Algoma Tubes (Sault Ste. Marie, Ontario) et Tenaris Hydril (Nisku, Alberta). Prudential faisait aussi partie du groupe d’entreprises Tenaris Canada jusqu’à ce qu’elle ferme en août 2020Note de bas de page 14.

[43] Evraz Inc. NA Canada (Evraz) exploite des usines de fabrication de FTPP SRE à Regina (Saskatchewan), ainsi qu’à Calgary, Camrose et Red Deer (Alberta). Le groupe d’entreprises Evraz North America est aussi propriétaire de Canadian National Steel Corporation, qui exploite une usine de fabrication de FTPP SRE à Camrose (Alberta).

[44] Welded Tube of Canada (WTC) exploite une usine de fabrication de FTPP SRE à Concord (Ontario), une usine de traitement thermique et de filetage à Welland (Ontario), et une usine de filetage à Port Colborne (Ontario). WTC importe également des tubes verts soudés de son usine de production à Lackawanna (New York) pour finition au CanadaNote de bas de page 15.

Conditions d’ouverture

[45] Le paragraphe 31(2) de la LMSI prescrit que les conditions suivantes doivent être réunies pour ouvrir une enquête :

  1. la plainte doit être appuyée par des producteurs nationaux dont la production représente plus de 50 % de la production globale de marchandises similaires par les producteurs nationaux qui appuient la plainte ou s’y opposent; et
  2. la production des producteurs nationaux qui appuient la plainte doit représenter 25 % ou plus de la production globale de marchandises similaires par la branche de production nationale.

[46] À la réception de la plainte déposée par Tenaris Canada, l’ASFC a communiqué avec Evraz et WTC pour déterminer si elles appuyaient la plainte, s’y opposaient, ou étaient neutres à son égard. Le 27 mai 2021, chaque partie a avisé l’ASFC qu’elle ne souhaitait pas exprimer d’opinion à son égard (ni pour ni contre).

[47] Par conséquent, Tenaris Canada répond aux conditions d’ouverture prévues aux alinéas 31(2)a) (elle représente la totalité de la production par les producteurs ayant exprimé une opinion) et b) (elle représente plus de 25 % de la production globale par la branche de production nationale).

Marché canadien

[48] La plaignante a estimé le marché intérieur canadien en complétant ses propres renseignements internes sur les ventes par des renseignements de sources publiques et protégées pour ses estimations des ventes intérieures découlant de la production nationale par les autres producteurs canadiensNote de bas de page 16.

[49] Les estimations de la plaignante des volumes d’importation se fondent principalement sur les données sur les importations de Statistique CanadaNote de bas de page 17 et des données douanières affinéesNote de bas de page 18. Des données de plusieurs sources ont été utilisées pour estimer les importations nettes des États-Unis. Il s’agissait de refléter plus fidèlement les importations de FTPP demeurant sur le marché canadien puisqu’une grande partie de ce qui est importé des États-Unis y est réexportée après finitionNote de bas de page 19.

[50] L’ASFC a mené sa propre analyse indépendante des données sur les importations tirées de sa propre base de données douanières sur les marchandises importées de janvier 2018 au 31 mars 2021. Elle a apporté des rectifications aux données douanières du SGERNote de bas de page 20 afin de corriger les erreurs et d’éliminer les importations de marchandises non en cause. De plus, elle a examiné les descriptions de marchandises établies par le Système de soutien de la mainlevée accélérée des expéditions commerciales (SSMAEC) pour les importations de janvier 2020 au 31 mars 2021.

[51] Le tableau ci-dessous résume l’estimation de l’ASFC des importations :

Tableau 1Note de bas de page 21
Estimation de l’ASFC des importations
(en pourcentage du volume)
Provenance1 2018 2019 2020 T1 de 2020 T1 de 2021
FTPP 1 5,1 % 2,6 % 1,5 % 1,0 % 0,0 %
FTPP 2 7,0 % 13,9 % 2,2 % 4,1 % 0,0 %
Caissons sans soudure 6,6 % 1,0 % 1,5 % 2,8 % 0,0 %
Autriche 13,6 % 15,2 % 15,9 % 12,9 % 22,3 %
Mexique 22,0 % 14,1 % 20,9 % 20,5 % 32,8 %
États-Unis2 36,8 % 39,8 % 41,0 % 46,8 % 37,3 %
Autres 8,9 % 13,4 % 17,0 % 11,8 % 7,7 %
Volume global d’importations 100 % 100 % 100 % 100 % 100 %
  1. 1Les renvois aux affaires FTPP 1, FTPP 2 et caissons sans soudure visent les mesures de l’ASFC en vigueur à l’égard des FTPP en provenance d’autres pays.
  2. 2Le tableau des importations ci-dessus n’a pas été rectifié pour tenir compte des marchandises importées des États-Unis qui sont réexportées par WTC.

[52] Les règles de confidentialité nous empêchent d’entrer dans le détail du volume et de la valeur des importations de FTPP et de la production nationale. L’ASFC, toutefois, a dressé le tableau ci-dessous pour illustrer la part estimative des importations de marchandises en cause au Canada et le marché canadien dans son ensemble.

Tableau 2Note de bas de page 22
Estimation de l’ASFC du marché canadien apparent
(en pourcentage du volume)
Provenance1 2018 2019 2020
Tenaris Canada 24,2 % 25,8 % 38,0 %
Autres producteurs canadiens 25,0 % 27,0 % 21,9 %
Total des producteurs canadiens 49,1 % 52,8 % 59,9 %
FTPP 1 2,9 % 1,4 % 0,8 %
FTPP 2 4,0 % 7,5 % 1,2 %
Caissons sans soudure 3,8 % 0,6 % 0,8 %
Autriche 7,8 % 8,2 % 8,6 %
Mexique 12,6 % 7,6 % 11,3 %
États-Unis2 14,7 % 14,8 % 8,1 %
Autres 5,1 % 7,2 % 9,2 %
Marché canadien apparent total3 100 % 100 % 100 %
  1. 1Les renvois aux affaires FTPP 1, FTPP 2 et caissons sans soudure visent les mesures de l’ASFC en vigueur à l’égard des FTPP en provenance d’autres pays.
  2. 2Les pourcentages étant arrondis, leur somme pourrait ne pas être de 100 %.
  3. 3Le tableau du marché canadien apparent ci-dessus a été rectifié pour tenir compte des marchandises réexportées par WTC, tel que signalé par la plaignante.

