NIT 2018 IN
Certaines capsules de nitisinone
Énoncé des motifs

Ottawa, le 4 avril 2019

De la décision définitive de dumping à l’égard de certaines capsules de nitisinone en provenance de la Suède.

Décision

Le 20 mars 2019, conformément à l’alinéa 41(1)b) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, l’Agence des services frontaliers du Canada a rendu une décision définitive de dumping concernant certaines capsules de nitisinone en provenance de la Suède.

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Résumé de l'affaire

[1] Le 2 août 2018, l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) a reçu une plainte écrite de Laboratoires KABS Inc. et de sa société affiliée MendeliKABS Inc. de Saint-Hubert, au Québec (ci-après « la plaignante »), selon laquelle les importations de certaines capsules de nitisinone de la Suède sont sous-évaluées. La plaignante allègue que le dumping a causé et menace de causer un dommage à la branche de production nationale qui produit des marchandises similaires.

[2] Le 23 août 2018, conformément à l’alinéa 32(1)a) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation (LMSI), l’ASFC a informé la plaignante que le dossier de plainte était complet. L’ASFC a aussi prévenu le gouvernement de la Suède en ce sens.

[3] La plaignante a fourni des éléments de preuve appuyant l’allégation selon laquelle la nitisinone en provenance de la Suède est sous-évaluée. Les éléments de preuve indiquent aussi, de façon raisonnable, que le dumping a causé et menace de causer un dommage à la branche de production nationale.

[4] Le 21 septembre 2018, conformément au paragraphe 31(1) de la LMSI, l’ASFC a ouvert une enquête en dumping sur la nitisinone originaire ou exportée de la Suède.

[5] Sitôt avisé de l’ouverture de l’enquête, le Tribunal canadien du commerce extérieur (TCCE) a ouvert sa propre enquête préliminaire en dommage conformément au paragraphe 34(2) de la LMSI pour savoir si le présumé dumping de la nitisinone a causé un dommage ou un retard ou menace de causer un dommage à la branche de production nationale.

[6] Le 20 novembre 2018, conformément au paragraphe 37.1(1) de la LMSI, le TCCE a rendu une décision provisoire comme quoi les éléments de preuve indiquent, de façon raisonnable, que le dumping de la nitisinone en provenance de la Suède a causé ou menace de causer un dommage à la branche de production nationale.

[7] Le 20 décembre 2018, par suite de son enquête préliminaire et conformément au paragraphe 38(1) de la LMSI, l’ASFC a rendu une décision provisoire de dumping concernant la nitisinone originaire ou exportée de la Suède. Le même jour, conformément au paragraphe 8(1) de la LMSI, des droits provisoires ont été imposés sur les importations de marchandises sous-évaluées de même description que celles auxquelles la décision s’applique et qui seraient dédouanées dans la période commençant le jour de la décision provisoire pour se terminer le jour où, soit l’ASFC mettrait fin à l’enquête pour n’importe quelles marchandises au titre du paragraphe 41(1) de la LMSI, soit le TCCE rendrait une ordonnance ou des conclusions au titre du paragraphe 43(1) de la même loi, selon la première éventualité.

[8] Le 21 décembre 2018, le TCCE a ouvert une enquête en vertu de l’article 42 de la LMSI pour déterminer si le dumping des marchandises susmentionnées a causé un dommage ou un retard ou bien menace de causer un dommage à la branche de production nationale.

[9] Les éléments de preuve ont convaincu l’ASFC que la nitisinone originaire ou exportée de la Suède est sous-évaluée. Par conséquent, le 20 mars 2019, l’ASFC a rendu une décision définitive de dumping concernant ces marchandises en vertu de l’alinéa 41(1)b) de la LMSI.

[10] Poursuivant sa propre enquête sur la question du dommage causé à la branche de production nationale, le TCCE rendra sa décision d’ici le 18 avril 2019. Des droits provisoires continueront à être imposés sur les marchandises en cause en provenance de la Suède jusqu’à ce que le TCCE rende sa décision.

Période visée par l’enquête

[11] La période visée par l’enquête (PVE) va du 1er janvier 2018 au 30 juin 2018.

Période d’analyse de rentabilité

[12] La période d’analyse de rentabilité (PAR) pour l’enquête va du 1er janvier 2018 au 30 juin 2018.

