CSWP3 2018 IN
Tubes soudés en acier au carbone
Énoncé des motifs

Ottawa, le 2 novembre 2018

De la décision provisoire de dumping rendue à l’égard des tubes soudés en acier au carbone en provenance du Pakistan, des Philippines, de la Turquie et du Vietnam.

Décision

Le 18 octobre 2018, conformément au paragraphe 38(1) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, l’Agence des services frontaliers du Canada a rendu une décision provisoire de dumping concernant certains tubes soudés en acier au carbone en provenance du Pakistan, des Philippines, de la Turquie et du Vietnam.

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Résumé de l’affaire

[1] Le 31 mai 2018, l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) a reçu, de Novamerican Steel Inc., pour le compte de ses filiales Nova Tube Inc. et Nova Steel Inc. (collectivement « Nova ») (ci-après « la plaignante »), une plainte écrite alléguant que les importations de certains tubes soudés en acier au carbone (TSAC) en provenance de la République islamique du Pakistan (Pakistan), de la République des Philippines (Philippines), de la République de Turquie (Turquie) et de la République socialiste du Vietnam (Vietnam) (ci-après « les pays visés ») sont sous-évaluées. La plaignante allègue que le dumping a causé et menace de causer un dommage à la branche de production nationale de marchandises similaires.

[2] Le 21 juin 2018, conformément à l’alinéa 32(1)a) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation (LMSI), l’ASFC a informé la plaignante que le dossier de plainte était complet. L’ASFC a aussi prévenu les gouvernements du Pakistan, des Philippines, de la Turquie et du Vietnam en ce sens.

[3] La plaignante a fourni des éléments de preuve à l’appui des allégations indiquant que les TSAC en provenance des pays visés sont sous-évalués. Ces éléments de preuve indiquent aussi, de façon raisonnable, que le dumping a causé et menace de causer un dommage à la branche de production nationale de marchandises similaires.

[4] Le 20 juillet 2018, conformément au paragraphe 31(1) de la LMSI, l’ASFC a ouvert une enquête en dumping sur les TSAC en provenance du Pakistan, des Philippines, de la Turquie et du Vietnam.

[5] Sitôt avisé de l’ouverture de l’enquête, le Tribunal canadien du commerce extérieur (TCCE) a ouvert sa propre enquête préliminaire en dommage conformément au paragraphe 34(2) de la LMSI pour savoir si le présumé dumping avait causé un dommage ou un retard, ou bien menaçait de causer un dommage, à la branche de production nationale.

[6] Le 18 septembre 2018, conformément au paragraphe 37.1(1) de la LMSI, le TCCE a rendu une décision provisoire comme quoi les éléments de preuve indiquaient de façon raisonnable que le dumping de TSAC en provenance des pays visés avait causé ou bien menaçait de causer un dommage à la branche de production nationale.

[7] Le 18 octobre 2018, par suite de son enquête préliminaire, et conformément au paragraphe 38(1) de la LMSI, l’ASFC a rendu une décision provisoire de dumping à l’égard des TSAC en provenance du Pakistan, des Philippines, de la Turquie et du Vietnam.

[8] Le 18 octobre 2018, conformément au paragraphe 8(1) de la LMSI, des droits provisoires ont été imposés sur les importations de marchandises sous-évaluées de même description que celles auxquelles la décision provisoire s’applique, et qui seraient dédouanées dans la période commençant le jour de la décision provisoire pour se terminer le jour où, soit l’ASFC mettrait fin à l’enquête pour n’importe quelles marchandises au titre du paragraphe 41(1) de la LMSI, soit le TCCE rendrait une ordonnance ou des conclusions au titre du paragraphe 43(1) de la même loi, selon la première éventualité.

Période visée par l'enquête

[9] La période visée par l’enquête (PVE) va du 1er juillet 2017 au 30 juin 2018.

Période d'analyse de rentabilité

[10] La période d’analyse de rentabilité (PAR) pour l’enquête va du 1er juillet 2017 au 30 juin 2018.

Parties intéressées

Plaignante

[11] Nova a été fondée en 1979 à Montréal (Québec) en tant qu’entreprise de transformation de l’acier comptant un seul emplacement. Nova s’est depuis développée pour compter neuf emplacements en Amérique du Nord.

[12] Nova exploite des usines de fabrication de TSAC à Montréal et à Baie-D’Urfé (Québec). Nova est producteur de TSAC au Canada et assure une grande partie de la production nationale de marchandises similaires.

[13] Son adresse est la suivante :

Novamerican Steel Inc.
6001, rue Irwin
Montréal (Québec)
H8N 1A1

[14] Les autres fabricants de marchandises similaires au Canada sont : Atlas Tube Canada ULC (Atlas); Bolton Steel Tube Co., Ltd. (Bolton); DFI Corporation (DFI); Evraz Inc. NA Canada (Evraz); Quali-T-Tube Inc. (Quali-T); Tenaris Canada (Tenaris); Welded Tube of Canada (Welded Tube)Note de bas de page 1. Voici leur adresse :

Nom de l’entreprise Adresse
Atlas 200, rue Clark
Harrow (Ontario)
N0R 1G0
Bolton 455A, chemin Piercey
Bolton (Ontario)
L7E 5B8
DFI 2404, 51eAvenue
Edmonton (Alberta)
T6P 0E4
Evraz (Headquarters) 200 East Randolph Drive, Suite 7800
Chicago, IL
60601
Quali-T 22, boul. De l’Aéroport
Bromont (Québec)
J2L 1S6
Tenaris 400, 530, 8eAvenue Sud-Ouest
Calgary (Alberta)
T2P 3S8
Welded Tube 111, chemin Rayette
Concord (Ontario)
L4K 2E9

Syndicat

[15] La plaignante a répertorié un syndicat qui représente des personnes employées dans la production de TSAC au Canada :

Syndicat des Métallos du Canada
393, rue Portneuf
Longueuil (Québec)
J4L 1E5

Importateurs

[16] L’ASFC a recensé au début de l’enquête 26 importateurs potentiels des marchandises en cause au moyen de ses documents d’importation et des renseignements fournis dans la plainte. Après avoir reçu les réponses à sa Demande de renseignements (DDR) en dumping, l’ASFC a recensé quatre autres importateurs. Elle a adressé une DDR à tous les importateurs potentiels des marchandises. L’ASFC a reçu six réponses à la DDR adressée aux importateurs.

Exportateurs

[17] L’ASFC a recensé au début de l’enquête 60 exportateurs/producteurs potentiels des marchandises en cause au moyen de ses documents d’importation et des renseignements fournis dans la plainte. Elle a adressé à tous les exportateurs potentiels une DDR en dumping.

[18] L’ASFC a ajouté à son enquête une enquête en vertu de l’article 20 afin de déterminer si les conditions décrites à l’alinéa 20(1)a) de la LMSI existent dans le secteur des tubes soudés en acier au carbone au Vietnam. Elle a donc aussi adressé aux exportateurs établis au Vietnam une DDR en vertu de l’article 20.

[19] Treize entreprises ont fait une réponse essentiellement complète à la DDR en dumping de l’ASFC. Parmi ces entreprises, huit ont été considérées comme des exportateurs des marchandises en cause aux fins de la LMSI. Leurs exposés et les résultats de l’enquête sont résumés dans la section « Résultats provisoires de l’enquête en dumping » ci-dessous.

[20] Quatre entreprises au Vietnam ont fait une réponse essentiellement complète à la DDR en vertu de l’article 20 de l’ASFC.

Gouvernements

[21] Aux fins de l’enquête qui nous intéresse, « gouvernement » (que ce soit celui de la Turquie ou du Vietnam) englobe tous les ordres de gouvernement : gouvernements fédéral, central, provinciaux/d’États, régionaux; municipalités (villes, cantons, villages, collectivités locales); autorités législatives, administratives ou judiciaires; indépendamment du fait que ceux-ci soient individuels ou collectifs, élus ou nommés. Le terme englobe aussi toute personne, tout organisme, toute entreprise ou tout établissement agissant pour le gouvernement central de ce pays ou ses gouvernements/administrations provinciaux, d’États, municipaux, locaux ou régionaux, ou encore sous leur autorité ou au titre de leurs lois.

[22] Au début de l’enquête, l’ASFC a adressé une DDR en vertu l’article 20 au gouvernement du Vietnam, qui a fait une réponse complète à la DDR.

[23] Le 31 août 2018, l’ASFC a adressé une DDR au gouvernement de la Turquie afin d’obtenir des renseignements pour son examen visant à déterminer si une situation particulière du marché existe sur le marché des tubes soudés en acier au carbone en Turquie. Le gouvernement de la Turquie a fait une réponse complète à la DDR.

Les produits

Définition

[24] Dans la présente enquête, les marchandises en cause sont définies comme suit :

Tubes soudés en acier au carbone, aussi appelés tuyaux normalisés, de dimensions nominales variant de ½ po à 6 po (diamètre extérieur de 12,7 mm à 168,3 mm) inclusivement, sous diverses formes et finitions, habituellement fournis pour répondre aux normes ASTM A53, ASTM A135, ASTM A252, ASTM A589, ASTM A795, ASTM F1083 ou de qualité commerciale, ou AWWA C200-97 ou aux normes équivalentes, y compris ceux pour le tubage de puits d’eau, les tubes pour pilotis, les tubes pour arrosage et les tubes pour clôture, mais à l’exception des tubes pour les canalisations de pétrole et de gaz fabriqués exclusivement pour répondre aux normes de l’API, originaires ou exportés de la République islamique du Pakistan, de la République des Philippines, de la République de Turquie et de la République socialiste du Vietnam.

PrécisionsNote de bas de page 2

[25] Les tubes en acier se classent généralement dans les groupes suivants selon leur utilisation ultime : TSAC (ou tubes normalisés), conduites sous pression, tubes de canalisation, tuyaux structuraux, tuyaux à usages mécaniques et fournitures tubulaires pour puits de pétrole (« FTPP »). Les produits qui entrent dans cette définition sont communément appelés dans l’industrie des « TSAC ».

[26] Les TSAC sont généralement produits selon diverses normes de l’industrie, comme l’American Society for Testing and Materials (ASTM) A53, ASTM A135, ASTM A252, ASTM A589, ASTM A795, ASTM F1083, la norme de qualité commerciale et l’American Water Works Association (AWWA) C200-97. Les TSAC peuvent aussi être produits selon des normes exclusives plutôt que selon les normes de l’industrie, comme c’est souvent le cas pour les tubes de clôtures, ou selon des normes étrangères. Par exemple, les TSAC importés peuvent être produits selon la Norme britannique (« BS ») 1387 ou BS EN 10255.

FabricationNote de bas de page 3

[27] La fabrication commence par une feuille d’acier qui est coulée pour lui donner une forme initiale utilisable. Les bords d’acier sont ensuite aboutés et soudés ensemble pour produire un TSAC. La présente section contient de plus amples renseignements sur la fabrication des TSAC.

[28] Les bobines d’acier plat laminé à chaud sont déroulées et fendues. Cet acier fendu est ensuite passé dans une série de rouleaux afin qu’il prenne une forme tubulaire.

[29] Les TSAC sont produits en usine, soit par soudage par résistance électrique (ERW), soit par soudage en continu (CW). Les deux procédés commencent avec des bobines d’acier plat laminé à chaud, découpées en bandes, dont la largeur correspond à la circonférence du tube qui doit être fabriqué.

[30] Dans le procédé ERW, la bande laminée à froid est passée dans une série de rouleaux qui lui donnent une forme tubulaire. Les bords sont alors chauffés électriquement et soudés ensemble par chaleur et pression. Ce procédé produit un cordon de soudure qui est généralement limé des deux côtés de la soudure.

[31] Dans le procédé CW, la bande est chauffée dans un four à gaz. La bande chauffée est ensuite passée dans une série de rouleaux afin qu’elle prenne une forme tubulaire, les bords étant aboutés ensemble sous pression afin de former une soudure.

[32] Les TSAC peuvent aussi être produits en utilisant un procédé étireur-réducteur à chaud. Les chemises de tube sont d’abord produites selon le procédé ERW, puis elles sont chauffées et passent par un laminoir étireur-réducteur. Ce procédé réduit le diamètre extérieur du tube et peut être utilisé pour changer l’épaisseur des parois du tube.

[33] Nova fabrique les TSAC au moyen du procédé ERW.

[34] Une fois le tube de base formé au moyen de ces procédés, il est coupé à longueur, redressé et testé. Les extrémités du tube peuvent être ouvrées, notamment éboutées, aplanies et allégées, filtrées, couplées, roulées et/ou taillées. Les finitions, comme la laque ou le zinc (galvanisation), peuvent être appliquées à la surface du tube selon l’utilisation prévue. Les tubes peuvent aussi être marqués au pochoir et regroupés.

[35] La dimension d’un tube est généralement précisée à l’aide de deux valeurs : le diamètre nominal (« NPS ») et le calibre. Pour un tube dont la gamme de diamètres comprend les marchandises en cause, le NPS correspond à peu près au diamètre intérieur du tube alors que le calibre correspond à l’épaisseur de la paroi. Pour un NPS donné, l’épaisseur de la paroi augmente en même temps que le numéro du calibre. Par exemple, un tube avec un NPS de 1 po (« NPS 1 ») et fabriqué selon les exigences de la norme ASTM A53, calibre 40, aura un diamètre extérieur de 1,315 po (3,34 cm) et une épaisseur de paroi de 0,133 po (0,338 cm) alors que le même tube correspondant à la norme ASTM A53, calibre 80, aura un diamètre extérieur de 1,315 po (3,34 cm) et une épaisseur de paroi de 0,179 po (0,455 cm). Les calibres les plus courants des TSAC sont 10, 40 et 80.