[53] L’ASFC va continuer de recueillir et d’analyser des renseignements sur le volume des importations dans la période visée par l’enquête, soit du 1 mai 2020 au 30 avril 2021, dans le cadre de la phase préliminaire de l’enquête en dumping, et elle peaufinera ces estimations.

Preuves de dumping

[54] La plaignante allègue que les marchandises en cause en provenance de l’Autriche ont fait l’objet d’un dumping dommageable au Canada. Il y a dumping lorsque la valeur normale des marchandises est supérieure au prix à l’exportation fait aux importateurs au Canada.

[55] La valeur normale sera généralement, soit le prix de vente intérieur des marchandises similaires dans le pays exportateur si le marché y est soumis au jeu de la concurrence, soit la somme du coût de production des marchandises, d’un montant raisonnable pour les frais, notamment les frais administratifs et les frais de vente (FFAFV), et d’un autre pour les bénéfices.

[56] Le prix à l’exportation des marchandises vendues aux importateurs au Canada sera généralement la valeur la plus basse entre le prix de vente de l’exportateur et le prix d’achat de l’importateur, moins tous les frais découlant de l’exportation des marchandises.

[57] Un examen des estimations de la plaignante et de l’ASFC pour les valeurs normales et les prix à l’exportation suit.

Valeurs normales

Estimations de la plaignante

[58] La plaignante indique qu’elle ne disposait pas des renseignements pour estimer les valeurs normales selon l’article 15 de la LMSI à l’égard de l’Autriche. C’est pourquoi elle a estimé les valeurs normales selon une méthode de coût reconstitué prévue à l’alinéa 19b) de la même loiNote de bas de page 23, à partir de la somme de l’estimation du coût de production des marchandises en cause, d’un montant raisonnable pour les FFAFV et d’un autre pour les bénéfices.

[59] La plaignante affirme que, pour estimer les valeurs normales, elle a choisi des produits de référence de diamètres extérieurs comparables à ceux des exportations autrichiennesNote de bas de page 24. Elle ajoute que les marchandises de même diamètre extérieur fabriquées selon le même procédé mais de nuances différentes peuvent avoir des coûts largement différentsNote de bas de page 25.

[60] La plaignante soutient que la structure de coûts de Tenaris Canada devrait refléter celle dans d’autres marchés concurrentiels. Par conséquent, les coûts de production de Tenaris Canada pour 2020, y compris les coûts des matières et les frais indirects, rectifiés en fonction des conditions différentes en Autriche, ont servi à estimer les valeurs normalesNote de bas de page 26.

[61] Le coût des barres d’acier, le principal intrant de production des FTPP sans soudure, se fonde sur les coûts réels de Tenaris Canada. Le coût moyen des barres d’acier requises pour produire une tonne métrique (tm) de FTPP finies en 2020 a été calculé par la plaignanteNote de bas de page 27, et les coûts ont été corroborés par les factures d’achat de 2018 à 2020Note de bas de page 28.

[62] La plaignante a présenté ses propres coûts de transformation, ventilés par étape, y compris le manchonnage et l’application de protecteurs, le laminage, le traitement thermique, le filetage, les essais et les écarts, pour divers modèles d’après ses coûts standards en 2020. Ces coûts standards ont ensuite été rectifiés en fonction de l’écart de production moyen de Tenaris Canada en 2020. La plaignante souligne également que les frais indirects de maintenance annuelle de l’usine n’ont pas été compris dans les coûts standards de Tenaris Canada; plutôt, un montant associé à la maintenance a été ajouté aux coûts de transformation totaux par tmNote de bas de page 29.

[63] Pour corroborer les coûts de transformation utilisés dans ses estimations des valeurs normales, Tenaris a fourni des documents de son propre système comptableNote de bas de page 30.

[64] Les frais de main-d’œuvre ont été estimés d’après les frais directs de main-d’œuvre de Tenaris Canada, rectifiés pour tenir compte des différences de salaires entre le Canada et l’Autriche. Cette rectification s’est fondée sur des renseignements de l’Organisation internationale du Travail. Le facteur de rectification des frais de main-d’œuvre obtenu est égal à 145 % des coûts de Tenaris CanadaNote de bas de page 31. La plaignante a aussi ajouté une estimation des frais de main-d’œuvre qu’engagerait le producteur autrichien de FTPP, Voestalpine (Voest).

[65] Un montant pour les FFAFV et les frais financiers a été estimé d’après les états financiers publics de Voest pour 2020. Le montant obtenu pour les FFAFV, y compris les frais financiers, est égal à 15,6 % du coût des marchandises venduesNote de bas de page 32.

[66] La plaignante soutient que, vu le manque de rentabilité de Voest au cours des derniers trimestres, un montant pour les bénéfices à l’égard de Voest devrait être calculé pour la période la plus récente au cours de laquelle l’entreprise a enregistré un profit. Par conséquent, l’estimation de la plaignante se fonde sur les renseignements financiers de la division du génie des métaux de Voest (qui fabrique les marchandises en cause) au premier trimestre (T1) et au deuxième trimestre (T2) de l’exercice 2019-2020 (avril à septembre 2019). Ainsi, le profit de la division (avant intérêts et impôts) de 5,2 %, en pourcentage des coûts totaux, a été utilisé pour estimer les valeurs normalesNote de bas de page 33.

Estimations de l’ASFC

[67] L’ASFC souligne que le marché autrichien des FTPP est négligeable. Ainsi, faute de prix intérieurs fiables pour les ventes de FTPP en Autriche, aux fins d’ouverture de l’enquête, l’ASFC a estimé les valeurs normales selon une méthode de coût reconstitué prévue à l’alinéa 19b) de la LMSI, à partir de la somme d’une estimation du coût de production des marchandises en cause, d’un montant raisonnable pour les FFAFV et d’un autre pour les bénéfices.