Parties intéressées

Plaignante

[13] Fondée en 1997, Laboratoires KABS Inc. est une entreprise spécialisée dans le développement de médicaments et la fabrication en sous-traitance. Le siège social et les installations de production de Laboratoires KABS Inc. sont situés à Longueuil, au Québec. MendeliKABS Inc. est une société affiliée qui est le promoteur de la nitisinone produite par Laboratoires KABS Inc. et elle a obtenu une autorisation de mise en marché et une homologation de Santé Canada. La plaignante est le seul producteur de nitisinone au Canada.

[14] Ses coordonnées sont les suivantes :

Laboratoires KABS Inc.
4500, rue de Tonnancour
Saint-Hubert (Québec)
J3Y 9G2

MendeliKABS Inc.
4601, rue de Tonnancour
Saint-Hubert (Québec)
J3Y 9J3

Syndicat

[15] La plaignante a indiqué qu’aucun syndicat ne représente les personnes employées dans la production des capsules de nitisinone au Canada.

Importateurs

[16] L’ASFC a recensé au début de l’enquête cinq importateurs potentiels des marchandises en cause au moyen de ses documents d’importation et des renseignements fournis dans la plainte. Elle a adressé à tous les importateurs potentiels une demande de renseignements (DDR)Note de bas de page 1 concernant leurs importations de nitisinone en provenance de la Suède.

[17] Une entreprise, Sobi Canada Inc. (Sobi Canada), a répondu à la DDR pour importateursNote de bas de page 2. L’ASFC a adressé à l’entreprise deux demandes de renseignements supplémentaires (DDRS) pour obtenir des éclaircissements et des compléments de réponses. Sobi Canada a répondu aux DDRSNote de bas de page 3 qui lui ont été adressées, et des agents de l’ASFC ont ensuite effectué une vérification dans les locaux de la société mère de Sobi Canada à Stockholm, en Suède.

[18] Les quatre autres parties à qui une DDR a été envoyée ont indiqué ne pas avoir importé les marchandises en cause dans la PVE. Deux d’entre elles, Mapi Life Sciences Canada Inc. et MSD/GMD, ont exercé certains rôles et responsabilités dans le processus de vente de Sobi Canada en ce qui concerne le contrôle de la qualité et la distribution des marchandises. Les deux autres, l’Hôpital Sainte-Justine et SigmaSanté, sont respectivement l’acheteur non associé des marchandises en cause et l’entité responsable du processus d’appel d’offres pour l’approvisionnement en nitisinone au QuébecNote de bas de page 4.

[19] D’après l’information au dossier, l’ASFC considère que Sobi Canada est l’importateur des marchandises en cause aux fins de la LMSI. C’est pourquoi dans l’enquête qui nous intéresse l’ASFC a désigné Sobi Canada comme l’importateur des marchandises en cause importées dans la PVE.

Exportateurs

[20] L’ASFC a recensé au début de l’enquête un exportateur, Swedish Orphan Biovitrum AB (Sobi AB), et un fabricant en sous-traitance, Apotek Produktion & Laboratorier, des marchandises en cause au moyen de ses documents d’importation et des renseignements fournis dans la plainte. Elle a adressé à ces deux entreprises une DDR en dumpingNote de bas de page 5.

[21] Une entreprise, Sobi AB, a fait une réponse essentiellement complète à la DDR en dumping de l’ASFCNote de bas de page 6. Sobi AB est la société mère de Sobi Canada. Dans sa réponse, Sobi AB a indiqué qu’elle considère être l’importateur, l’exportateur et le fabricant des marchandises en cause. L’ASFC a adressé à l’entreprise une DDRS pour obtenir des éclaircissements et des compléments de réponses. Sobi AB a répondu à la DDRSNote de bas de page 7, et des agents de l’ASFC ont ensuite effectué une vérification dans les locaux de Sobi AB à Stockholm, en Suède.

[22] D’après l’information au dossier, Sobi AB est considérée comme l’exportateur des marchandises en cause aux fins de la LMSI.

[23] L’autre partie à qui une DDR a été envoyée, Apotek Produktion & Laboratorier, a répondu être ni exportateur ni producteur des marchandises en cause.