Utilisation du produitNote de bas de page 4

[36] Les TSAC peuvent servir entre autres à la distribution de la vapeur, de l’eau, du gaz naturel, de l’air et d’autres liquides et gaz à basse pression dans des systèmes de plomberie et de chauffage, des conditionneurs d’air, des réseaux d’irrigation par aspersion et d’autres systèmes connexes. Les TSAC peuvent aussi servir de support structurel et dans certains systèmes mécaniques, notamment pour les tubes de clôtures, et de produit intermédiaire pour la protection des fils électriques, comme les chemises de conduit.

Classement des importations

[37] Depuis le 1er janvier 2017, l’annexe du Tarif des douanes ayant été révisée, les marchandises en cause vont sous les numéros de classement tarifaire suivants :

  1. 7306.30.00.10
  2. 7306.30.00.20
  3. 7306.30.00.30

[38] Les numéros ci-dessus sont fournis à titre purement informatif. Ils n’incluent pas toutes les marchandises en cause, et inversement, ils incluent des marchandises non en cause. Seule la définition du produit fait autorité au sujet des marchandises en cause.

Marchandises similaires et catégorie unique

[39] Le paragraphe 2(1) de la LMSI définit les « marchandises similaires » en relation avec toutes les autres marchandises, comme des marchandises en tous points identiques aux marchandises en cause ou, à défaut, les marchandises dont l’utilisation et les autres caractéristiques sont très proches de celles des marchandises en cause.

[40] En se penchant sur la question des marchandises similaires, le TCCE tient habituellement compte de divers facteurs, notamment les caractéristiques matérielles des marchandises, leurs caractéristiques de marché, et la question de savoir si les marchandises nationales répondent aux mêmes besoins des clients que les marchandises en cause.

[41] Après avoir étudié les questions d’utilisation, les caractéristiques matérielles et tous les autres facteurs pertinents, l’ASFC a démarré son enquête sur l’hypothèse que les TSAC produits au pays sont des marchandises similaires aux marchandises en cause. De plus, elle est d’avis que les marchandises en cause et les marchandises similaires constituent une catégorie unique de marchandises.

[42] En l’espèce, le TCCE s’est encore penché sur la question des marchandises similaires et des catégories de marchandises dans son enquête préliminaire de dommage. Le 3 octobre 2018, il a diffusé l’Exposé des motifs de son enquête préliminaire de dommage dans lequel il a conclu que les TSAC produits au pays sont des marchandises similaires aux marchandises en cause et constituent une catégorie unique de marchandisesNote de bas de page 5.

Branche de production nationale

[43] La plaignante et les autres producteurs qui appuient la plainte assurent toute la production canadienne connue de marchandises similaires.

Importations au Canada

[44] À la phase préliminaire de l’enquête, l’ASFC a précisé son estimation du volume et de la valeur des importations à la lumière de ses documents de déclaration ainsi que des réponses des exportateurs et importateurs.

[45] Le tableau ci-dessous représente l’estimation, par l’ASFC, des importations de TSAC aux fins de la décision provisoire :

Importations de TSAC
(en pourcentage du volume total)
Pays d’origine/ exportation PVE (du 1er juillet 2017 au 30 juin 2018)
Pakistan 5,4 %
Philippines 12,9 %
Turquie 15,9 %
Vietnam 14,0 %
Tous les autres pays 51,8 %
Total des importations 100,0 %

Observations

[46] À la phase préliminaire de l’enquête, l’avocat de la plaignante a formulé des observations concernant les allégations de celle-ci relatives à l’existence d’une situation particulière du marché en TurquieNote de bas de page 6. Des observations ont aussi été formulées au sujet de diverses pièces au dossier administratif, notamment certaines réponses aux DDRNote de bas de page 7. Elles portent sur le caractère exhaustif des renseignements fournis, la participation du gouvernement dans certaines entreprises ou certains secteurs, les liens entre certaines parties, l’identité de l’exportateur, le classement de marchandises similaires, la situation particulière présumée du marché en Turquie et l’enquête en vertu de l’article 20 sur le Vietnam. L’avocat de la plaignante a indiqué que des renseignements sur les coûts de production et certaines réductions étaient inexacts ou incomplets et que d’autres renseignements dans les réponses aux DDR étaient absents ou n’étaient pas clairs.

[47] L’ASFC a également reçu des observations d’Erbosan Erciya Boru Sanayli ve Ticaret A.S. (Erbosan), un exportateur des marchandises en cause en TurquieNote de bas de page 8. Erbosan a soutenu que l’ASFC devrait déterminer qu’aucune « situation particulière du marché » n’existe à l’égard des marchandises qu’elle produit et vend, et elle a présenté des arguments et des renseignements à l’appui de son allégation.

[48] L’ASFC a pris note des arguments et des éléments de preuve présentés dans ces observations, et en tiendra compte au moment de vérifier et d’analyser les renseignements aux fins de la décision définitive.

Déroulement de l'enquête

[49] Pour son enquête en dumping, l’ASFC a adressé à tous les exportateurs, producteurs, vendeurs et importateurs, connus et potentiels, des questionnaires sur leurs expéditions de TSAC dédouanées au Canada dans la PVE.

[50] Pour son enquête en vertu de l’article 20, l’ASFC s’est adressée au gouvernement du Vietnam ainsi qu’à tous les exportateurs et producteurs connus et potentiels de TSAC dans ce pays. Pour calculer les valeurs normales selon l’alinéa 20(1)c) de la LMSI, elle n’a pas eu besoin de rien demander à des exportateurs de pays non visés, puisqu’il y avait déjà de bons « pays de remplacement » parmi les pays visés. Par ailleurs, elle a interrogé les importateurs canadiens sur leurs reventes au pays de marchandises similaires importées de pays tiers, afin de pouvoir calculer les valeurs normales selon l’alinéa 20(1)d) de la même loi.

[51] L’ASFC a aussi prévenu les gouvernements et les producteurs/exportateurs que le défaut de suivre toutes les instructions de la DDR, de fournir toute l’information et les documents requis, y compris les versions non confidentielles, et notamment lors des visites sur place, ou encore de permettre la vérification de tout renseignement, les exposerait à ce que leurs marge de dumping et droits antidumping soient déterminés d’après les faits connus – et donc peut-être à leur désavantageNote de bas de page 9.

[52] Plusieurs parties ont demandé un délai supplémentaire pour répondre. L’ASFC a étudié chaque demande, mais n’a accordé aucune d’entre elles, puisque des circonstances imprévues ou un fardeau inhabituel ne justifiaient pas une prolongation. À chaque refus, elle a lancé l’avertissement que les exposés en retard ne seraient pas nécessairement pris en compte à la phase préliminaire de l’enquête.

[53] Après examen des réponses aux DDR initiales, l’ASFC a envoyé des DDR supplémentaires (DDRS) à plusieurs parties ayant répondu pour obtenir des éclaircissements et des compléments de réponses, au besoin.

[54] L’ASFC a basé sa décision provisoire sur ce qu’elle savait au moment de la prendre. À la phase finale de l’enquête, il se pourrait qu’elle reçoive des renseignements supplémentaires et qu’elle choisisse des exportateurs ayant répondu pour des vérifications sur place, dont les résultats seront intégrés à sa décision définitive, qu’elle doit rendre d’ici le 16 janvier 2019.

Enquête en dumping

[55] Ci-dessous, les résultats provisoires de l’enquête en dumping sur les TSAC originaires ou exportés du Pakistan, des Philippines, de la Turquie et du Vietnam.

Valeurs normales

[56] Les valeurs normales sont généralement estimées, soit selon l’article 15 de la LMSI d’après le prix de vente intérieur des marchandises similaires dans le pays exportateur, soit selon l’alinéa 19b) de la même loi comme étant la somme du coût de production, d’un montant raisonnable pour les frais, notamment les frais administratifs et les frais de vente, et d’un montant raisonnable pour les bénéfices.

[57] Par contre, quand elle juge que, dans des pays désignés comme le Vietnam, le gouvernement fixe les prix intérieurs en majeure partie, et qu’elle a des motifs de croire que ces prix seraient différents dans un marché concurrentiel, l’ASFC estime généralement les valeurs normales selon l’article 20 de la LMSI, soit à partir du coût ou du prix de vente des marchandises similaires dans un pays de remplacement.

Prix à l'exportation

[58] Le prix à l’exportation des marchandises vendues à des importateurs au Canada s’estime généralement selon l’article 24 de la LMSI, comme étant la valeur la plus basse entre le prix de vente rectifié de l’exportateur et le prix d’achat rectifié de l’importateur. Ces prix sont rectifiés au besoin par déduction des frais, des droits et des taxes découlant de l’exportation des marchandises, conformément aux sous-alinéas 24a)(i) à (iii) de la LMSI.

[59] Advenant une vente entre personnes associées, ou si une relation ou un arrangement compensatoire existe, le prix à l’exportation s’estime d’après le prix auquel l’importateur revend les marchandises à des acheteurs canadiens sans lien particulier avec lui, moins tous les coûts de préparation, d’expédition et d’exportation qu’on n’aurait pas eu à engager pour vendre dans le pays exportateur même, tous les frais engagés pour la revente (droits et taxes compris) ou rattachés à l’assemblage des marchandises au Canada, et un montant représentatif du bénéfice moyen de l’industrie au Canada [LMSI, alinéas 25(1)c) et d)].

Marge de dumping

[60] La marge estimative de dumping par exportateur est égale à l’excédent de la valeur normale estimative totale sur le prix à l’exportation estimatif total des marchandises, exprimé en pourcentage de celui-ci. Toutes les marchandises en cause importées au Canada dans la PVE entrent dans ce calcul. Et si la valeur normale estimative totale ne dépasse pas le prix à l’exportation estimatif total, la marge estimative de dumping est nulle (0 %).

Résultats provisoires de l'enquête en dumping

[61] L’ASFC a reçu une réponse essentiellement complète à la DDR en dumping de la part d’un exportateur au PakistanNote de bas de page 10. [62] Elle a reçu une réponse essentiellement complète à la DDR en dumping de la part d’un exportateur aux PhilippinesNote de bas de page 11.

[63] Elle a reçu une réponse essentiellement complète à la DDR en dumping de la part de trois exportateurs en TurquieNote de bas de page 12.

[64] Enfin, elle a reçu une réponse essentiellement complète à la DDR en dumping de la part de trois exportateurs des marchandises en cause originaires du VietnamNote de bas de page 13. Deux de ces exportateurs sont établis au Vietnam et ont aussi fait une réponse essentiellement complète à la DDR en vertu du l’article 20Note de bas de page 14. L’ASFC n’a pas adressé de DDR en vertu de l’article 20 à l’exportateur des marchandises en cause établi aux États-Unis.

Pakistan

International Industries Limited

[65] International Industries Limited (IIL) est un fabricant et exportateur des marchandises en cause établi au Pakistan. IIL, une société cotée en bourse, produit une variété de tubes en acier. Toutes les marchandises en cause expédiées au Canada ont été produites dans son usine 1, à Karachi, où se trouve également son siège social.

[66] IIL a fourni une réponse essentiellement complète à la DDR en dumping de l’ASFC, y compris une base de données sur les ventes intérieures de TSAC dans la PARNote de bas de page 15. Cependant, les ventes de marchandises identiques ou similaires aux marchandises en cause exportées au Canada étaient insuffisantes. Par conséquent, il n’est pas possible d’estimer les valeurs normales selon la méthode prévue à l’article 15 de la LMSI à partir des ventes intérieures de marchandises similaires.

[67] Les valeurs normales ont été estimées selon la méthode prévue à l’alinéa 19b) de la LMSI, comme étant la somme du coût de production, d’un montant raisonnable pour les frais, notamment les frais administratifs et les frais de vente, et d’un montant raisonnable pour les bénéfices. Le coût de production a été estimé selon l’alinéa 11(1)a) du Règlement sur les mesures spéciales d’importation (RMSI), d’après les données non vérifiées sur les coûts d’IIL pour les marchandises en cause expédiées au Canada. Le montant pour les bénéfices a été estimé selon le sous-alinéa 11(1)b)(ii) du RMSI, d’après les ventes intérieures de TSAC d’IIL dans la PAR qui relevaient de la même catégorie générale que celle des marchandises en cause vendues aux importateurs au Canada.

[68] Pour les marchandises en cause exportées au Canada par IIL dans la PVE, les prix à l’exportation ont été estimés selon la méthode prévue à l’article 24 de la LMSI, comme étant la valeur la plus basse entre le prix de vente de l’exportateur et le prix d’achat de l’importateur, rectifiée par déduction des frais entraînés par la préparation des marchandises en vue de leur expédition vers le Canada et des autres frais découlant de l’exportation ou de l’expédition.

[69] Aux fins de la décision provisoire, la comparaison de la valeur normale estimative totale avec le prix à l’exportation estimatif total donne pour IIL une marge estimative de dumping qui s’élève à 10,1 % du prix à l’exportation. L’ASFC va poursuivre son travail de collecte et de vérification de données à la phase finale de l’enquête.

Tous les autres exportateurs – Pakistan

[70] Pour les exportateurs des marchandises en cause originaires ou exportées du Pakistan qui n’ont pas fait de réponse complète à la DDR en dumping ou qui n’ont pas fourni suffisamment de renseignements, l’ASFC a estimé les valeurs normales et les prix à l’exportation d’après les faits connus.