[68] L’ASFC accepte la méthode de coût reconstitué décrite ci-dessus qui a été employée par la plaignante pour estimer les valeurs normales. Toutefois, elle a apporté des rectifications au coût de production estimatif et au montant pour les FFAFV de la façon énoncée ci-dessous.

[69] En ce qui concerne le coût de production, l’ASFC n’a pas accepté les frais de main-d’œuvre supplémentaires en sus du facteur de rectification égal à 145 % des coûts de Tenaris Canada, et n’a pas non plus pris en compte la rectification complète des coûts par la plaignante pour ce qui est des écarts, car la preuve donnée dans la plainte ne suffisait pas à étayer ces affirmations.

[70] L’ASFC a estimé un montant raisonnable pour les FFAFV d’après les renseignements financiers fournis dans la plainte à l’égard de Voest. À l’aide de ces renseignements, elle a estimé un montant pour les FFAFV égal à 9,7 % du coût de production.

[71] L’ASFC accepte, sans rectification, le montant raisonnable pour les bénéfices estimé par la plaignante à partir des renseignements financiers de la division du génie des métaux de Voest. Ainsi, elle a estimé un montant égal à 5,2 % du coût de production.

[72] L’ASFC a estimé les valeurs normales à partir des renseignements fournis par la plaignante, avec les rectifications décrites ci-dessus à l’égard des produits exportés de l’Autriche dans la période visée, d’après sa propre analyse des données douanièresNote de bas de page 34. Elle a fait l’appariement du produit importé avec un des produits à l’égard desquels une valeur normale a été estimée, en fonction de la nuance, du diamètre extérieur et de la finition des extrémités.

Prix à l’exportation

[73] Le prix à l’exportation de marchandises vendues à un importateur au Canada sera généralement déterminé selon l’article 24 de la LMSI, comme étant la valeur la plus basse entre le prix de vente de l’exportateur et le prix auquel l’importateur aura acheté ou convenu d’acheter les marchandises, moins tous les frais, droits et taxes imputables à l’exportation elle-même.

[74] La plaignante a estimé les prix à l’exportation selon l’article 24 de la LMSI, d’après les données sur les importations tirées des données douanières affinéesNote de bas de page 35 pour la période du 1 janvier 2020 au 31 décembre 2020.

[75] La plaignante a supposé que les frais de transport de l’usine au port, de chargement et de logistique ont été compris dans la valeur en douane déclarée par les importateurs. C’est pourquoi elle a soustrait ces frais estimatifs des prix à l’exportation estimatifsNote de bas de page 36.

[76] À titre d’analyse supplémentaire, Tenaris Canada a estimé les prix à l’exportation selon une approche de la valeur de référence, en partant du prix de vente franco au Canada d’un distributeur et en déduisant la marge estimative sur le coût de celui-ci ainsi que les frais de transport pour obtenir un prix départ usine en AutricheNote de bas de page 37.

[77] Vu la nature confidentielle de l’appariement de produits, le tableau des prix à l’exportation n’est pas reproduit dans le présent rapport, mais a été présenté dans la plainte en tant que pièce confidentielleNote de bas de page 38.

[78] Pour estimer les prix à l’exportation aux fins d’ouverture, l’ASFC a utilisé la valeur en douane et la quantité signalées dans le SGER et le SSMAEC pour chaque expédition importée dans la période visée. Elle a apporté des rectifications aux données pour corriger les erreurs et éliminer les importations de marchandises non en cause d’après sa propre analyse.

Marge estimative de dumping

[79] L’ASFC a estimé la marge de dumping pour l’Autriche en choisissant un échantillon représentatif et en comparant les valeurs normales estimatives totales selon l’alinéa 19b) de la LMSI avec les prix à l’exportation estimatifs moyens totaux selon l’article 24 de la même loi dans la période visée (1 janvier 2020 au 31 décembre 2020).

[80] La marge estimative moyenne pondérée de dumping dans la période visée s’élève à 7,7 % du prix à l’exportation estimatif.

Preuves de dommage

[81] La plaignante allègue, premièrement qu’il y a eu dumping des marchandises en cause en provenance de l’Autriche, et deuxièmement que ce dumping a causé et menace de causer un dommage sensible à la branche de production nationale.

[82] La LMSI mentionne le dommage sensible causé aux producteurs nationaux de marchandises similaires au Canada. L’ASFC a conclu que les FTPP produites par la branche de production nationale étaient « similaires » aux marchandises en cause en provenance de l’Autriche.

[83] La plaignante s’est fiée dans une large mesure au renseignement commercial interne pour documenter le dommage qu’elle associe au présumé dumping, en partie parce que les deux autres producteurs canadiens, Evraz et WTC, n’ont pas exprimé d’opinion pour ou contre le dépôt de la plainte et, donc, n’ont pas présenté d’élément de preuve relativement aux allégations de dumping ou de dommage.

[84] La plaignante allègue que les marchandises en cause sous-évaluées ont conquis une part du marché de Tenaris CanadaNote de bas de page 39 et ont entraîné une baisse, une compression et un effritement des prix, ce qui, à son tour, a entraîné une perte de ventes et des déclins substantiels du rendement financier pour ce qui est de sa production de marchandises similaires au CanadaNote de bas de page 40. La plaignante fait aussi valoir que le présumé dumping a entraîné un déclin de l’emploi et du rendement des investissementsNote de bas de page 41.

Proportion majeure

[85] Une condition à remplir avant l’ouverture d’une enquête est qu’il doit y avoir une indication raisonnable que le dumping ou le subventionnement a causé un dommage à la branche de production nationale. La branche de production nationale est définie au paragraphe 2(1) de la LMSI, qui se lit en partie comme suit : « les producteurs nationaux dont la production totale de marchandises similaires constitue une proportion majeure de la production collective nationale des marchandises similaires […] »

[86] Bien que le terme « proportion majeure » ne soit pas défini dans la LMSI ou les accords de l’Organisation mondiale du commerce, l’ASFC entend par ce terme depuis un certain temps une proportion minimale de 25 % à 30 %. Ainsi, dans la pratique, une plainte doit contenir des preuves de dommage touchant de 25 % à 30 % de la production canadienne. Par conséquent, la règle des 25 % aux fins des conditions d’ouverture sera respectée dans la plupart des cas dans le cadre de l’analyse de la proportion majeureNote de bas de page 42.