Les produits

DéfinitionNote de bas de page 8

[24] Aux fins de la présente enquête, les marchandises en cause sont définies comme suit :

Capsules et comprimés de nitisinone de dosage de 2 mg, 5 mg, 10 mg et 20 mg, conditionnés ou non pour la vente au détail, originaires ou exportés du Royaume de Suède.

PrécisionsNote de bas de page 9

[25] Les marchandises en cause sont communément appelées des capsules de nitisinone (NIT). Le nom chimique ainsi que la molécule active de la nitisinone sont 2-(2-Nitro-4-Trifluorométhyl-Benzoyl)-1,3-Cyclohexanedione (« NTBC ») et sa formule moléculaire est C14H10F3NO5.

[26] La nitisinone est une drogue qui est approuvée pour le traitement de la tyrosinémie hépatorénale de type 1 (HT-1). La HT-1 est une maladie métabolique rare qui affecte environ 1 000 personnes à l’échelle mondiale. La prévalence de la maladie est particulièrement élevée au Québec, où environ 100 personnes reçoivent la nitisinone comme traitement pour la HT-1.

[27] La nitisinone est un médicament pour administration par la voie orale. Les capsules contiennent une poudre composée de nitisinone et une substance inerte au plan pharmacologique. Ces médicaments sont vendus en pharmacie hospitalière et communautaire sur ordonnance médicale.

[28] La définition de produits comprend la nitisinone emballée au moment de son importation pour la consommation au détail, c’est-à-dire emballée dans des contenants de plastique ou de verre avec un compte précis d’unités de capsules. Généralement, ces contenants contiennent soixante (60) unités de capsules de même dosage. Des contenants de type « blister packs » sont aussi inclus ainsi que des contenants qui contiendraient plus ou moins de 60 capsules.

[29] Cette définition comprend aussi la nitisinone qui n’est pas présentée, au moment de son importation, comme conditionnée pour la vente au détail, c’est-à-dire dans de contenants en vrac destinés à l’embouteillage ou à l’emballage au Canada.

[30] La définition de produits ne comprend pas les produits de nitisinone en suspension liquide.

FabricationNote de bas de page 10

[31] Le procédé de fabrication de la nitisinone peut être subdivisé en deux éléments, c’est-à-dire la production des ingrédients médicinaux de la nitisinone et l’assemblage des ingrédients dans une capsule.

[32] D’abord, le composé chimique de la nitisinone est synthétisé dans des conditions de laboratoire contrôlées. Puis, il est combiné avec une substance inerte et encapsulé selon les proportions souhaitées. Les ingrédients non médicinaux utilisés par la plaignante comprennent l’amidon de maïs, le dioxyde de titane, la gélatine, la gomme-laque et l’oxyde de fer. Les ingrédients non médicinaux utilisés par le fabricant des marchandises en cause diffèrent légèrement, mais cela n’influe pas sur l’interchangeabilité des produits. Les capsules assemblées sont ensuite embouteillées dans des contenants en plastique, chacun contenant 60 unités du dosage spécifié.

Classement des importations

[33] Les marchandises en cause sont habituellement classées sous les numéros de classement tarifaire suivants (numéros tarifaires) :

  • 3003.90.00.90
  • 3004.90.00.79
  • 3004.90.00.90

[34] Les numéros ci-dessus sont fournis à titre purement informatif. Ils n’incluent pas toutes les marchandises en cause et, inversement, ils incluent des marchandises non en cause. Seule la définition de produits fait autorité au sujet des marchandises en cause.

Marchandises similaires et catégorie unique

[35] Le paragraphe 2(1) de la LMSI définit les « marchandises similaires » comme des marchandises identiques aux marchandises en cause ou, à défaut, dont l’utilisation et les autres caractéristiques sont très proches de celles des marchandises en cause.

[36] Lorsqu’il se demande si des marchandises nationales sont « similaires », le TCCE a l’habitude de considérer plusieurs facteurs, dont leurs caractéristiques matérielles, leur marché, et le fait qu’elles satisfassent ou non au même besoin que les marchandises en cause.

[37] Ayant étudié les questions d’utilisation, les caractéristiques matérielles et tous les autres facteurs pertinents, l’ASFC a démarré son enquête sur l’hypothèse que la nitisinone produite au Canada était « similaire » aux marchandises en cause. Elle estimait également que les marchandises en cause et les marchandises similaires formaient une seule et même catégorie de marchandises.