[71] Pour déterminer quelles seraient les meilleures méthodes à cette fin, elle a examiné toute l’information au dossier administratif, y compris la plainte déposée par la branche de production nationale, ses propres estimations au début de l’enquête, les renseignements soumis par les exportateurs de TSAC en provenance des pays visés et les documents des douanes.

[72] L’ASFC a jugé que les valeurs normales et les prix à l’exportation estimés pour les exportateurs ayant fait des réponses essentiellement complètes aux fins de la décision provisoire constituaient une meilleure assise que la plainte ou les estimations faites à l’ouverture, puisque contrairement à celles-ci elles reflétaient les pratiques commerciales véritables des exportateurs dans la PVE. Ainsi, l’ASFC a commencé par se demander si les renseignements fournis par IIL, l’exportateur pakistanais ayant fait une réponse essentiellement complète à la DDR en dumping, constituaient une bonne base pour attribuer une marge de dumping à tous les autres exportateurs du Pakistan.

[73] L’ASFC a donc comparé la valeur normale estimative et le prix à l’exportation estimatif de chaque transaction pour cet exportateur et a jugé que le plus fort excédent observé de la valeur normale estimative sur le prix à l’exportation estimatif (en pourcentage de celui-ci) serait une bonne assise pour estimer les valeurs normales. Basée sur l’information au dossier concernant les marchandises originaires du Pakistan, cette méthode limite pour les exportateurs l’intérêt de ne pas collaborer pleinement à l’enquête en dumping.

[74] Ainsi, d’après les faits connus, pour les exportateurs n’ayant pas fait de réponse complète et fiable à la DDR en dumping, la valeur normale des marchandises en cause originaires ou exportées du Pakistan a été fixée comme étant le plus fort excédent de la valeur normale sur le prix à l’exportation jamais observé pour une transaction d’IIL dans la PVE; à savoir, 58,0 % du prix à l’exportation. L’ASFC a examiné les transactions pour s’assurer d’en exclure toutes anomalies (très petits volumes, très faible valeur, effets de saison ou autres facteurs opérationnels), mais il n’y avait pas d’anomalies en fin de compte.

[75] L’ASFC a décidé que ses propres documents de déclaration douanière étaient la source la plus complète pour déterminer le prix à l’exportation des marchandises, puisqu’ils contenaient des données d’importation réelles.

[76] Selon les méthodes susmentionnées, aux fins de la décision provisoire, la marge estimative de dumping pour tous les autres exportateurs des marchandises en cause en provenance du Pakistan s’élève à 58,0 % du prix à l’exportation.

Philippines

HLD Clark Steel Pipe Co., Inc.

[77] HLD Clark Steel Pipe Co., Inc. (HLD Clark) est un fabricant et exportateur des marchandises en cause établi aux Philippines. HLD Clark, fabricant privé de divers tubes en acier, a une usine de production dans la Zone franche Clark à Angeles City, Philippines, où toutes les marchandises en cause expédiées au Canada ont été produites. Le siège social de l’entreprise se trouve aussi dans la Zone franche Clark.

[78] HLD Clark a fait une réponse essentiellement complète à la DDR en dumping de l’ASFC; cependant, elle n’a pas enregistré de ventes intérieures de TSAC dans la PAPNote de bas de page 16. Par conséquent, il n’est pas possible d’estimer les valeurs normales selon la méthode prévue à l’article 15 de la LMSI à partir des ventes intérieures de marchandises similaires.

[79] Les valeurs normales ont été estimées selon la méthode prévue à l’alinéa 19b) de la LMSI, comme étant la somme du coût de production, d’un montant raisonnable pour les frais, notamment les frais administratifs et les frais de vente, et d’un montant raisonnable pour les bénéfices. Le coût de production a été estimé selon l’alinéa 11(1)a) du RMSI, d’après les données non vérifiées sur les coûts de HLD Clark pour les marchandises en cause expédiées au Canada. Puisque l’ASFC ne pouvait pas estimer de montant pour les bénéfices selon l’alinéa 11(1)b), faute de ventes intérieures ou d’autres renseignements, elle s’est fiée aux ventes de TSAC au Pakistan et en Turquie qui relevaient de la même catégorie générale que celle des marchandises en cause vendues aux importateurs au Canada dans la PAR.

[80] Pour les marchandises en cause exportées au Canada par HLD Clark dans la PVE, les prix à l’exportation ont été estimés selon la méthode prévue à l’article 24 de la LMSI, comme étant la valeur la plus basse entre le prix de vente de l’exportateur et le prix d’achat de l’importateur, rectifiée par déduction des frais entraînés par la préparation des marchandises en vue de leur expédition vers le Canada et des autres frais découlant de l’exportation ou de l’expédition.

[81] Aux fins de la décision provisoire, la comparaison de la valeur normale estimative totale avec le prix à l’exportation estimatif total donne pour HLD Clark une marge estimative de dumping qui s’élève à 3,8 % du prix à l’exportation. L’ASFC va poursuivre son travail de collecte et de vérification de données à la phase finale de l’enquête.

Tous les autres exportateurs – The Philippines

[82] Pour les exportateurs des marchandises en cause originaires ou exportées des Philippines qui n’ont pas fait de réponse complète à la DDR en dumping ou qui n’ont pas fourni suffisamment de renseignements, l’ASFC a estimé les valeurs normales et les prix à l’exportation d’après les faits connus.

[83] Pour déterminer quelles seraient les meilleures méthodes à cette fin, elle a examiné toute l’information au dossier administratif, y compris la plainte déposée par la branche de production nationale, ses propres estimations au début de l’enquête, les renseignements soumis par les exportateurs de TSAC en provenance des pays visés et les documents des douanes.

[84] L’ASFC a jugé que les valeurs normales et les prix à l’exportation estimés pour les exportateurs ayant fait des réponses essentiellement complètes aux fins de la décision provisoire constituaient une meilleure assise que la plainte ou les estimations faites à l’ouverture, puisque contrairement à celles-ci elles reflétaient les pratiques commerciales véritables des exportateurs dans la PVE. Ainsi, l’ASFC a commencé par se demander si les renseignements fournis par HLD Clark, l’exportateur philippin ayant fait une réponse essentiellement complète à la DDR en dumping, constituaient une bonne base pour attribuer une marge de dumping à tous les autres exportateurs aux Philippines.

[85] L’ASFC a donc comparé la valeur normale estimative et le prix à l’exportation estimatif de chaque transaction pour cet exportateur et a jugé que le plus fort excédent observé de la valeur normale estimative sur le prix à l’exportation estimatif (en pourcentage de celui-ci) serait une bonne assise pour estimer les valeurs normales. Basée sur l’information au dossier concernant les marchandises originaires des Philippines, cette méthode limite pour les exportateurs l’intérêt de ne pas collaborer pleinement à l’enquête en dumping.

[86] Ainsi, d’après les faits connus, pour les exportateurs n’ayant pas fait de réponse complète et fiable à la DDR en dumping, la valeur normale des marchandises en cause originaires ou exportées des Philippines a été fixée comme étant le plus fort excédent de la valeur normale sur le prix à l’exportation jamais observé pour une transaction de HLD Clark dans la PVE; à savoir, 30,1 % du prix à l’exportation. L’ASFC a examiné les transactions pour s’assurer d’en exclure toutes anomalies (très petits volumes, très faible valeur, effets de saison ou autres facteurs opérationnels), mais il n’y avait pas d’anomalies en fin de compte.

[87] L’ASFC a décidé que ses propres documents de déclaration douanière étaient la source la plus complète pour déterminer le prix à l’exportation des marchandises, puisqu’ils contenaient des données d’importation réelles.

[88] Selon les méthodes susmentionnées, aux fins de la décision provisoire, la marge estimative de dumping pour tous les autres exportateurs des marchandises en cause en provenance des Philippines s’élève à 30,1 % du prix à l’exportation.

Turquie

Situation particulière du marché

[89] Des modifications à la LMSI et au RMSI, entrées en vigueur le 26 avril 2018, y compris des dispositions relatives aux situations particulières du marché, font en sorte que l’ASFC peut désormais ne pas tenir compte de certaines ventes quand elle détermine les valeurs normales dans une enquête en dumping.

[90] La plainte contenait des allégations relatives à l’existence d’une « situation particulière du marché » sur le marché des TSAC en Turquie, et à l’absence de ventes intérieures appuyant une comparaison appropriée avec les ventes faites aux importateurs au Canada. En particulier, la plaignante a fait valoir que les producteurs turcs sont incapables de fixer des prix des TSAC couvrant leurs coûts de production, et que les valeurs normales ne devraient donc pas être estimées selon l’article 15 de la LMSI. De plus, elle allègue que l’écart de prix entre les bobines laminées à chaud et les TSAC en Turquie ne suffit pas pour couvrir la transformation des bobines en TSAC, et que cet écart constitue une « situation particulière du marché » en Turquie au sens de l’alinéa 16(2)c) de la LMSI. Enfin, elle allègue que la dépréciation de la livre turque par le gouvernement de la Turquie entraîne une distorsion des prix sur le marché intérieur des TSAC. Elle suggère de mener une enquête approfondie pour déterminer si la dépréciation de la livre turque a eu une incidence considérable sur les coûts de production et les prix de vente des producteurs turcsNote de bas de page 17.

[91] Après l’ouverture de l’enquête, la plaignante a formulé d’autres observations concernant l’existence d’une « situation particulière du marché » sur le marché des TSAC en Turquie. Ces observations reprenaient certains des points exposés dans la plainte et contenaient d’autres documents à l’appuiNote de bas de page 18.

[92] L’ASFC a aussi reçu des observations d’Erbosan, un exportateur des marchandises en cause en TurquieNote de bas de page 19. Erbosan soutient que l’ASFC devrait déterminer qu’une « situation particulière du marché » n’existe pas sur le marché des TSAC en Turquie et elle a présenté des arguments et des renseignements en ce sens.

[93] L’ASFC a adressé des demandes de renseignements supplémentaires (DDRS) à tous les exportateurs/producteurs des marchandises en cause en Turquie qui ont répondu à sa DDR en dumping. Ces DDRS comprenaient des questions visant à recueillir des renseignements supplémentaires sur la participation du gouvernement de la Turquie dans le marché intérieur des TSAC et sur l’achat de matières premières auprès d’entreprises d’État, entre autres. Des réponses à la DDRS ont été reçues de la part d’un producteur, de deux producteurs/exportateurs et d’un vendeur/exportateur des marchandises en cause. L’ASFC examine ces réponses et pourrait demander d’autres renseignements à la phase finale de l’enquête.

[94] L’ASFC a aussi adressé une DDR au gouvernement turc afin de déterminer toute incidence possible de ce dernier sur la production et/ou la vente de TSAC en Turquie. Le gouvernement turc a répondu à la DDR dans le délai fixé.

[95] L’ASFC a étudié les observations présentées par la plaignante et Erbosan ainsi que tous les autres renseignements au dossier administratif. Aux fins de la décision provisoire, l’ASFC n’a pas jugé qu’il existe une « situation particulière du marché » sur le marché des TSAC en Turquie qui influe sur les ventes intérieures et empêcherait une comparaison appropriée avec les ventes faites aux importateurs au Canada.

[96] L’ASFC va continuer de recueillir des renseignements auprès des parties intéressées et d’autres sources pertinentes aux fins de la décision définitive.

Borusan Mannesmann Boru Sanayi ve Ticaret A.Ş.

[97] Borusan Mannesmann Boru Sanayi ve Ticaret A.Ş. (Borusan), une société cotée en bourse, a été fondée en 1958. Borusan, un fabricant de divers produits de tubes en acier, a des installations de production en Turquie, en Italie et aux États-Unis. Toutes les marchandises en cause expédiées au Canada l’ont été depuis son usine de Gemlik en Turquie. Son siège social est à Istanbul.

[98] Borusan a fourni une réponse essentiellement complète à la DDR en dumping, y compris une base de données sur les ventes intérieures de TSACNote de bas de page 20. Cependant, les ventes de marchandises identiques ou similaires aux marchandises en cause exportées au Canada étaient insuffisantes. Par conséquent, il n’est pas possible d’estimer les valeurs normales selon la méthode prévue à l’article 15 de la LMSI à partir des ventes intérieures de marchandises similaires.

[99] Les valeurs normales ont été estimées selon la méthode prévue à l’alinéa 19b) de la LMSI, comme étant la somme du coût de production, d’un montant raisonnable pour les frais, notamment les frais administratifs et les frais de vente, et d’un montant raisonnable pour les bénéfices. Le coût de production a été estimé selon l’alinéa 11(1)a) du RMSI, d’après les données non vérifiées sur les coûts de Borusan pour les marchandises en cause expédiées au Canada. Le montant pour les bénéfices a été estimé selon le sous-alinéa 11(1)b)(ii) du RMSI, d’après les ventes intérieures de TSAC de Borusan dans la PAR qui relevaient de la même catégorie générale que celle des marchandises en cause vendues aux importateurs au Canada.

[100] Pour les marchandises en cause exportées au Canada par Borusan dans la PVE, les prix à l’exportation ont été estimés selon la méthode prévue à l’article 24 de la LMSI, comme étant la valeur la plus basse entre le prix de vente de l’exportateur et le prix d’achat de l’importateur, rectifiée par déduction des frais entraînés par la préparation des marchandises en vue de leur expédition vers le Canada et des autres frais découlant de l’exportation ou de l’expédition.

[101] La comparaison de la valeur normale estimative totale avec le prix à l’exportation estimatif total donne pour Borusan une marge estimative de dumping qui s’élève à 4,9 % du prix à l’exportation. L’ASFC va poursuivre son travail de collecte et de vérification de données à la phase finale de l’enquête.