[87] Selon le tableau de l’estimation de la production ci-dessous, Tenaris Canada représente de loin plus de 30 % de la production des marchandises similaires au Canada. Ainsi, Tenaris Canada répond à elle seule à la condition du paragraphe 2(1) de la LMSI puisqu’elle représente une production plus que suffisante pour être considérée comme une proportion majeure des marchandises similaires au Canada.

[88] L’estimation de la plaignante de la production de FTPP au Canada est comme suit :

Tableau 3
Production de marchandises similaires au canada
(tonnes métriques)
Branche de production nationale1 2018 2019 2020
Tenaris Canada 59,90 % 49,10 % 59,80 %
Evraz 34,50 % 46,00 % 34,80 %
WTC 5,60 % 4,90 % 5,40 %
Production nationale totale 100 % 100 % 100 %
  1. 1Les données d’Evraz et de WTC pour 2019 et 2020 proviennent des renseignements présentés à l’ASFC par les entreprises respectives, qui lui ont aussi confirmé leur opinion neutre à l’égard de la plainte. Les autres données proviennent de la plainte.

Sensibilité au prix des marchés intérieur et mondial des FTPP

[89] La plaignante mentionne la sensibilité au prix des FTPP au Canada dans le contexte des faits nouveaux sur la scène nationale et internationale qui ont eu une incidence sur le secteur pétrolier et gazier au cours des 18 derniers mois, principalement la pandémie et l’effondrement du prix du pétroleNote de bas de page 43.

[90] Ces faits nouveaux ont eu un effet en cascade dévastateur, y compris dans le marché des FTPP au Canada. Les estimations de l’ASFC indiquent un déclin de 49 % du volume en 2020 par rapport à 2019, et ce, après un déclin déjà important de 33 % en 2019 par rapport à 2018. Ainsi, le déclin cumulatif du marché canadien apparent des FTPP de 2018 à 2020 s’élève à 66 %.

[91] La plaignante résume l’enjeu en affirmant que le ralentissement du marché a fait croître la sensibilité au prix, ce qui a été exploité par les exportateurs des marchandises en cause. Elle ajoute que, dans le contexte de la baisse du revenu total, chaque vente et chaque dollar de profit perdus ont une incidence encore plus grandeNote de bas de page 44.

[92] On s’attend à ce qu’il y ait des améliorations du prix du pétrole et du nombre de puits forés au cours de l’année à venir, ce qui devrait faire croître la demande de FTPP. L’Association canadienne des services pétroliers prévoirait le forage d’un total de 3 600 puits au Canada en 2021, soit une légère augmentation de 250 puits par rapport à sa prévision de janvier 2021Note de bas de page 45.

[93] La plaignante mentionne aussi les tarifs de 25 % sur l’acier imposés par les États-Unis au titre de l’article 232 de la Trade Expansion Act, entrée en vigueur le 1 juin 2018, lesquels entraîneraient le détournement de FTPP autrement destinées à ce pays. D’après les données fournies par la plaignante, les exportations de FTPP de l’Autriche vers les États-Unis ont diminué de façon marquée depuis l’imposition de ces mesures, comme suitNote de bas de page 46 :

Tableau 4
Importations aux États-Unis
(tonnes métriques)
Pays 2018 2019 2020
Autriche 180 190 123 994 8 300

[94] L’orientation vers l’exportation de l’Autriche pour ce qui est de ses ventes de FTPP, l’importance du marché canadien (le quatrième dans le monde) et la proximité du Canada aux États-Unis font en sorte qu’il s’agit d’une préoccupation grandissante pour la plaignante. La contraction de la demande sur le marché canadien et le ralentissement économique aggravent le dommage causé par chaque vente qui est perdue à une importation sous-évaluée; il y a tout simplement moins de ventes à réaliser qu’il y a de cela deux ans seulement.

Augmentation de la part du marché des importations de marchandises en cause

[95] Les importations de marchandises en cause de l’Autriche ont en fait diminué en termes de volumes absolus dans la période de 2018 à 2020. Ainsi, même si la plaignante mentionne les volumes croissants d’importations de marchandises en cause à bas prixNote de bas de page 47, elle insiste sur la part accrue du marché occupée par les importations autrichiennes en termes de volumes relatifs plutôt qu’absolus au cours de cette période.

[96] La plaignante affirme que des volumes croissants considérables de marchandises en cause ont été importés par rapport à la production et à la consommation nationales, les importations ayant plus que doublé leur part du marché en fonction du volume de 2018 à 2020, et ce, malgré un marché canadien des FTPP en décroissanceNote de bas de page 48.

[97] Selon l’estimation de l’ASFC du marché canadien au tableau 2, même si les volumes absolus ont fortement diminué, les marchandises en cause de l’Autriche ont conquis une part du marché, de 7,8 % en 2018 à 8,2 % en 2019 à 8,6 % en 2020. Dans la même période, la part du marché de Tenaris Canada est passée de 24,2 % en 2018 à 25,8 % en 2019 à 38,0 % en 2020.

[98] La plaignante allègue que les marchandises en cause ont conquis une part du marché par le dumping, et ainsi, ont déplacé des ventes que Tenaris Canada aurait pu autrement réaliser, en plus de lui faire perdre une part du marché. Elle ajoute que, dans un marché canadien décroissant, ces volumes additionnels auraient permis de compenser les coûts fixes, ce qui revêt une si grande importance pour les activités à forte intensité capitalistique de Tenaris CanadaNote de bas de page 49.

[99] La plaignante mentionne aussi le changement du mélange de produits, en particulier de 2018 à la fin de 2019, période au cours de laquelle une plus grande proportion de marchandises en cause haut de gamme ont commencé à entrer sur le marché canadien. Ce changement pour une proportion plus grande de produits haut de gamme ferait augmenter les prix à l’exportation moyens des marchandises en cause, ce qui masquerait un dumping de plus en plus importantNote de bas de page 50.