[38] En l’espèce, le TCCE s’est encore penché sur la question des marchandises similaires et des catégories de marchandises dans son enquête préliminaire de dommage. Dans l’exposé des motifs de sa décision provisoire, publié le 5 décembre 2018, il a indiqué que « les capsules de nitisinone produites par la branche de production nationale de même description que les marchandises en question sont des "marchandises similaires" par rapport aux marchandises en question et constituent une seule et même catégorie de marchandise »Note de bas de page 11.

Branche de production nationale

[39] La plaignante s’inscrit comme le seul producteur de nitisinone au Canada et elle est à l’origine de la totalité de la production nationale des marchandises similairesNote de bas de page 12.

Importations au Canada

[40] À la phase finale de l’enquête, l’ASFC a précisé son estimation du volume et de la valeur des importations à la lumière de ses documents de déclaration ainsi que des réponses de Sobi AB et de Sobi Canada.

[41] Ci-dessous, la distribution des importations de nitisinone selon l’ASFC aux fins de la décision définitive :

Importations de nitisinone au Canada
(PVE : du 1er janvier 2018 au 30 juin 2018)
Pays d’origine/exportation % du volume total des importations
Suède 100,0 %
Tous les autres pays S. o.
Total des importations 100,0 %

Déroulement de l’enquête

[42] L’ASFC a adressé à tous les exportateurs, producteurs, vendeurs et importateurs, connus et potentiels, des questionnaires sur les expéditions de nitisinone dédouanées au Canada dans la PVE.

[43] Au moyen de la DDR en dumping, l’ASFC a aussi prévenu les parties que le défaut de suivre toutes les instructions, de fournir tous les renseignements et les documents requis, y compris les versions non confidentielles, et notamment lors des visites sur place, ou encore de permettre la vérification de tout renseignement, les exposerait à ce que leurs marge de dumping et droits antidumping soient déterminés d’après les faits connus – et donc peut-être à leur désavantage.

[44] Après examen des réponses aux DDR initiales, l’ASFC a envoyé des DDRS à Sobi Canada et à Sobi AB pour obtenir des éclaircissements et des compléments de réponses jugés nécessaires pour l’enquête.

[45] Une vérification a été effectuée dans les locaux de Sobi AB à Stockholm, en Suède.

[46] Les renseignements présentés par Sobi AB en réponse à la DDR en dumping ainsi que les résultats de l’enquête en dumping de l’ASFC sont détaillés à la section Enquête en dumping du présent document.

[47] À la phase finale de l’enquête, des mémoires et des contre-exposés ont été reçus des avocats représentant la plaignante et l’importateur/exportateur. Toutes les observations sont détaillées à l’annexe 2.

Enquête en dumping

[48] Ci-dessous, les résultats de l’enquête en dumping sur la nitisinone originaire ou exportée de la Suède.

Valeurs normales

[49] Les valeurs normales s’établissent généralement, soit selon l’article 15 de la LMSI d’après le prix de vente intérieur de marchandises similaires dans le pays exportateur, soit selon l’alinéa 19(b) de la même loi, comme étant la somme du coût de production, d’un montant raisonnable pour les frais, notamment les frais administratifs et les frais de vente, et d’un montant raisonnable pour les bénéfices.

[50] Quand les renseignements fournis ou disponibles ne lui semblent pas suffisants, l’ASFC détermine les valeurs normales par prescription ministérielle en vertu du paragraphe 29(1) de la LMSI.

Prix à l’exportation

[51] Le prix à l’exportation des marchandises vendues à des importateurs au Canada s’établit généralement selon la méthode prévue à l’article 24 de la LMSI, comme étant la valeur la plus basse entre le prix de vente rectifié de l’exportateur et le prix d’achat rectifié de l’importateur. Ces prix sont rectifiés au besoin par déduction des frais, des droits et des taxes découlant de l’exportation des marchandises conformément aux sous-alinéas 24a)(i) à (iii).