Erbosan

[102] Erbosan est un fabricant et exportateur de TSAC établi en Turquie. Fondée comme société par actions en 1974, Erbosan est une société ouverte cotée à la bourse d’Istanbul depuis 1995.

[103] Erbosan, qui fabrique divers tubes en acier, compte deux usines de production et une usine de recyclage à Kayseri en Turquie. L’une des usines de production se trouve à Anbar Mahallesi, Kayseri et l’autre, dans la zone franche à Kayseri. Cette dernière produit exclusivement des tubes structuraux laminés à froid (marchandises non en cause).

[104] L’usine de recyclage produit de l’oxyde de zinc à partir des résidus de la production sidérurgique dans des fours électriques à arc. Toutes les marchandises en cause expédiées au Canada ont été produites dans l’usine à Anbar Mahallesi, Kayseri. Le siège social de l’entreprise est aussi à Anbar Mahallesi.

[105] Erbosan a fourni une réponse essentiellement complète à la DDR en dumping de l’ASFC, y compris une base de données sur les ventes intérieures de TSAC dans la PARNote de bas de page 21. Cependant, les ventes de marchandises identiques ou similaires aux marchandises en cause exportées au Canada étaient insuffisantes. Par conséquent, il n’est pas possible d’estimer les valeurs normales selon la méthode prévue à l’article 15 de la LMSI à partir des ventes intérieures de marchandises similaires.

[106] Les valeurs normales ont été estimées selon la méthode prévue à l’alinéa 19b) de la LMSI, comme étant la somme du coût de production, d’un montant raisonnable pour les frais, notamment les frais administratifs et les frais de vente, et d’un montant raisonnable pour les bénéfices. Le coût de production a été estimé selon l’alinéa 11(1)a) du RMSI, d’après les données non vérifiées sur les coûts d’Erbosan pour les marchandises en cause expédiées au Canada. Le montant pour les bénéfices a été estimé selon le sous-alinéa 11(1)b)(ii) du RMSI, d’après les ventes intérieures de TSAC d’Erbosan dans la PAR qui relevaient de la même catégorie générale que celle des marchandises en cause vendues aux importateurs au Canada.

[107] Pour les marchandises en cause exportées au Canada par Erbosan dans la PVE, les prix à l’exportation ont été estimés selon la méthode prévue à l’article 24 de la LMSI, comme étant la valeur la plus basse entre le prix de vente de l’exportateur et le prix d’achat de l’importateur, rectifiée par déduction des frais entraînés par la préparation des marchandises en vue de leur expédition vers le Canada et des autres frais découlant de l’exportation ou de l’expédition.

[108] Aux fins de la décision provisoire, la comparaison de la valeur normale estimative totale avec le prix à l’exportation estimatif total donne pour Erbosan une marge estimative de dumping qui s’élève à 3,0 % du prix à l’exportation. L’ASFC va poursuivre son travail de collecte et de vérification de données à la phase finale de l’enquête.

IRIS Metalurji ve Muhendislik Pazarlama Sanayi ve Ticaret Limited Sirketi

[109] IRIS Metalurji ve Muhendislik Pazarlama Sanayi ve Ticaret Limited Sirketi (Iris) est une société à responsabilité limitée établie en Turquie. Aucune autre société n’y est affiliée. L’entreprise compte un directeur et un représentant aux ventes au Canada. Son adresse légale est à Bursa, à 150 km au sud d’Istanbul en Turquie. Iris n’a pas d’installations de production; elle achète plutôt des tubes en acier à des producteurs en Turquie pour les vendre à l’étranger.

[110] Iris a fait une réponse essentiellement complète à la DDR en dumping de l’ASFC; cependant, elle n’a pas enregistré de ventes intérieures de TSAC dans la PARNote de bas de page 22. Par conséquent, il n’est pas possible d’estimer les valeurs normales selon la méthode prévue à l’article 15 de la LMSI à partir des ventes intérieures de marchandises similaires.

[111] Les valeurs normales ont été estimées selon la méthode prévue à l’alinéa 19b) de la LMSI, comme étant la somme du coût de production, d’un montant raisonnable pour les frais, notamment les frais administratifs et les frais de vente, et d’un montant raisonnable pour les bénéfices. Le coût de production a été estimé selon l’alinéa 11(1)a) du RMSI, d’après les données non vérifiées sur les coûts du producteur des marchandises (c.-à-d. le fournisseur d’Iris) en Turquie. Un montant pour les frais, notamment les frais administratifs et les frais de vente, a été estimé pour le producteur et l’exportateur, d’après les renseignements financiers fournis par chacun. Le montant pour les bénéfices a été estimé selon le sous-alinéa 11(1)b)(iv) du RMSI, d’après les ventes de marchandises de même catégorie générale réalisées par les producteurs en Turquie dans la PAR.

[112] Les prix à l’exportation sont normalement estimés selon la méthode prévue à l’article 24 de la LMSI à partir du prix de vente de l’exportateur, moins tous les coûts, frais et dépenses découlant de l’exportation des marchandises. Cependant, pour les marchandises en cause exportées au Canada par Iris et dédouanées dans la PVE, les prix à l’exportation n’ont pas pu être estimés selon cette méthode, puisqu’il n’y a pas eu de ventes réelles lorsque les marchandises ont été importées par Iris. En effet, celle-ci a agi en tant qu’importateur pour les marchandises en cause vendues au Canada. À la lumière des données actuelles, l’ASFC estimera plutôt les prix à l’exportation à partir des prix d’achat d’Iris (auprès de son fournisseur en Turquie).

[113] Aux fins de la décision provisoire, la comparaison de la valeur normale estimative totale avec le prix à l’exportation estimatif total donne pour Iris une marge estimative de dumping qui s’élève à 49,0 % du prix à l’exportation. L’ASFC va poursuivre son travail de collecte et de vérification de données auprès d’Iris et de son fournisseur en Turquie à la phase finale de l’enquête.

Tous les autres exportateurs – Turquie

[114] Pour les exportateurs des marchandises en cause originaires ou exportées de la Turquie qui n’ont pas fait de réponse complète à la DDR en dumping ou qui n’ont pas fourni suffisamment de renseignements, l’ASFC a estimé les valeurs normales et les prix à l’exportation d’après les faits connus.

[115] Pour déterminer quelles seraient les meilleures méthodes à cette fin, elle a examiné toute l’information au dossier administratif, y compris la plainte déposée par la branche de production nationale, ses propres estimations au début de l’enquête, les renseignements soumis par les exportateurs de TSAC en provenance des pays visés et les documents des douanes.

[116] L’ASFC a jugé que les valeurs normales et les prix à l’exportation estimés pour les exportateurs ayant fait des réponses essentiellement complètes aux fins de la décision provisoire constituaient une meilleure assise que la plainte ou les estimations faites à l’ouverture, puisque contrairement à celles-ci elles reflétaient les pratiques commerciales véritables des exportateurs dans la PVE. Ainsi, l’ASFC a commencé par se demander si les renseignements fournis par les exportateurs turcs ayant fait une réponse essentiellement complète à la DDR en dumping constituaient une bonne base pour attribuer une marge de dumping à tous les autres exportateurs en Turquie.

[117] Les réponses de Borusan, d’Erbosan et d’Iris étaient essentiellement complètes aux fins de la décision provisoire. L’ASFC a donc comparé la valeur normale estimative et le prix à l’exportation estimatif de chaque transaction pour ces exportateurs et a jugé que le plus fort excédent observé de la valeur normale estimative sur le prix à l’exportation estimatif (en pourcentage de celui-ci) serait une bonne assise pour estimer les valeurs normales. Basée sur l’information au dossier concernant les marchandises originaires de la Turquie, cette méthode limite pour les exportateurs l’intérêt de ne pas collaborer pleinement à l’enquête en dumping.

[118] Ainsi, d’après les faits connus, pour les exportateurs n’ayant pas fait de réponse complète et fiable à la DDR en dumping, la valeur normale des marchandises en cause originaires ou exportées de la Turquie a été fixée comme étant le plus fort excédent de la valeur normale sur le prix à l’exportation jamais observé pour une transaction des exportateurs ayant répondu dans la PVE; à savoir, 95,0 % du prix à l’exportation. L’ASFC a examiné les transactions pour s’assurer d’en exclure toutes anomalies (très petits volumes, très faible valeur, effets de saison ou autres facteurs opérationnels), mais il n’y avait pas d’anomalies en fin de compte.

[119] L’ASFC a décidé que ses propres documents de déclaration douanière étaient la source la plus complète pour déterminer le prix à l’exportation des marchandises, puisqu’ils contenaient des données d’importation réelles.

[120] Selon les méthodes susmentionnées, aux fins de la décision provisoire, la marge estimative de dumping pour tous les autres exportateurs des marchandises en cause en provenance de la Turquie s’élève à 95,0 % du prix à l’exportation.

Vietnam

Enquête en vertu de l’article 20

[121] L’article 20 est une disposition de la LMSI qui peut servir à établir la valeur normale des marchandises dans une enquête en dumping quand certaines conditions sont réunies sur le marché intérieur du pays exportateur. Dans le cas d’un pays désigné au titre de l’alinéa 20(1)a) de la LMSI, l’ASFC applique la disposition si elle juge que le gouvernement de ce pays fixe, en majeure partie, les prix intérieurs, et qu’il y a un motif suffisant de croire que les prix en question seraient différents dans un marché où jouerait la concurrenceNote de bas de page 23.

[122] Les dispositions de l’article 20 s’appliquent par secteur et non par pays. L’ASFC part de l’hypothèse que l’article 20 de la LMSI ne s’applique pas au secteur visé par l’enquête en l’absence de renseignements suffisants prouvant le contraire. Le cas échéant, elle pourra exprimer un avis comme quoi les conditions décrites à l’alinéa 20(1)a) de la LMSI existent dans le secteur à l’étude.

[123] L’ASFC doit examiner si le gouvernement de ce pays fixe, en majeure partie, les prix intérieurs. En plus d’examiner si le gouvernement fixe les prix intérieurs en majeure partie, et quelles sont les conséquences, le cas échéant, l’ASFC doit se demander si l’information au dossier suffit à lui faire croire que ces prix seraient essentiellement différents dans un marché où jouerait la concurrence.

[124] La plaignante prétend que les conditions décrites à l’article 20 existent dans le secteur vietnamien des tubes soudés en acier au carbone, y compris les TSAC. Autrement dit, elle affirme que ce secteur n’est pas soumis au jeu de la concurrence, et donc que les prix des tubes soudés en acier au carbone n’y sont pas fiables aux fins de détermination des valeurs normales.

[125] La plaignante a soumis des preuves à l’appui de ses allégations concernant le secteur des tubes soudés en acier au carbone. Elle a cité des politiques précises du gouvernement du Vietnam, comme le plan directeur pour l’acier de 2007-2015, le plan directeur pour l’acier de 2015-2025 et la stratégie de développement industriel jusqu’en 2025. Elle a fourni des preuves de la stabilisation des prix et de la nationalisation de l’industrie sidérurgique et du secteur des tubes soudés en acier au carbone. Elle a aussi fourni de l’information sur le subventionnement de l’industrie sidérurgique du Vietnam.

[126] Déjà au début de l’enquête, l’ASFC avait suffisamment de preuves, les unes fournies par la plaignante et les autres découlant de ses propres recherches et de ses enquêtes antérieures, pour justifier l’ouverture d’une enquête en vertu de l’article 20 visant à apprécier dans quelle mesure le gouvernement du Vietnam fixait les prix dans le secteur des tubes soudés en acier au carbone. Il appert qu’au Vietnam les prix dans ce secteur sont influencés par diverses politiques industrielles et macroéconomiques du gouvernement; l’ASFC a donc adressé des DDR en vertu de l’article 20 aux producteurs et exportateurs de TSAC établis dans ce pays de même qu’au gouvernement pour obtenir plus de renseignements.

Réponses à l’enquête en vertu de l’article 20
Réponses des exportateurs

[127] Deux réponses essentiellement complètes à la DDR en vertu de l’article 20 ont été reçues de la part de SeAH Steel Vina Corporation (SeAH Vina)Note de bas de page 24 et de Hoa Phat Steel Pipe Company Ltd. (Hoa Phat). Chacune des trois filiales du groupe Hoa PhatNote de bas de page 25 a soumis une réponse semblable à la DDR en vertu de l’article 20. La plupart des réponses aux questions de la DDR sont semblables ou conformes à la réponse du gouvernement du Vietnam.

Réponse du gouvernement du Vietnam

[128] Une réponse essentiellement complèteNote de bas de page 26 à la DDR en vertu de l’article 20 a été reçue de la part du gouvernement du Vietnam à la phase préliminaire de l’enquête.

[129] Dans son exposé, le gouvernement du Vietnam affirme ne pas avoir adopté ou appliqué de lois ou de règlements qui portent exclusivement sur l’industrie sidérurgique ou le secteur produisant des tubes soudés en acier au carbone. Il a répondu à chaque question de la DDR en vertu de l’article 20 et il a fourni des politiques et des documents pertinents renfermant explications et résumés.

Réponses des pays de remplacement

[130] Des DDR pour pays de remplacement n’ont pas été envoyées à des producteurs de TSAC dans des pays non visés, puisque l’ASFC s’attendait à obtenir ces renseignements auprès d’autres pays visés dans le cadre de l’enquête en dumping.

[131] Les producteurs International Industries Ltd.Note de bas de page 27 au Pakistan, HLD Clark Steel Pipe Co. Inc.Note de bas de page 28 aux Philippines et trois producteurs en Turquie, Erbosan Erciyas Boru Sanayli ve Ticaret A.S. (Erbosan)Note de bas de page 29, Borusan Mannesmann Boru Sanayi ve Ticaret A.S. (Borusan)Note de bas de page 30 et Cayirova Boru ve Sanayi Ticaret A.S. (Cayirova)Note de bas de page 31, ont fourni des réponses complètes à la DDR en dumping, y compris des renseignements sur les prix intérieurs des TSAC vendus aux pays d’exportation.