[100] L’analyse de l’ASFC des importations autrichiennes confirme que les nuances et les spécifications des marchandises exportées de ce pays portent raisonnablement à croire que celles-ci font directement concurrence aux marchandises similaires de Tenaris Canada.

[101] D’après ce qui précède et sa propre analyse des renseignements contenus dans la plainte, l’ASFC est d’avis que les éléments de preuve donnent une indication raisonnable que, même si la plaignante a accru sa part du marché, elle a vu celle-ci se comprimer dans la période visée, et donc qu’il y a une corrélation partielle raisonnable avec le présumé dumping.

Baisse et compression des prix

[102] La plaignante fait mention de déclarations antérieures du TCCE, qui a reconnu, dans d’autres affaires, que de petits volumes d’importations, et même des offres d’importations, à bas prix peuvent entraîner des baisses substantielles des prixNote de bas de page 51.

[103] La plaignante a ensuite présenté des éléments de preuve et une analyse montrant que les prix des marchandises en cause ont fait baisser ceux des marchandises de production nationaleNote de bas de page 52, notamment pour ce qui est de nuances et de spécifications particulières de FTPP. Elle allègue en outre que la baisse des prix a une réaction en chaîne touchant tant les marchandises perfectionnées que les marchandises bas de gamme, comme suit [notre traduction] :

« Les effets négatifs ne se limitent pas au prix d’un modèle donné, ou même d’une nuance et d’un raccord donnés. Puisque bon nombre des marchandises en cause sous-évaluées sont des produits haut de gamme, ce dumping fait aussi baisser les prix des modèles de nuance et de raccord inférieurs de deux façons. Premièrement, des nuances supérieures peuvent se substituer à des nuances inférieures. Si un client peut obtenir un produit sous-évalué traité thermiquement de nuance L80 ou P110 pour à peu près le même prix qu’un produit national non traité thermiquement de nuance J55, il pourra faire la substitution. Pour qu’un producteur national comme Tenaris Canada puisse vendre le produit de nuance J55 dans ce scénario, il devra offrir un rabais suffisamment important pour rendre son produit le choix préféré […] Deuxièmement, les clients s’attendent à des différences de prix rationnelles. Si un client sait qu’il peut acheter un produit de nuance améliorée L80 avec raccord de qualité supérieure pour un montant donné, il s’attendra à pouvoir acheter un produit de nuance de base L80 ou même de nuance J55 avec raccord API pour beaucoup moins cherNote de bas de page 53. »

[104] La plaignante a présenté peu d’éléments de preuve de la compression des prix, mais allègue qu’il y a eu des hausses importantes des coûts qu’elle n’a pu compenser en augmentant les prix en raison du présumé dumpingNote de bas de page 54.

[105] L’ASFC souligne que, malgré la mention des hausses des coûts, aucun renseignement n’a été fourni pour indiquer la source des hausses ou illustrer les hausses connues. Par ailleurs, les éléments de preuve au dossier indiquent que les coûts des matières premières (billettes) ont connu une baisse substantielle pendant la majeure partie de 2020 par rapport à 2019Note de bas de page 55.

[106] Ainsi, le déclin marqué de la taille du marché canadien et la baisse des coûts des intrants de matières premières ont vraisemblablement eu une incidence considérable sur l’incapacité de la plaignante d’augmenter les prix dans la période la plus récente visée par l’enquête.

[107] La plaignante reconnaît, en fait, que le récent ralentissement des activités de forage canadiennes a fait baisser la demande de FTPP au Canada, ce qui a eu une incidence négative sur les producteurs nationaux puisque les volumes de ventes possibles ont naturellement diminuéNote de bas de page 56.

[108] Par conséquent, même si l’ASFC convient qu’une partie de la baisse des prix connue par la plaignante peut raisonnablement s’expliquer par la concurrence des marchandises en cause présumées sous-évaluées, elle juge que le déclin marqué de la taille du marché canadien et la baisse correspondante de la demande de FTPP au Canada sont des facteurs importants ayant aussi contribué à la pression à la baisse exercée sur les prix intérieurs des FTPP.

Perte de ventes et effritement des prix

[109] La plaignante a présenté à l’appui huit allégations propres aux comptes comme quoi les marchandises en cause ont entraîné un effritement de ses prix de vente au Canada et ont fait perdre à Tenaris Canada des ventes de marchandises similaires au paysNote de bas de page 57. La nature confidentielle des allégations propres aux comptes fait en sorte que nous ne pouvons entrer dans le détail de celles-ci dans le présent Énoncé des motifs public.

[110] La plaignante affirme aussi que la plus grande partie du renseignement commercial ne lui est pas communiqué sur support papier ou écrit et que, parfois, les producteurs nationaux peuvent obtenir des renseignements de vive voix sur les prix des concurrents, par exemple lors d’un appel téléphonique, d’une pause-café ou d’un déjeuner avec un représentant d’un clientNote de bas de page 58. Cette information fait partie des allégations d’effritement des prix et de perte de ventes formulées par la plaignante.

[111] Tenaris Canada insiste également sur le fait que chacune des allégations de perte de ventes se rapporte à des marchandises qui seraient fabriquées au Canada. Elle ajoute ce qui suit [notre traduction] :

« Tenaris Canada se procure certaines FTPP auprès de ses filiales (notamment TAMSA au Mexique) lorsqu’elle ne peut les produire au Canada (tailles particulières). Dans ses allégations propres aux comptes, Tenaris Canada ne fait mention que des volumes et des produits qui auraient été produits au CanadaNote de bas de page 59. »

[112] Vu le déclin du marché canadien en 2020, il est difficile de différencier l’incidence sur le prix du présumé dumping de celle du déclin du marché. Cependant, selon les renseignements fournis par la plaignante, on lui aurait dit que les produits autrichiens faisaient baisser les prix. D’après les prix signalés par Tenaris Canada, il semble que les prix concurrentiels de certaines nuances à volume élevé provenant de l’Autriche en 2020 seraient sous-évalués, compte tenu de l’estimation de l’ASFC des valeurs normales et des facteurs liés aux frais de transport et au profit du distributeurNote de bas de page 60.