Réponses des importateurs ayant vendu au Canada des TSAC d’autres pays

[132] Dans le cadre de l’enquête en vertu de l’article 20, une DDR a été envoyée à tous les importateurs connus des marchandises en cause leur demandant des renseignements sur les reventes au Canada de TSAC importés de pays autres que les quatre pays visés. L’ASFC a reçu des réponses à la DDR de six importateurs. Cependant, aucun importateur n’a fourni de renseignements sur les reventes au Canada de marchandises similaires de pays non visés.

Résultats provisoires de l’enquête en vertu de l’article 20

[133] Ci-dessous, l’analyse par l’ASFC des facteurs pertinents qui sont présents dans le secteur des tubes soudés en acier au carbone, y compris les TSAC, au Vietnam.

Politiques industrielles du gouvernement du Vietnam
  • Plan directeur pour le développement du système de fabrication et de distribution de l’acier (2015-2025);
  • Plan directeur pour le développement de l’industrie sidérurgique du Vietnam (2007-2015);
  • Stratégie de développement industriel.
Plan directeur pour le développement du système de fabrication et de distribution de l’acier (2015-2025)

[134] La présente section porte sur l’analyse, par l’ASFC, de la façon dont le gouvernement du Vietnam exerce un contrôle sur le secteur des tubes soudés en acier au carbone, y compris les TSAC. Entre autres, l’ASFC a examiné le plan directeur pour le développement du système de fabrication et de distribution de l’acier de 2015-2025 (plan directeur pour l’acier de 2015-2025) (décision no 694/QD-BCT en date du 31 janvier 2013), qui offre une orientation et un cadre national pour le développement de l’industrie sidérurgique vietnamienne durant la période de 2015 à 2020 ainsi qu’une vision pour son développement jusqu’en 2025Note de bas de page 32.

[135] La plan directeur pour l’acier de 2015-2025 inclut des révisions importantes à une version antérieure du plan directeur de 2007-2015, qui offrait une orientation pour le développement de l’industrie sidérurgique jusqu’en 2015. Le principal objectif du plan directeur de 2015-2025, tel que prévu par son article premier, est le suivant : [Notre traduction]

Développer l’industrie sidérurgique vietnamienne pour répondre à la demande en produits de l’acier de l’économie nationale et assurer la stabilité du marché intérieur et d’exportation. Développer l’industrie sidérurgique de manière durable et écologique.

[136] En plus des objectifs généraux énoncés ci-dessus, le plan directeur pour l’acier de 2015-2025 prévoit des objectifs de développement précis en ce qui a trait à la fabrication de fontes brutes, d’acier spongieux (acier brut) et de produits finis, et à l’exportation de produits de l’acier. Au sujet de la fabrication de produits finis, le plan directeur pour l’acier de 2015-2025 prévoit des cibles de production pour des périodes précises. Cette politique macroéconomique vise à augmenter les niveaux de production et le taux de croissance des exportations de l’industrie sidérurgique et à réduire la dépendance par rapport aux produits importés.

[137] Les cibles pour divers produits de l’acier sont précisées dans le plan directeur pour l’acier de 2015-2025. La production de l’acier laminé à chaud, un intrant important dans la production des marchandises en cause, les TSAC, doit passer à 23 850 tonnes métriques par année d’ici 2025, capacité 5,3 fois plus élevée qu’en 2015Note de bas de page 33.

[138] Pour que la cible de production précisée soit atteinte, le plan directeur pour l’acier de 2015-2025 prévoit, entre autres, des politiques d’application afin d’orienter les investissements dans les installations de fabrication et des directives afin de diversifier la fabrication nationale d’acier laminé à chaud et à froid et d’acier galvanisé. L’une des politiques d’application énonce l’intention du gouvernement du Vietnam d’encourager l’investissement dans des projets de fabrication de tôles laminées à chaud, le principal intrant dans les TSAC : [Notre traduction]

Disposer de politiques encourageant les projets d’aciéries combinées. Prioriser l’investissement dans des projets de fabrication de fontes brutes, de billettes d’acier, de tôles laminées à chaud, d’acier allié, d’acier de haute qualité, d’acier façonné de grande dimension et d’acier inoxydableNote de bas de page 34

[139] Comme nous l’avons déjà vu, le plan directeur pour l’acier de 2015-2025 a fixé les paramètres pour les projets de construction et d’investissement dans l’industrie sidérurgique. Même si la gestion de l’industrie sidérurgique et la planification des projets sidérurgiques ne sont pas systématiques, ou ne cadrent pas avec des demandes économiques réelles, en gérant et en contrôlant les niveaux de production de l’acier, le gouvernement du Vietnam influence les prix de divers produits de l’acierNote de bas de page 35.

[140] Il convient également de noter que, selon le plan directeur pour l’acier de 2015-2025, divers ordres de gouvernement ou organismes gouvernementaux du Vietnam influencent et contrôlent directement les prix des produits de l’acier, ce qui comprend vraisemblablement l’acier laminé à chaud et les tubes soudés en acier au carbone : [Notre traduction]

Le comité populaire des villes et provinces d’affiliation centrale doit : diriger la force de gestion du marché dans le secteur afin de coordonner avec les autorités les efforts pour renforcer le contrôle des prix des produits de l’acier; prévenir la spéculation et assurer la stabilité des prix de l’acier dans le secteurNote de bas de page 36.

[141] Tel que prévu dans le document, le gouvernement du Vietnam non seulement gère l’approvisionnement en produits de l’acier, ce qui influe sur les prix intérieurs, mais il contrôle aussi directement les prix de divers produits dans le secteur sidérurgique, ce qui aurait une incidence directe sur les prix intérieurs des tubes soudés en acier au carbone.

[142] L’ASFC considère que le plan directeur pour l’acier de 2015-2025 montre que le gouvernement du Vietnam a l’intention de continuer de gérer activement le secteur sidérurgique national. Par ailleurs, les directives contenues dans le plan attestent l’intention et la capacité du gouvernement du Vietnam de contrôler les prix de divers produits de l’acier en amont et en aval et, ainsi, d’influencer la composition et la compétitivité du secteur des tubes soudés en acier au carbone. Cela changerait le jeu de l’offre et de la demande, et influerait dans une large mesure sur les prix des produits dans ce secteur, qui comprend les tubes soudés en acier au carbone.

Plan directeur pour le développement de l’industrie sidérurgique du Vietnam (2007-2015)

[143] Le plan directeur pour le développement de l’industrie sidérurgique du Vietnam (plan directeur pour l’acier de 2007-2015) (décision no 145/2007/QD-TTG)Note de bas de page 37, qui a orienté le développement de l’industrie sidérurgique vietnamienne durant la période de 2007 à 2015, a été remplacé par le plan directeur pour l’acier de 2015-2025, détaillé dans la section précédente. Même si le plan directeur pour l’acier de 2007-2015 a expiré, les objectifs, les politiques et les directives de mise en œuvre prévus dans les deux plans successifs témoignent de la participation continue du gouvernement du Vietnam dans la gestion et le contrôle de l’industrie sidérurgique.

[144] La plaignante a souligné d’autres parties pertinentes du plan directeur pour l’acier de 2007-2015 en ce qui concerne les importantes cibles de développement. En plus d’estimations de la demande en acier, le document donne une liste des grands projets d’investissement, de 2007 à 2015 et à plus long terme (2016-2025). Jointe au document de décision est une liste détaillée de 26 grands projets d’investissement dans l’industrie sidérurgique vietnamienne pour la période de 2007 à 2025, faisant état d’immobilisations totales d’environ 10 milliards de dollars américainsNote de bas de page 38.

[145] Pour que soient atteintes les cibles de production, le plan directeur pour l’acier de 2007-2015 prévoit un certain nombre de solutions et de politiques d’envergure. Par exemple, pour qu’il soit répondu à la demande en immobilisations des divers projets sidérurgiques susmentionnés, il prévoit la mise en œuvre d’une variété de solutions d’investissement.Note de bas de page 39

[146] La plaignante soutient que, d’après les solutions proposées dans le plan directeur pour l’acier, le gouvernement du Vietnam impose des barrières techniques qui peuvent fausser les prix sur le marché. Par exemple, le gouvernement du Vietnam a diffusé la directive qui consiste à protéger le marché intérieur au moyen de barrières techniques légales et d’une norme environnementale de qualité, etc.Note de bas de page 40

[147] Le plan directeur pour l’acier de 2007-2015 comprend des tâches précises pour le ministère des Finances et le ministère des Ressources naturelles et de l’Environnement du Vietnam. Il s’agit notamment de proposer des mécanismes pour influer sur le développement de l’industrie sidérurgique et la gestion des ressources entrant dans la production de produits de l’acier. Par exemple, le ministère des Ressources naturelles et de l’Environnement est chargé de gérer rigoureusement le minerai de fer et les fondants; d’orienter et d’augmenter l’investissement dans l’enquête, l’évaluation et l’exploration pour le minerai de fer et les fondants conformément au plan directeur approuvéNote de bas de page 41.

[148] Le fait que ces directives existent semble indiquer que le gouvernement du Vietnam a le pouvoir d’imposer des mécanismes pour contrôler et influencer les prix dans l’industrie sidérurgique, qui comprendrait le secteur des tubes soudés en acier au carbone et le marché des TSACNote de bas de page 42. Par ailleurs, les mesures comprises dans le plan directeur pour l’acier de 2007-2015 témoignent de la participation directe du gouvernement dans l’industrie sidérurgique.

[149] Le plan directeur pour l’acier de 2007-2015 prévoit explicitement que le ministère de l’Industrie et du Commerce se charge de la mise en œuvre en gérant et en contrôlant les investissements, la production et les activités de l’industrie sidérurgique conformément au plan approuvéNote de bas de page 43. Cet énoncé appuie l’allégation que le plan directeur pour l’acier de 2007-2015 n’est pas que symbolique et constitue une directive du gouvernement.

[150] L’ASFC considère que les diverses politiques susmentionnées montrent que le gouvernement du Vietnam joue un rôle actif dans la gestion du développement de l’industrie sidérurgique nationale. Puisque les produits de fontes brutes, d’acier spongieux et de billettes d’acier sont les principaux intrants dans la production de tôles et de feuillards en acier laminés à chaud, l’augmentation de la production de ces intrants confère un avantage aux producteurs d’acier laminé à chaud, ce qui pourrait fausser les prix des TSAC dans le secteur des tubes soudés en acier au carbone. L’ASFC considère aussi que ces mesures influent sur le marché intérieur de l’acier et perturbent le marché concurrentiel dans le secteur des tubes soudés en acier au carbone.

Stratégie de développement industriel

[151] La stratégie de développement industriel jusqu’en 2025, vision pour 2035 (stratégie de développement industriel) (décision no 879/QD-TTg), approuvée par le premier ministre le 9 juin 2014, vise à faire passer le taux de croissance annuel moyen de la valeur ajoutée de l’industrie de 6,5 % en 2015 à 7,0 % en 2020, à faire passer le taux des exportations industrielles par rapport aux exportations totales de 85 % à 88 % d’ici 2025, et à plus de 90 % après 2025, et à faire passer l’ICOR (coefficient de capital marginal) du secteur industriel de 3,5 % à 4,0 % d’ici 2025Note de bas de page 44.

[152] D’après l’orientation prévue dans la stratégie de développement industriel, le Vietnam va prioriser le développement de ses divers secteurs industriels, y compris le secteur du traitement et de la fabrication de l’acier, et investir dans le développement de la fabrication de l’acier pour le génie mécanique, comme les tôles, l’acier façonné et l’acier alliéNote de bas de page 45.

[153] Le gouvernement du Vietnam a non seulement la capacité d’encourager et d’orienter l’investissement dans des secteurs de l’acier, mais aussi le pouvoir d’approuver ou d’annuler des projets. D’après des reportages de Viet Nam News, le ministère de l’Industrie et du Commerce comptait éliminer 12 projets inefficaces de son dernier plan directeur pour l’acierNote de bas de page 46. En effet, ces 12 projets, jugés inefficaces et ne comptant pas assez d’investisseurs, ont été éliminés. Avant la diffusion de ce plan, à la 14eassemblée nationale en mai 2016, le ministre de l’Industrie et du Commerce avait fait savoir que le gouvernement avait demandé aux ministères concernés de revoir ces projets et de proposer une solution, telle que la révocation et la récupération des immobilisations de l’ÉtatNote de bas de page 47.

[154] Au sujet des pratiques existantes, un projet sidérurgique ne peut pas être ratifié s’il n’est pas inscrit au plan directeur pour l’acierNote de bas de page 48. La Vietnamese Steel Association (VSA) a récemment déclaré au ministère de l’Industrie et du Commerce que l’État ne gérerait plus l’industrie sidérurgique au moyen d’un quelconque plan directeur si une certaine « loi de planification » devait être adoptée en 2018Note de bas de page 49. Cette affirmation de la VSA montre que le gouvernement du Vietnam gère actuellement l’industrie sidérurgique, et que le plan directeur est le mécanisme employé à cette fin. De plus, dans un article récent, l’association indique que le gouvernement doit augmenter les débours afin d’achever de nombreux projets à investissement public, ce qui fera croître la demande en produits de l’acierNote de bas de page 50.