[113] L’ASFC est d’avis que, même si bon nombre des allégations propres aux comptes de perte de ventes et d’effritement des prix ne peuvent être directement associées aux produits exportés de l’Autriche, leur accumulation donne une indication raisonnable que la plaignante est confrontée à un gâchage des prix par les marchandises en cause pour une gamme de nuances, ce qui a un effet d’effritement indirect sur les prix intérieurs globaux de FTPP de Tenaris Canada.

[114] L’ASFC est aussi d’avis qu’il est raisonnable de croire que, d’après le détail donné dans les allégations propres aux comptes, Tenaris Canada a été confrontée à un effritement direct des prix et à une perte de ventes, en particulier pour des nuances clés de FTPP connues pour avoir été exportées de l’Autriche.

Incidence négative sur le rendement financier

[115] Selon la plaignante, le présumé dumping a eu une incidence négative sur son rendement financier. La plaignante affirme que la branche de production nationale est confrontée à des marges brutes et de profit insoutenables, ce qu’elle explique par la nécessité de baisser les prix pour concurrencer ceux des importations de marchandises en cause présumées sous-évaluéesNote de bas de page 61.

[116] La plaignante affirme que le dommage s’est aggravé à mesure que les importations de marchandises en cause ont contraint Tenaris Canada à grandement réduire les prix de vente en 2020 par rapport à 2018, malgré la hausse considérable du coût des marchandises venduesNote de bas de page 62.

[117] La plaignante reconnaît également que ses volumes de production réduits contribuent à ses coûts accrus, ce qui, à son tour, contribue à ses marges brutes décroissantes puisque ses coûts fixes doivent être répartis sur un volume moindreNote de bas de page 63.

[118] Tenaris Canada fait valoir que, sans dumping, ce déclin des prix n’aurait pas eu lieu, et elle estime qu’elle aurait eu un meilleur rendement financierNote de bas de page 64.

[119] D’après ce qui précède et sa propre analyse des renseignements contenus dans la plainte, l’ASFC est d’avis que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le présumé dumping — qui a gâché les prix de la branche de production nationale, a contribué à la baisse et à l’effritement des prix, et lui a fait perdre des ventes — a eu une incidence négative sur les résultats financiers de la plaignante.

Incidence négative sur l’emploiNote de bas de page 65

[120] La plaignante affirme que le présumé dumping, qui, comme nous l’avons déjà vu dans la section précédente, a eu une incidence négative sur son rendement financier, a aussi eu une incidence considérable sur sa capacité de maintenir des niveaux d’emploi optimaux.

[121] La plaignante a fourni des renseignements sur ses pertes au niveau de l’emploi dans la production de FTPP en fonction du nombre moyen d’employés par année civileNote de bas de page 66.

[122] La plaignante affirme que, vu le déclin du marché global, il y aurait vraisemblablement eu une baisse de l’emploi de 2018 à 2020Note de bas de page 67. Elle soutient toutefois que, sans dumping, ses niveaux d’emploi auraient été plus élevés.

[123] L’ASFC souligne que la baisse de l’emploi connue par Tenaris Canada n’est pas disproportionnée par rapport à ce à quoi on pourrait s’attendre au regard de l’estimation de l’ASFC du marché canadien apparent. D’autres facteurs atténuants, y compris la fermeture de Prudential et les pénuries de matières premières aux usines de production canadiennes, ont également contribué aux baisses de l’emploiNote de bas de page 68.

[124] D’après ce qui précède et les renseignements contenus dans la plainte, l’ASFC est d’avis que les éléments de preuve de la plaignante ne sont pas concluants pour ce qui est de l’incidence du présumé dumping sur l’emploi, compte tenu des facteurs atténuants importants, y compris le déclin du marché canadien, le déplacement de la production de Prudential à Algoma, qui a entraîné une réduction prolongée de l’emploi en lien avec la fermeture de l’usine de Prudential, ainsi que la poursuite des volumes substantiels d’importations de FTPP du Mexique par Tenaris Canada, dont certaines auraient pu être produites au CanadaNote de bas de page 69.

Incidence négative sur le rendement des investissementsNote de bas de page 70

[125] La plaignante mentionne son engagement à investir dans ses activités canadiennes, et elle affirme que le présumé dumping a retardé le rendement de ces investissements.

[126] Tenaris Canada affirme que ces investissements planifiés coûteront environ 36 millions de dollars. Elle a entamé ces projets en juillet 2019. Elle cite le présumé dumping comme raison pour laquelle les investissements n’ont pas commencé plus tôt, par exemple en 2018. Elle affirme que ces investissements auraient créé des emplois, injecté des fonds dans la collectivité et renforcé ses capacités de productionNote de bas de page 71.

[127] Les investissements ont été annoncés en 2019 malgré le présumé dumping, et uniquement par suite de la contribution du Fonds pour l’innovation stratégique du gouvernement fédéral. Même avec le soutien du gouvernement, Tenaris Canada s’attend à ce que le rendement de ses investissements engagés soit nettement inférieur (voire inexistant) en raison du présumé dumping dommageable des marchandises en causeNote de bas de page 72.

[128] La plaignante affirme en outre que des investissements sont proposés pour remplacer encore plus d’importations à l’égard d’une variété de produits à l’avenir par une augmentation de la capacité et de la gamme de produits, mais que ces plans dépendent d’une concurrence loyale sur le marché canadien des FTPPNote de bas de page 73.

[129] D’après ce qui précède et les renseignements contenus dans la plainte, l’ASFC est d’avis que les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le mauvais rendement financier, qui s’explique en partie par le présumé dumping, a eu une incidence négative sur la capacité de la plaignante d’obtenir un taux de rendement raisonnable pour ses investissements et de faire d’autres investissements dans ses capacités de production.

Conclusion de l’ASFC concernant le dommage

[130] L’ASFC a examiné les facteurs de dommage abordés précédemment. D’après les renseignements contenus dans la plainte et ceux provenant de ses propres recherches et documents douaniers, elle est d’avis que les éléments de preuve donnent une indication raisonnable que le présumé dumping a causé un dommage à la branche de production nationale.