[155] À nouveau, l’information sur le contrôle des projets de construction et d’investissement dans l’industrie sidérurgique porte à croire que le gouvernement du Vietnam a une emprise importante sur la production sidérurgique.

Nationalisation et contrôle des entreprises sidérurgiques

[156] Selon un document sur les EE du Vietnam et l’intégration économique internationale, le gouvernement du Vietnam conserve des responsabilités pour protéger les entreprises d’État (EE) au moyen de préférences tarifaires, financières et fiscalesNote de bas de page 51.

[157] Un document conjoint du Groupe de la Banque mondiale et du ministère de la Planification et de l’Investissement du Vietnam, Vietnam 2035 – vers la prospérité, la créativité, l’équité et la démocratieNote de bas de page 52, donne les résultats de recherches et des données économiques qui démontrent que le Vietnam a maintenu un quasi-monopole dans plusieurs secteurs importants de l’économie.

[158] Dans le document il est démontré que l’emprise du secteur public sur la production et les conditions du marché demeure vaste. L’État conserve une participation majoritaire dans plus de 3 000 EE, qui représentent près du tiers du PIB et 40 % de l’investissement total. Il maintient également un quasi-monopole (ou oligopole) dans des secteurs critiquesNote de bas de page 53.

[159] La nationalisation dans le secteur de l’acier se chiffre à près de 20 %. Il s’agit d’une portion considérable de l’industrie sidérurgique et de ses secteurs connexes, et le gouvernement du Vietnam maintient ainsi une grande emprise sur la production sidérurgiqueNote de bas de page 54.

[160] En maintenant une telle emprise sur des secteurs clés, comme le gaz, l’électricité, le charbon, l’eau, et l’exploitation des mines et des carrières, le gouvernement du Vietnam exerce un contrôle sur le coût des principaux intrants de la production des tubes soudés en acier au carbone. En d’autres mots, le gouvernement peut fausser les prix intérieurs indirectement par divers mécanismes liés à la fourniture ou au prix des intrants (produits et services) pour la production des marchandises en cause.

[161] Ainsi, les EE ou les producteurs d’acier contrôlés en amont et en aval sont orientés par les mandats du gouvernement du Vietnam et ne sont pas nécessairement assujettis aux forces du marché. Les producteurs d’acier vietnamiens pourraient fournir des intrants de matières premières aux producteurs de TSAC à des prix faussés. Pour cette raison, il est aussi fort probable que les TSAC sont vendus à des prix qui seraient différents dans un marché où jouerait la concurrence.

[162] Récemment, le gouvernement du Vietnam a adopté un programme de restructuration des EE s’appuyant sur la privatisation partielle (ou actionnarisation). Cependant, même si le nombre d’EE a baissé, de 12 000 en 1990 à 3 048 en 2014, il demeure important, et les EE représentent une part considérable de l’actif fixe et des bénéfices dans l’économie nationaleNote de bas de page 55. Cela montre que les EE continuent de jouer un rôle clé dans les industries à forte concentration de capital, et que le gouvernement du Vietnam influence encore dans une large mesure les investissements et les entreprises dans le pays.

[163] Un document de travailNote de bas de page 56 établi par le Research Institute of Economy, Trade and Industry indique que la privatisation partielle au Vietnam présente des signes inquiétants : [Notre traduction]

L’État maintient des proportions très élevées de capital dans les entreprises partiellement privatisées, ce qui jette des doutes sur l’efficacité de l’exercice de transformation des EE. L’État possédait 46,1 % de toutes les actions des entreprises partiellement privatisées à la fin de 2004, mais cette proportion serait passée à 92 % en 2017. Cette situation est due au fait que l’État continue de jouer un rôle important, en particulier dans les grandes EE de secteurs stratégiques, et ce, malgré la privatisation partielleNote de bas de page 57.

[164] D’après un reportage du Saigon Times, le 20 septembre 2018, le comité directeur de la réforme et du développement des entreprises a fait savoir au gouvernement que le processus de privatisation partielle des EE est beaucoup plus lent que le plan approuvé par le premier ministre, puisque de nombreux nouveaux règlements sur la privatisation partielle et le dessaisissement sont plus stricts et visent à maximiser les bénéfices de l’ÉtatNote de bas de page 58.

[165] Viet Nam Steel Corporation (VNSteel) est une grande EE productrice d’acier au Vietnam qui a une capacité annuelle de production d’acier laminé de plus de 2,5 millions de tonnes et un effectif de plus de 17 000 employésNote de bas de page 59. VNSteel aurait une part de marché dominante de 50 % et un réseau de distribution national et serait liée à la plupart des grands producteurs d’acier sur le marché vietnamien. VNSteel possède une chaîne de production complexe et entièrement intégrée qui utilise le minerai de fer et la ferraille pour produire des billettes, puis des produits finisNote de bas de page 60. Tel que déclaré en 2017, 93,9 % de VNSteel au total appartient au gouvernement du VietnamNote de bas de page 61, et tous les membres du conseil d’administration sont nommés, renvoyés, récompensés et punis par le premier ministre du pays.Note de bas de page 62

[166] Des preuves de l’influence potentielle du gouvernement du Vietnam sur les prix de l’acier par l’intermédiaire de VNSteel ont été présentées par une maison de courtage en valeurs mobilières du Vietnam en juin 2011.Note de bas de page 63

[167] En outre, il se peut que le gouvernement du Vietnam exerce un contrôle indirect sur nombre des actifs les plus productifs de l’économie, une ingérence de l’État qui crée des déséquilibres sur le marché. Plus précisément, l’information dans le rapport de 2012 du Comité de l’acier de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), laisse entrevoir une ingérence du gouvernement et un contrôle sur les intrants de l’acier en amont ou les produits finis en aval par l’intermédiaire d’EE ou d’organes gouvernementaux.Note de bas de page 64 Puisque certains renseignements concernant la participation directe du gouvernement du Vietnam dans le secteur des tubes soudés en acier au carbone pourraient être périmés, l’ASFC tâchera d’obtenir des renseignements à jour à la phase finale de l’enquête.

Stabilisation des prix

[168] Dans sa réponse à la DDR en vertu de l’article 20, le gouvernement du Vietnam déclare que certains produits/services pourraient faire l’objet d’un contrôle des prix par l’État au moyen des quatre méthodes suivantes : (1) stabilisation des prix, (2) détermination des prix, (3) négociation des prix et (4) analyse des prixNote de bas de page 65.

[169] Le 20 juin 2012, le ministère des Finances a adopté la loi sur les prix (loi no 11/2012/QH13)Note de bas de page 66. En règle générale, la loi sur les prix prévoit les droits et les obligations des organisations et des particuliers en ce qui concerne les prix, ainsi que la gestion et la réglementation des prix par le gouvernement du Vietnam.

[170] La loi sur les prix renferme plusieurs termes vagues pour décrire quand les mesures de stabilisation des prix pourraient s’appliquer. Le chapitre III, Opération pour la réglementation des prix de l’État, prévoit que les matières premières, le carburant, les matériaux et les principaux services destinés à la production et à la distribution sont assujettis à la stabilisation des prix. Même si les termes « matières premières » et « matériaux » ne sont pas clairement définis, il est raisonnable de supposer que les matières premières entrant dans la production de l’acier pourraient être assujetties au contrôle des prix advenant que le gouvernement exerce son plein pouvoir discrétionnaire.

[171] Le 14 novembre 2013, le gouvernement du Vietnam a aussi pris le décret no 177/2013/ND-CPNote de bas de page 67 pour orienter la mise en application de la loi sur les prix. Selon le document, l’acier de construction est assujetti à la déclaration des prix, quoiqu’il ne soit pas clair quels produits de l’acier relèvent de cette catégorie et quel type de mécanisme le gouvernement emploie pour gérer la déclaration des prix.

[172] La plaignante a aussi allégué que le gouvernement du Vietnam pourrait appliquer des contrôles lorsqu’il y a fluctuation des prix de marchandises spécifiques, notamment l’acierNote de bas de page 68.

[173] Bien que l’information ci-dessus soit quelque peu périmée, elle laisse entrevoir une ingérence possible du gouvernement et une capacité de contrôler les prix de divers produits de l’acier, y compris les TSAC ou les matières premières entrant dans la production des marchandises en cause. L’ASFC reconnaît que les renseignements sur des cas concrets de contrôle direct des prix par le gouvernement du Vietnam dans le secteur des tubes soudés en acier au carbone sont limités, et elle tâchera d’obtenir plus de renseignements sur le rôle du gouvernement dans l’établissement et le contrôle des prix à la phase finale de l’enquête.

Contrôles à l’importation

[174] Dans un exposé au Comité de l’acier de l’OCDE en juillet 2013, le gouvernement du Vietnam a fait connaître ses stratégies pour favoriser la croissance de l’industrie sidérurgique et du commerce. Entre autres, il a énoncé son plan pour réduire les importations de différents produits de l’acier et a fourni des cibles de réduction précisesNote de bas de page 69.

[175] Dans le même ordre d’idées, en décembre 2011, le gouvernement du Vietnam a approuvé la stratégie d’exportation et d’importation de 2011-2020 et vision pour 2030 (décision 2471/QD-TTg). La décision énonce la cible du gouvernement qui consiste à réduire graduellement le déficit commercial en limitant l’excédent des importations par rapport aux exportations à moins de 10 % en 2015 afin de garantir l’équilibre commercial d’ici 2020Note de bas de page 70. La plaignante a affirmé que les efforts du gouvernement pour réduire le volume des importations ou le limiter à un seuil donné ont nécessairement une incidence sur l’offre et donc sur les prixNote de bas de page 71.

[176] Selon un document de recherche publié par l’Université de Tohoku en mai 2016, le volume des importations de tubes soudés en acier est demeuré stable, alors que la consommation intérieure et les exportations des mêmes produits ont nettement augmenté ces dernières annéesNote de bas de page 72.

[177] Le 14 mars 2016, le ministère de l’Industrie et du Commerce a rendu une décision temporaire pour imposer des droits tarifaires de 23,3 % et de 14,2 % sur les importations de billettes d’acier et d’acier revêtu afin de protéger les entreprises productrices d’acier du Vietnam contre le dommage causé par des importations à faibles prixNote de bas de page 73. En juillet 2016, le ministère a officiellement confirmé les mesures de soutien à l’industrie sidérurgique en maintenant les droits de 23,3 % sur les billettes d’acier et en faisant passer à 15,4 % les droits sur les produits allongés en provenance d’un certain nombre de pays, dont la Chine, les États-Unis, le Canada, l’Allemagne, la France, le Japon et la Corée du Sud. La décision, d’une durée de quatre ans, est entrée en vigueur le 2 août 2016Note de bas de page 74.

[178] Dans sa réponse à la DDR en vertu de l’article 20, le gouvernement du Vietnam confirme que la circulaire 12/2015/TT-BCTNote de bas de page 75, diffusée par le ministère de l’Industrie et du Commerce le 12 juin 2015, réglementait la délivrance de licences d’importation de produits de l’acier, y compris les TSAC. La circulaire a été annulée le 1er septembre 2017. Les règles de délivrance des licences et de certification des importations établissaient des normes et des procédures techniques strictes pour la production et l’importation de divers types de produits allant des produits en acier au carbone plats et allongés aux produits d’acier allié et inoxydableNote de bas de page 76.

[179] En exerçant un contrôle sur les importations d’acier par l’imposition de tarifs plus élevés et de licences d’importation, le gouvernement du Vietnam a limité l’accessibilité et l’attrait de produits de l’acier importés. L’ASFC considère qu’il est raisonnable de supposer que ces mesures ont directement influé sur les prix intérieurs de ces produits, y compris les TSAC.

Subventionnement de l’industrie sidérurgique

[180] La plaignante allègue que des subventions accordées par le gouvernement vietnamien faussent les prix de vente des TSAC au Vietnam.

[181] D’après la plaignante, le gouvernement vietnamien possède et contrôle en majeure partie l’un des plus gros producteurs d’acier du Vietnam, ses filiales ainsi que d’autres secteurs critiques (gaz, électricité, charbon, eau, etc.), qui fournissent des intrants importants pour la production de tubes soudés en acier au carbone.

[182] Toujours d’après la plaignante, le gouvernement fixe ainsi les prix des matières premières et des intrants pour les producteurs de TSAC, prix qui seraient différents dans un marché concurrentiel.Note de bas de page 77 De plus, les entreprises pourraient produire et commercialiser l’acier en fonction d’objectifs et de politiques du gouvernement plutôt que des conditions du marché. Dans le même ordre d’idées, puisque les groupes sidérurgiques et les entreprises appartenant à l’État produisent les intrants de matières premières à des prix faussés, il est fort probable que les prix des TSAC dans le secteur des tubes soudés en acier au carbone sont aussi faussés.

[183] La plaignante a fourni des renseignements sur le subventionnement de l’industrie sidérurgique vietnamienne, et soutient que ce subventionnement influe sur le prix des produits de l’acier, dont les TSAC.Note de bas de page 78 La plaignante a fondé son allégation sur des renseignements publiés dans une enquête en subventionnement antérieure de l’ASFC.Note de bas de page 79

[184] L’ASFC reconnaît que les subventions pourraient réduire le prix des intrants d’acier dans la branche de production des TSAC du Vietnam. Par ailleurs, les subventions pourraient permettre aux producteurs de TSAC d’offrir des prix réduits à leurs clients.

[185] En résumé, malgré que l’ASFC n’ait pas ouvert une enquête de subventionnement, l’ASFC considère que les subventions présumées pourraient permettre aux entreprises sidérurgiques vietnamiennes, y compris les producteurs de TSAC, de commercialiser les produits de l’acier et de TSAC à des prix qui seraient déterminés par des facteurs autres que les conditions du marché, ce qui donnerait des prix inférieurs à ce qu’ils seraient sans subvention du gouvernement. À la phase finale de l’enquête, l’ASFC tâchera de recueillir auprès des producteurs et du gouvernement du Vietnam des renseignements sur le subventionnement dans le secteur des tubes soudés en acier au carbone et de l’acier.

Résumé de l’analyse du contrôle gouvernemental

[186] D’après l’information au dossier à ce jour, notamment l’ampleur des politiques et des mesures macroéconomiques du gouvernement du Vietnam que nous venons de voir en détail, il y a un fondement factuel probant de l’influence du gouvernement sur l’industrie sidérurgique vietnamienne, qui comprend le secteur des tubes soudés en acier au carbone, dont les TSAC – les marchandises à l’étude. Sur le marché intérieur, pareilles mesures et politiques peuvent changer totalement le rapport offre-demande et, du coup, le prix intérieur de divers produits de l’acier : brames, tôles, acier laminé à chaud, etc., mais également TSAC.

[187] Avec ses grandes mesures et politiques macroéconomiques, comme le plan directeur pour l’acier de 2015-2025, le plan directeur pour l’acier de 2007-2015 et la stratégie de développement industriel, le gouvernement du Vietnam a créé des conflits de priorités pour les entreprises sidérurgiques, y compris les producteurs de TSAC. Ses propres objectifs, qui ne cadrent pas nécessairement avec ceux des entreprises, influencent les gammes de produits et les quantités fabriquées et, ultimement, les prix.

[188] Outre les politiques industrielles énoncées dans ses plans directeurs, le gouvernement du Vietnam influence le secteur des tubes soudés en acier au carbone par la nationalisation des producteurs d’acier. Il peut aussi influencer ce secteur par le contrôle des entreprises en amont qui fournissent les intrants des TSAC. Les preuves de stabilisation des prix et de contrôle des importations par le gouvernement ainsi que son subventionnement présumé de l’industrie sidérurgique et du secteur des tubes soudés en acier au carbone montrent encore son intention et sa capacité de s’imposer dans le secteur qui nous intéresse.

[189] L’ASFC a déjà affirmé relativement à un segment du secteur de l’acier que les prix intérieurs du Vietnam étaient fixés en majeure partie par le gouvernement.

[190] L’ASFC s’est formé l’opinion que les conditions décrites à l’article 20 existent dans le secteur de l’acier laminé plat au Vietnam aux fins de la décision provisoire de dumping concernant l’acier laminé à froid en provenance du Vietnam. Le secteur de l’acier laminé plat comprend les bobines d’acier laminé à chaud, le principal intrant des TSAC.

[191] En conclusion, l’effet cumulatif de ces mesures et de cette emprise montre clairement que le gouvernement du Vietnam influence les prix des tubes soudés en acier au carbone dans son pays. À ce sujet, des preuves suffisantes au dossier indiquent que les prix intérieurs dans le secteur des tubes soudés en acier au carbone sont largement influencés par le gouvernement.

Analyse des prix intérieurs

[192] La plaignante a dit avoir été incapable de trouver des prix de vente intérieurs pour les TSAC au Vietnam.Note de bas de page 80 L’ASFC a effectué ses propres recherches et a éprouvé les mêmes difficultés à obtenir des renseignements publics sur l’établissement des prix des TSAC au Vietnam.

[193] Comme nous l’avons déjà vu, l’ASFC a reçu des réponses essentiellement complètes à la DDR en dumping. L’ASFC a utilisé l’information recueillie pour analyser les prix intérieurs des TSAC au Vietnam par rapport aux prix intérieurs dans d’autres pays, qui ont été jugés avoir un marché intérieur concurrentiel pour les TSAC.

[194] Les résultats de cette comparaison indiquent que les prix des TSAC noir et galvanisé au Vietnam étaient de 14,2 % et de 14,4 % inférieurs aux prix de vente moyens pondérés des mêmes produits vendus dans le marché intérieur par les autres répondants.

[195] L’analyse des prix intérieurs des TSAC semble donc indiquer qu’il existe des motifs suffisants de croire que les prix dans le secteur des tubes soudés en acier au carbone au Vietnam seraient différents dans un marché où jouerait la concurrence.

Sommaire des résultats provisoires de l’enquête en vertu de l’article 20

[196] L’ASFC a étudié les renseignements et les arguments présentés par les exportateurs et producteurs et le gouvernement du Vietnam dans leurs exposés. Même si les renseignements indiquant que le gouvernement du Vietnam fixe les prix des TSAC directement sur le marché intérieur sont limités, l’ASFC considère que des preuves montrent que le gouvernement est très engagé dans le secteur de l’acier. Par ailleurs, les mesures adoptées par le gouvernement à l’égard de divers produits de l’acier confèrent aux exportateurs et producteurs de TSAC des avantages sur le plan des coûts, à la fois sur les marchés vietnamien et international.

[197] L’ampleur et l’importance des mesures du gouvernement du Vietnam dans l’industrie sidérurgique ont grandement influé sur le secteur des tubes soudés en acier au carbone au Vietnam, qui comprend les TSAC. D’après ce qui précède, l’ASFC est d’avis que :

  • les prix intérieurs sont fixés en majeure partie par le gouvernement du Vietnam;
  • il existe des motifs suffisants de croire que les prix intérieurs sont différents de ce qu’ils seraient dans un marché concurrentiel.

[198] L’ASFC va continuer son enquête en vertu de l’article 20 à la phase finale de l’enquête en dumping, vérifiant et analysant tous les éléments d’information pertinents. Soit elle réaffirmera l’opinion que les conditions de l’article 20 existent au Vietnam dans le secteur des tubes soudés en acier au carbone (lequel comprend les TSAC), soit au contraire elle conclura que les prix intérieurs de ce pays sont une base admissible pour calculer les valeurs normales.

Valeurs normales – article 20

[199] Aux fins de la décision provisoire, les valeurs normales n’ont pas pu être estimées à partir des prix de vente intérieurs au Vietnam ou du coût total des marchandises, plus un montant pour les bénéfices, puisque l’ASFC s’est formé l’opinion que les conditions décrites à l’alinéa 20(1)a) de la LMSI existent dans le secteur des tubes soudés en acier au carbone au Vietnam.

[200] Lorsque les conditions de l’article 20 existent, l’ASFC peut estimer les valeurs normales à partir des prix de vente ou du coût total, plus un montant pour les bénéfices, de marchandises similaires vendues par les producteurs dans un pays de remplacement désigné par le président, conformément aux dispositions de l’alinéa 20(1)c) de la LMSI.

[201] L’ASFC a reçu des réponses d’un producteur coopératif au Pakistan, d’un producteur aux Philippines et de trois producteurs en Turquie. Cependant, les producteurs dans ces pays ne disposaient pas de renseignements sur les prix intérieurs ou l’établissement des coûts de marchandises similaires aux TSAC exportés du Vietnam à des importateurs au Canada.

[202] Lorsque les valeurs normales ne peuvent pas être déterminées aux termes de l’alinéa 20(1)c), la LMSI prévoit, à l’alinéa 20(1)d), une méthode de rechange pour le calcul des valeurs normales en fonction des reventes au Canada de marchandises similaires importées d’un pays tiers. Ces dispositions ne pouvaient pas non plus être appliquées, puisque les importateurs n’ont pas fourni suffisamment de renseignements sur les reventes de marchandises similaires en provenance d’un pays tiers.

[203] Ainsi, ayant considéré tout le contenu du dossier – qu’il provienne de la plaignante, des exportateurs et producteurs ou de sources publiques, l’ASFC a estimé les valeurs normales selon une méthode fondée sur le coût en utilisant les réponses essentiellement complètes qu’elle a reçues des trois producteurs de TSAC en Turquie sur les marchandises produites en Turquie et vendue au Canada. Les valeurs normales estimées pour les TSAC des producteurs en Turquie correspondent à la somme du coût de production, d’un montant raisonnable pour les frais, notamment les frais administratifs et les frais de vente, et d’un montant raisonnable pour les bénéfices. Cette méthode a servi à estimer les valeurs normales pour les exportateurs au Vietnam qui ont fourni des réponses essentiellement complètes à l’ASFC.

Hoa Phat Steel Pipe Company

[204] Hoa Phat Steel Pipe Co., Ltd (Hoa Phat) est une entreprise privée, d’Ha Noi au Vietnam. Hoa Phat compte un certain nombre de filiales qui produisent des tubes en acier et d’autres produits, dont trois filiales ayant produit et exporté des marchandises en cause dans la PVE. Les trois filiales ont fait des réponses essentiellement complètes à la DDR en dumping de l’ASFCNote de bas de page 81. Une quatrième filiale, qui a produit et vendu des marchandises similaires sur le marché intérieur, a fourni des renseignements sur le coûtNote de bas de page 82.

[205] Hoa Phat a produit et exporté des marchandises en cause dans la PVE par l’intermédiaire de trois filiales établies à Hung Yen, Binh Duong et Long An au Vietnam.

[206] Pour les marchandises en cause exportées au Canada par Hoa Phat dans la PVE, les prix à l’exportation ont été estimés selon la méthode prévue à l’article 24 de la LMSI, comme étant la valeur la plus basse entre le prix de vente de l’exportateur et le prix d’achat de l’importateur, rectifiée par déduction des frais entraînés par la préparation des marchandises en vue de leur expédition vers le Canada et des autres frais découlant de l’exportation ou de l’expédition.

[207] La comparaison de la valeur normale estimative totale avec le prix à l’exportation estimatif total donne pour Hoa Phat une marge estimative de dumping qui s’élève à 10,6 % du prix à l’exportation. L’ASFC va poursuivre son travail de collecte et de vérification de données à la phase finale de l’enquête.

SeAH Steel Group

[208] SeAH Steel Vina Corporation (SeAH Vina), un fabricant de divers tuyaux et tubes en acier, a une usine dans la zone industrielle de Dong Nai au Vietnam. Deux filiales, SeAH Steel America Inc. (SeAH America) et State Pipe and Supply Inc. (State Pipe) aux États-Unis, ont aussi vendu des marchandises en cause à des importateurs au Canada dans la PVE.

[209] SeAH Vina a fourni à l’ASFC une réponse essentiellement complète à la DDR en dumpingNote de bas de page 83 et à la DDR en vertu de l’article 20.Note de bas de page 84 SeAH America et State Pipe ont aussi fait des réponses essentiellement complètes à la DDR en dumpingNote de bas de page 85 et à la DDR pour importateursNote de bas de page 86.

SeAH Vina

[210] Puisque SeAH Vina et son importateur, SeAH America, sont liés, un test de fiabilité s’imposait pour déterminer si les prix à l’exportation établis selon l’article 24 étaient sujets à caution pour l’application de la LMSI; il a consisté à comparer les prix à l’exportation estimés selon l’article 25 avec ceux estimés selon l’article 24. Quant au « montant pour les bénéfices » pour les calculs de l’article 25, l’ASFC l’a estimé selon l’alinéa 22a) du RMSI, d’après les données dont elle disposait pour les vendeurs ayant fait des profits au Canada sur leurs ventes de marchandises similaires dans la PVE. Il en est ressorti que les prix selon l’article 24 étaient fiables, et donc, les prix à l’exportation pour SeAH America ont été estimés selon cet article.

[211] La comparaison de la valeur normale estimative totale avec le prix à l’exportation estimatif total donne, pour SeAH America, une marge estimative de dumping qui s’élève à 12,4 % du prix à l’exportation.

State Pipe

[212] State Pipe, de l’État américain de Californie, est un distributeur en gros de tubes en acier qui fournit des services spécialisés de revêtement en ciment et de chemisage de tuyaux.

[213] Lorsque des marchandises sont expédiées indirectement au Canada à partir de leur pays d’origine par l’entremise d’au moins un autre pays, autres que des marchandises qui transitent par un autre pays, les dispositions du paragraphe 30(2) de la LMSI s’appliquent et stipulent que la valeur normale doit être celle qui est la plus élevée entre la valeur normale dans le pays d’exportation et celle dans le pays d’origine.

[214] Pour les valeurs normales dans le pays d’exportation, toutes les ventes intérieures de State Pipe visaient des marchandises similaires originaires du Vietnam. Les coûts des marchandises vietnamiennes n’ont pas pu être estimés à partir de l’information sur les coûts au Vietnam, puisque l’ASFC s’est formé l’opinion que les conditions décrites à l’article 20 existent dans le secteur des tubes soudés en acier au carbone au Vietnam. Par conséquent, les valeurs normales ont été estimées selon la méthode du coût majoré, d’après l’information sur le coût de production des TSAC en Turquie, plus un montant raisonnable pour les frais, notamment les frais administratifs et les frais de vente de State Pipe, et un montant raisonnable pour les bénéfices des producteurs turcs.

[215] L’analyse a révélé que les valeurs normales dans le pays d’exportation étaient plus élevées que celles dans le pays d’origine. Par conséquent, l’estimation des valeurs normales pour les marchandises en cause exportées par State Pipe s’est fondée sur les valeurs normales dans le pays d’exportation.

[216] Les prix à l’exportation ont été estimés selon la méthode prévue à l’article 24 de la LMSI, comme étant la valeur la plus basse entre le prix de vente de l’exportateur et le prix d’achat de l’importateur, rectifiée par déduction des frais entraînés par la préparation des marchandises en vue de leur expédition vers le Canada et des autres frais découlant de l’exportation ou de l’expédition.

[217] La comparaison de la valeur normale estimative totale avec le prix à l’exportation estimatif total donne, pour State Pipe, une marge estimative de dumping qui s’élève à 10,0 % du prix à l’exportation.