[131] Les exportations de marchandises en cause de l’Autriche ne sont pas négligeables et ont conquis une part du marché au Canada en 2019 et en 2020Note de bas de page 74. Par ailleurs, la part du marché des FTPP autrichiennes, par rapport à toutes les importations, s’est accrue, pour représenter 22,3 % des importations en fonction du volume au T1 de 2021Note de bas de page 75.

[132] La présence des importations de marchandises en cause présumées sous-évaluées donne une indication raisonnable du dommage subi en termes de perte de ventes; de baisse et d’effritement des prix; et d’incidence négative sur le rendement financier et le rendement des investissements.

Menace de dommage

[133] La plaignante allègue que les marchandises sous-évaluées menacent de causer encore un dommage sensible aux producteurs nationaux de FTPP. Elle a fourni les renseignements suivants à l’appui de son allégationNote de bas de page 76.

Vraisemblance de l’augmentation des importations de marchandises en cause

[134] La plaignante mentionne l’orientation vers l’exportation de Voest en Autriche, qui continuera vraisemblablement d’augmenter les volumes de marchandises en cause destinées au Canada vu l’utilisation de la capacité et la demande réduites pour les FTPPNote de bas de page 77. La plaignante affirme que, comme l’industrie autrichienne des FTPP tourne à de faibles niveaux insoutenables d’utilisation de la capacité, elle cherche activement à augmenter l’utilisation, y compris les exportations de FTPP vers le Canada, l’un des principaux marchés mondiauxNote de bas de page 78.

[135] La plaignante ajoute ce qui suit [notre traduction] :

« Le Canada est le quatrième marché mondial des FTPP. Il est actuellement librement accessible aux marchandises de l’Autriche. Selon des données douanières autrichiennes, 22 % des exportations de ce pays sont vers le Canada, soit trois fois le pourcentage de la prochaine destination la plus importante. De plus, 68 % des exportations de FTPP de l’Autriche sont destinées à l’Amérique du NordNote de bas de page 79. Vu les mesures prises par les États-Unis au titre de l’article 232, la sursaturation du marché intérieur chinois en raison de la capacité excédentaire intérieure, et les pratiques d’approvisionnement russes limitant la participation possible de Voest dans ce marché, le Canada est le principal marché accessible pour les FTPP, et Voest a tâché de conquérir une part du marché et d’obtenir des ventes par des prix déloyauxNote de bas de page 80. »

[136] Il est également souligné que la part du marché canadien des importations de l’Autriche a augmenté, et ce, de façon non négligeable. De plus, avec l’amélioration prévue des activités de forage au Canada en 2021, le marché canadien sera attrayant pour les FTPP autrichiennes.

Sensibilité continue au prix

[137] La plaignante affirme que la tendance à la baisse de la demande de FTPP se poursuivra vraisemblablement à court et moyen terme en raison du ralentissement de l’économie mondiale. Elle ajoute que la sensibilité au prix des acheteurs de FTPP, découlant de ces conditions et d’autres, a favorisé et continuera de favoriser les importations de marchandises en cause puisqu’elles sont le chef de file en matière de prix pour de nombreux produits, ce qui leur a d’ailleurs permis d’accroître leur part du marchéNote de bas de page 81.

[138] La plaignante affirme en outre que l’incertitude et la volatilité entourant les prix du pétrole ont aussi fait hésiter à acheter des FTPP, et que l’hésitation rend plus attrayante l’option d’achat la moins chère. Même si elle reconnaît que la demande de FTPP augmentera vraisemblablement, elle allègue que le dumping des marchandises en cause risque de maintenir les prix à de bas niveaux et de réduire les avantages que Tenaris Canada pourrait tirer d’une reprise éventuelle de la demandeNote de bas de page 82.

Conclusion de l’ASFC concernant la menace de dommage

[139] L’ASFC est d’avis que les éléments de preuve donnés dans la plainte indiquent, de façon raisonnable, que le présumé dumping présente une menace pour la branche de production nationale en raison de la vraisemblance de l’accroissement continu de la part du marché des marchandises en cause et de la vraisemblance de leur incidence négative sur le prix des marchandises similaires au Canada, ce qui se traduit par de mauvais résultats financiers.

Lien de causalité entre le dumping et le dommage et la menace de dommage

[140] L’ASFC juge que la plaignante a bien su associer le dommage subi avec le présumé dumping au Canada. Ce dommage comprend une augmentation substantielle des importations de marchandises en cause; une perte de ventes; une baisse et un effritement des prix; et une incidence négative sur le rendement financier et le rendement des investissements.

[141] L’ASFC est aussi d’avis que la plaignante a présenté des éléments de preuve suffisants donnant une indication raisonnable que le présumé dumping des marchandises en cause menace de causer encore un dommage à l’avenir.

Conclusion

[142] À l’examen de la plainte, de ses propres documents d’importation et des autres renseignements disponibles, l’ASFC est d’avis que les éléments de preuve indiquent que des FTPP originaires ou exportées de l’Autriche ont fait l’objet d’un dumping, et qu’il y a une indication raisonnable que ce dumping a causé et menace de causer un dommage à la branche de production nationale. Par conséquent, le 7 juillet 2021, conformément au paragraphe 31(1) de la LMSI, elle a ouvert une enquête en dumping.

Portée de l’enquête

[143] L’ASFC enquête pour déterminer si les marchandises en cause ont fait l’objet d’un dumping.

[144] L’ASFC a demandé des renseignements à tous les exportateurs et importateurs potentiels afin de déterminer si les marchandises en cause importées au Canada dans la période visée par l’enquête, soit du 1 mai 2020 au 30 avril 2021, étaient sous-évaluées. Les renseignements demandés serviront à établir les valeurs normales, les prix à l’exportation et les marges de dumping, s’il y a lieu.

[145] Toutes les parties ont été clairement avisées des renseignements dont l’ASFC a besoin et du temps dont elles disposent pour les fournir.

Mesures à venir

[146] Le TCCE fera une enquête préliminaire pour décider si les éléments de preuve donnent une indication raisonnable que le présumé dumping des marchandises a causé ou menace de causer un dommage à la branche de production nationale. Le TCCE doit rendre sa décision dans les 60 jours après l’ouverture de l’enquête; si elle est négative, il mettra fin à l’enquête.

[147] Si la décision de dommage du TCCE est positive et que l’enquête préliminaire de l’ASFC conclut effectivement à un dumping, l’ASFC rendra une décision provisoire de dumping dans les 90 jours après avoir ouvert son enquête, soit d’ici le 5 octobre 2021. Si les circonstances le justifient, ce délai pourra être porté à 135 jours.

[148] Si, avant d’avoir rendu une décision provisoire, l’ASFC devient convaincue que les marchandises d’un pays donné ne se sont importées au Canada qu’en quantités négligeables, l’article 35 de la LMSI l’obligera à mettre fin au volet de son enquête portant sur ce pays.

[149] Les marchandises en cause importées et dédouanées à compter du jour de la décision provisoire de dumping, si leur description ne correspond pas à celle de marchandises dont il a été décidé que leur marge de dumping était négligeable, peuvent être frappées de droits provisoires ne dépassant pas leur marge estimative de dumping.

[150] Si l’ASFC rend une décision provisoire de dumping, elle continuera d’enquêter pour en arriver à une décision définitive dans les 90 jours après la décision provisoire.

[151] Après la décision provisoire, si son enquête révèle que les marchandises d’un exportateur donné n’ont pas été sous-évaluées par une marge de dumping non négligeable, l’ASFC exclura de son enquête les marchandises de cet exportateur.

[152] Advenant une décision définitive de dumping, le TCCE continuera son enquête et tiendra des audiences publiques sur la question du dommage sensible causé à la branche de production nationale. Il aura 120 jours après la décision provisoire de l’ASFC pour rendre ses conclusions sur les marchandises auxquelles cette décision définitive s’applique.

[153] Si le TCCE rend des conclusions de dommage, les marchandises en cause importées et dédouanées après cette date seront frappées de droits antidumping équivalents à leur marge de dumping.

Droits rétroactifs sur les importations massives

[154] Lorsque le TCCE mène son enquête sur le dommage causé à la branche de production nationale, il peut se demander si les marchandises sous-évaluées importées un peu avant ou après l’ouverture de l’enquête constituent des importations massives sur une courte période ayant causé un dommage à la branche de production nationale.

[155] S’il conclut par l’affirmative, alors les importations de marchandises en cause dédouanées auprès de l’ASFC dans les 90 jours précédant la date de la décision provisoire pourraient être frappées de droits antidumping.

Engagements

[156] Après que l’ASFC a pris une décision provisoire de dumping selon laquelle la marge estimative de dumping n’est pas minimale, un exportateur peut prendre l’engagement écrit de réviser ses prix de vente au Canada de façon à éliminer la marge de dumping ou le dommage.

[157] Seuls sont acceptables les projets d’engagement qui englobent toutes les exportations ou presque de marchandises sous-évaluées vers le Canada. Après le dépôt d’un projet d’engagement, les parties intéressées ont neuf jours pour présenter leurs observations. L’ASFC tiendra une liste des parties intéressées, et les avisera des projets reçus. Quiconque souhaite être avisé doit fournir son nom, son adresse, son numéro de téléphone, son numéro de télécopieur et son adresse électronique à l’un des agents dont le nom figure ci-après sous « Renseignements ».

[158] Dès l’acceptation d’un engagement, l’enquête et la perception des droits provisoires sont suspendues. Mais même alors, un exportateur peut demander que l’ASFC termine son enquête en dumping, et le TCCE, sa propre enquête en dommage.

Publication

[159] Un avis d’ouverture de la présente enquête sera publié dans la Gazette du Canada conformément au sous-alinéa 34(1)a)(ii) de la LMSI.

Renseignements

[160] Nous invitons les parties intéressées à présenter par écrit des exposés renfermant les faits, arguments et éléments de preuve qui, selon elles, ont trait au présumé dumping. Les exposés écrits doivent être envoyés à l’attention du Centre de dépôt et de communication des documents de la LMSI.

[161] Pour être pris en considération dans le cadre de la présente enquête, tous les renseignements doivent être reçus par l’ASFC au plus tard le 10 novembre 2021.

[162] Tous les renseignements présentés à l’ASFC par les parties intéressées au sujet de la présente enquête seront considérés comme publics, sauf s’ils portent clairement la mention « confidentiel ». Lorsque l’exposé d’une partie intéressée est confidentiel, une version non confidentielle de l’exposé doit être fournie en même temps. La version non confidentielle sera mise à la disposition des autres parties intéressées sur demande.

[163] Les éléments confidentiels seront communiqués sur demande écrite aux avocats indépendants des parties, contre engagement à protéger leur confidentialité. Ils pourront être communiqués également au TCCE, à toute cour canadienne, et aux groupes spéciaux de l’Organisation mondiale du commerce ou de l’Accord Canada–États-Unis–Mexique pour le règlement des différends. Pour en savoir plus sur la politique de l’ASFC concernant la communication de renseignements au titre de la LMSI, on pourra communiquer avec le Centre de dépôt et de communication des documents de la LMSI ou bien visiter le site Web de l’ASFC.

[164] Le calendrier de l’enquête et une liste complète des pièces justificatives sont disponibles. La liste sera tenue à jour.

[165] Le présent Énoncé des motifs est disponible sur le site Web de l’ASFC à l’adresse ci-dessous. Pour de plus amples renseignements, on communiquera avec les agents dont le nom figure ci-après :

Centre de dépôt et de communication des documents de la LMSI
Direction des programmes commerciaux et antidumping
Agence des services frontaliers du Canada
11-100 rue Metcalfe
Ottawa ON  K1A 0L8

  • Téléphone :
  • Jonathan Thiffault : 343-553-1639

Courriel: simaregistry-depotlmsi@cbsa-asfc.gc.ca

Le directeur général
Direction des programmes commerciaux et antidumping
Doug Band

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