Tous les autres exportateurs – Vietnam

[218] Pour les exportateurs des marchandises en cause originaires ou exportées du Vietnam qui n’ont pas fait de réponse complète à la DDR en dumping ou qui n’ont pas fourni suffisamment de renseignements, l’ASFC a estimé les valeurs normales et les prix à l’exportation d’après les faits connus.

[219] Pour déterminer quelles seraient les meilleures méthodes à cette fin, elle a examiné toute l’information au dossier administratif, y compris la plainte déposée par la branche de production nationale, ses propres estimations au début de l’enquête, les renseignements soumis par les exportateurs de TSAC en provenance des pays visés et les documents des douanes.

[220] L’ASFC a jugé que les valeurs normales et les prix à l’exportation estimés pour les exportateurs ayant fait des réponses essentiellement complètes aux fins de la décision provisoire constituaient une meilleure assise que la plainte ou les estimations faites à l’ouverture, puisque contrairement à celles-ci elles reflétaient les pratiques commerciales véritables des exportateurs dans la PVE.

[221] Les réponses de Hoa Phat et de SeAH Group étaient essentiellement complètes aux fins de la décision provisoire. L’ASFC a donc comparé la valeur normale estimative et le prix à l’exportation estimatif de chaque transaction pour ces exportateurs et a jugé que le plus fort excédent observé de la valeur normale estimative sur le prix à l’exportation estimatif (en pourcentage de celui-ci) serait une bonne assise pour estimer les valeurs normales. Cette méthode limite pour les exportateurs l’intérêt de ne pas collaborer pleinement à l’enquête en dumping.

[222] Ainsi, d’après les faits connus, pour les exportateurs n’ayant pas fait de réponse complète et fiable à la DDR en dumping, la valeur normale des marchandises en cause originaires ou exportées du Vietnam a été fixée comme étant le plus fort excédent de la valeur normale sur le prix à l’exportation jamais observé pour une transaction donnée dans la PVE; à savoir, 47,7 % du prix à l’exportation. L’ASFC a examiné les transactions pour s’assurer d’en exclure toutes anomalies (très petits volumes, très faible valeur, effets de saison ou autres facteurs opérationnels), mais il n’y avait pas d’anomalies en fin de compte.

[223] L’ASFC a décidé que ses propres documents de déclaration douanière étaient la source la plus complète pour déterminer le prix à l’exportation des marchandises, puisqu’ils contenaient les données d’importation réelles.

[224] Selon les méthodes susmentionnées, aux fins de la décision définitive, la marge estimative de dumping pour tous les autres exportateurs des marchandises en cause en provenance du Vietnam s’élève à 47,7 % du prix à l’exportation.

Sommaire des résultats provisoires

[225] Sont présentés sommairement ci-dessous les résultats provisoires de l’enquête en dumping pour toutes les marchandises en cause dédouanées au Canada dans la PVE.

Sommaire des résultats provisoires
PVE : du 1er juillet 2017 au 30 juin 2018
Pays d’origine ou d’exportation Marge de dumping estimative
(en pourcentage du prix à l’exportation)
Volume estimatif de marchandises en cause, en pourcentage des importations totales*
Pakistan   5,4 %
International Industries 10,1 %  
Tous les autres exportateurs 58,0 %  
Philippines   12,9 %
HLD Clark 3,8 %  
Tous les autres exportateurs 30,1 %  
Turquie   15,9 %
Borusan 4,9 %  
Erbosan 3,0 %  
Iris 49,0 %  
Tous les autres exportateurs 95,0 %  
Vietnam   14,0 %
Hoa Phat 10,6 %  
SeAH Vina 12,4 %  
State Pipe 10,0 %  
Tous les autres exportateurs 47,7 %  

*Volume en tonnes métriques

[226] Si, à tout moment avant de prendre une décision provisoire, l’ASFC acquiert la conviction que la quantité réelle et éventuelle des marchandises importées d’un pays donné est négligeable, l’article 35 de la LMSI l’oblige à mettre fin au volet de ses enquêtes qui porte sur ce pays.

[227] Au sens du paragraphe 2(1) de la LMSI, « négligeable » se dit du volume de marchandises importées d’un pays donné s’il représente moins de 3 % du volume total des marchandises de même description dédouanées au Canada en provenance de tous pays.

[228] Les importations du Pakistan, des Philippines, de la Turquie et du Vietnam ne sont donc pas négligeables, puisqu’elles dépassent toutes 3 % du total général.

[229] Si, au moment de prendre une décision provisoire, l’ASFC décide au titre de l’article 38 de la LMSI que, pour les marchandises d’un exportateur donné, la marge de dumping est minimale, elle poursuit son enquête sur ces marchandises, mais sans frapper de droits provisoires les marchandises de même description importées dans la période provisoire.

[230] Selon le paragraphe 2(1) de la LMSI, une marge de dumping inférieure à 2 % du prix à l’exportation des marchandises se qualifie de minimale. Tel n’est pas le cas des marges de dumping estimées ici pour le Pakistan, les Philippines, la Turquie et le Vietnam.

[231] Sont présentés sommairement à l’annexe 1 les marges estimatives de dumping et les taux de droits provisoires attribués aux différents exportateurs.

Décision

[232] Le 18 octobre 2018, conformément au paragraphe 38(1) de la LMSI, l’ASFC a rendu une décision provisoire de dumping concernant les TSAC originaires ou exportés du Pakistan, des Philippines, de la Turquie et du Vietnam.

Droits provisoires

[233] Le paragraphe 8(1) de la LMSI dit que, quand il y a eu décision provisoire et que l’ASFC juge que des droits provisoires sont nécessaires pour prévenir un dommage, un retard ou une menace de dommage, l’importateur au Canada des marchandises sous-évaluées doit payer les droits provisoires exigibles, ou bien déposer une caution équivalente. Si, par contre, d’après une décision provisoire, la marge estimative de dumping des marchandises d’un exportateur donné est minimale, le paragraphe 8(1.3) veut qu’aucuns droits antidumping ne soient imposés sur les importations de marchandises de ce même exportateur.

[234] Conformément au paragraphe 8(1) de la LMSI, les importateurs au Canada devront payer des droits provisoires pour toutes les importations dédouanées de TSAC sous-évalués. L’imposition de ces droits commencera le jour de la décision provisoire pour se terminer, soit quand l’ASFC fermera l’enquête en vertu du paragraphe 41(1), soit quand le TCCE rendra son ordonnance ou ses conclusions, selon la première éventualité. L’ASFC estime que les droits provisoires sont nécessaires pour prévenir des dommages. Comme le dit la décision provisoire du TCCE, les éléments de preuve disponibles donnent une indication raisonnable que le dumping des TSAC a causé ou menace de causer un dommage à la branche de production nationale.

[235] Les TSAC importés du Pakistan, des Philippines, de la Turquie et du Vietnam, dédouanés par l’ASFC à compter du 18 octobre 2018, seront frappés de droits provisoires équivalents à la marge estimative de dumping, exprimés en pourcentage du prix à l’exportation et calculés en fonction de l’exportateur. Voir à l’annexe 1 les marges estimatives de dumping et les taux de droits provisoires.

[236] Les importateurs sont tenus de payer les droits provisoires en espèces ou par chèque certifié. Par ailleurs, ils peuvent verser une caution d’un montant égal aux droits à payer. Les importateurs peuvent communiquer avec leur bureau régional de l’ASFC s’ils ont des questions sur le paiement des droits provisoires ou le versement de cautions. Les importateurs qui n’indiquent pas le bon code LMSI ou qui décrivent mal les marchandises dans les documents d’importation s’exposent à des sanctions administratives pécuniaires. Les marchandises importées sont aussi assujetties à la Loi sur les douanes, et des intérêts au titre de cette loi s’accumuleront sur les paiements en retard.

Mesures à venir

Agence des services frontaliers du Canada

[237] L’ASFC va poursuivre son enquête et rendre sa décision définitive d’ici le 16 janvier 2019.

[238] Là où la marge de dumping d’un exportateur donné s’avérera minimale, l’ASFC mettra fin à l’enquête sur les marchandises de cet exportateur, et les droits provisoires payés et/ou les garanties seront rendus aux importateurs. Si l’ASFC est toujours convaincue qu’il y a eu dumping, elle rendra une décision définitive.

Tribunal canadien du commerce extérieur

[239] Le TCCE a commencé son enquête sur la question du dommage causé à la branche de production nationale. Il devrait rendre ses conclusions d’ici le 15 février 2019.

[240] Si le TCCE conclut que le dumping n’a pas causé de dommage ni de retard et ne menace pas non plus de causer un dommage, il mettra fin à la procédure, et tous droits antidumping provisoires payés ou toute garantie déposée seront restitués aux importateurs.

[241] Si, en revanche, le TCCE conclut que le dumping a causé un dommage ou un retard ou menace de causer un dommage, des droits antidumping équivalents à la marge de dumping seront imposés, perçus et payés sur les importations de TSAC de même description que ceux visés par les conclusions du TCCE.

[242] Aux fins de la décision provisoire, l’ASFC doit déterminer si le volume réel ou éventuel des marchandises importées est négligeable. Après la décision provisoire de dumping, c’est le TCCE qui assumera cette responsabilité. Le paragraphe 42(4.1) de la LMSI dit que, lorsqu’il conclut que le volume des marchandises sous-évaluées provenant d’un pays donné est négligeable, le TCCE doit mettre fin à l’enquête sur ces marchandises.

Droits rétroactifs sur les importations massives

[243] Il est parfois possible d’imposer des droits antidumping rétroactifs sur les marchandises en cause importées au Canada. Lorsque le TCCE mène son enquête sur le dommage sensible causé à la branche de production nationale, il peut se demander si les marchandises sous-évaluées importées un peu avant ou après l’ouverture de l’enquête constituent des importations massives sur une courte période ayant causé un dommage à la branche de production nationale. S’il conclut par l’affirmative, les importations de marchandises en cause dédouanées auprès de l’ASFC dans les 90 jours précédant la date de la décision provisoire pourraient être frappées de droits antidumping.

Engagements

[244] Après que l’ASFC a pris une décision provisoire de dumping, sauf dans les cas où il est déterminé que la marge de dumping est minimale, un exportateur peut prendre l’engagement écrit de réviser ses prix de vente au Canada de façon à éliminer la marge de dumping ou le dommage. Seuls sont acceptables les projets d’engagements qui englobent toutes les exportations ou presque de marchandises sous-évaluées vers le Canada.

[245] Vu le temps qu’il faut pour les étudier, les projets d’engagement par écrit doivent être présentés le plus tôt possible, au plus tard 60 jours après la décision provisoire de dumping. Voir le mémorandum D14-1-9 de l’ASFC, disponible en ligne à l’adresse suivante : http://www.cbsa-asfc.gc.ca/publications/dm-md/d14/d14-1-9-fra.html.

[246] Après le dépôt d’un projet d’engagement, les parties intéressées ont neuf jours pour formuler leurs observations. L’ASFC tiendra une liste des parties intéressées, et les avisera des projets reçus. Les parties désirant être avisées peuvent fournir leur nom, leur numéro de téléphone, leur adresse postale et leur adresse électronique à l’un des agents dont le nom figure ci-après dans la section « Renseignements ».

[247] Dès l’acceptation d’un engagement, l’enquête et la perception des droits provisoires sont suspendues. Mais même alors, un exportateur peut demander que l’ASFC termine son enquête en dumping, et le TCCE, sa propre enquête en dommage.

Publication

[248] Un avis de la décision provisoire de dumping sera publié dans la Gazette du Canada, comme le veut l’alinéa 38(3)a) de la LMSI.

Renseignements

[249] Le présent Énoncé des motifs est publié sur le site Web de l’ASFC à l’adresse ci-dessous. Voir ci-dessous à qui s’adresser pour en savoir plus.

Renseignements

Adresse :

Centre de dépôt et de communication des documents de la LMSI
Direction des programmes commerciaux et antidumping
Agence des services frontaliers du Canada
100, rue Metcalfe, 11e étage
Ottawa (Ontario)  K1A 0L8
Canada

Téléphone :
  • Laurie Trempe : 613-954-7337
Courriel :

simaregistry-depotlmsi@cbsa-asfc.gc.ca

Site web :

www.cbsa-asfc.gc.ca/sima-lmsi/menu-fra.html

Le directeur général
Direction des programmes commerciaux et antidumping
Doug Band

Annexe 1 - Sommaire des marges estimatives de dumping et des droits provisoires

Le tableau ci-dessous résume les marges estimatives de dumping et les droits provisoires exigibles pour chaque exportateur comme suite à la décision susmentionnée. Les droits provisoires ci-dessous s’appliquent aux importations de marchandises en cause dédouanées par l’Agence des services frontaliers du Canada à compter du 18 octobre 2018.

Pays d’origine ou d’exportation Marge de dumping estimative* Total des droits provisoires à payer*
Pakistan    
International Industries 10,1 % 10,1 %
Tous les autres exportateurs 58,0 % 58,0 %
Philippines    
HLD Clark 3,8 % 3,8 %
Tous les autres exportateurs 30,1 % 30,1 %
Turquie    
Borusan 4,9 % 4,9 %
Erbosan 3,0 % 3,0 %
Iris 49,0 % 49,0 %
Tous les autres exportateurs 95,0 % 95,0 %
Vietnam    
Hoa Phat 10,6 % 10,6 %
SeAH Vina 12,4 % 12,4 %
State Pipe 10,0 % 10,0 %
Tous les autres exportateurs 47,7 % 47,7 %

*En pourcentage du prix à l’exportation

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