[52] Si une relation ou un arrangement compensatoire existe, le prix à l’exportation peut être déterminé d’après le prix auquel l’importateur revend les marchandises à des parties sans lien particulier avec lui, moins tous les coûts de préparation, d’expédition et d’exportation qu’on n’aurait pas eu à engager pour vendre dans le pays exportateur même, tous les frais engagés pour la revente (droits et taxes compris) ou rattachés à l’assemblage des marchandises au Canada, et un montant représentatif du bénéfice moyen de l’industrie au Canada, au titre des alinéas 25(1)c) et d) de la LMSI. Dans les cas auxquels ces deux alinéas ne s’appliquent pas, le prix à l’exportation est fixé par prescription ministérielle en vertu de l’alinéa 25(1)e).

[53] Quand les renseignements fournis ou disponibles ne lui semblent pas suffisants, l’ASFC détermine les prix à l’exportation par prescription ministérielle en vertu du paragraphe 29(1) de la LMSI.

Marges de dumping

[54] La marge de dumping par exportateur est égale à l’excédent de la valeur normale totale sur le prix à l’exportation total des marchandises, exprimé en pourcentage de celui-ci. Toutes les marchandises en cause importées au Canada dans la PVE entrent dans ce calcul. Et si la valeur normale totale ne dépasse pas le prix à l’exportation total, la marge de dumping est nulle (0 %).

Résultats de l’enquête en dumping

Swedish Orphan Biovitrum AB (Sobi AB)

[55] Sobi AB, de Stockholm, en Suède, est un producteur et exportateur des marchandises en cause. Il s’agit d’une société publique suédoise à responsabilité limitée qui est cotée à la bourse Nasdaq Stockholm. Sobi AB est une société biotechnologique intégrée dont les capacités internes englobent l’ensemble de la chaîne de valeur : recherche, développement préclinique et clinique, fabrication et fourniture de produits biologiques, accès des patients et distribution.

[56] Sobi AB a répondu à la DDR en dumping de l’ASFCNote de bas de page 13 et à une DDRS visant à obtenir des éclaircissements et des compléments de réponsesNote de bas de page 14. Des agents de l’ASFC ont aussi effectué une vérification dans les locaux de Sobi ABNote de bas de page 15. L’exposé de Sobi AB a été jugé essentiellement complet et fiable aux fins de la décision définitive.

[57] Sobi AB a réalisé des ventes intérieures de marchandises similaires dans la PAR. Les valeurs normales ont été établies, soit selon l’article 15 de la LMSI d’après les prix de vente intérieurs de marchandises similaires, soit selon l’alinéa 19b) de la même loi, comme étant la somme du coût de production, d’un montant raisonnable pour les frais, notamment les frais administratifs et les frais de vente, et d’un montant raisonnable pour les bénéfices.

[58] À cette fin, le coût de production a été établi selon l’alinéa 11(1)a) du Règlement sur les mesures spéciales d’importation (RMSI) d’après les données non vérifiées de Sobi AB sur les coûts rattachés aux marchandises en cause expédiées au Canada; le montant pour les frais, notamment les frais administratifs et les frais de vente, a été établi selon le sous-alinéa 11(1)c)(i) du RSMI; et le montant pour les bénéfices a été établi selon le sous-alinéa 11(1)b)(i) du RMSI d’après les ventes de marchandises similaires de Sobi AB réalisées sur son marché intérieur dans la PAR.

[59] Pour les marchandises en cause exportées au Canada dans la PVE, l’ASFC a jugé que le prix à l’exportation déterminé selon l’article 24 de la LMSI n’est pas fiable en raison de l’arrangement compensatoire qui existe selon le sous-alinéa 25(1)b)(ii) de la même loi. C’est pourquoi les prix à l’exportation ont été déterminés selon l’alinéa 25(1)c) ou e).

[60] Pour les marchandises en cause qui ont ensuite été vendues par l’importateur dans la PVE, les prix à l’exportation ont été déterminés selon l’alinéa 25(1)c) de la LMSI d’après les prix de vente de l’importateur à une partie non associée, rectifiés par la déduction des coûts engagés par l’importateur à compter de l’importation des marchandises ou jusqu’à leur vente, d’un montant pour les bénéfices de l’importateur, des frais entraînés par la préparation des marchandises en vue de leur expédition vers le Canada, et des frais découlant de l’exportation et de l’expédition des marchandises. Le montant pour les bénéfices a été déterminé selon l’alinéa 22c) du RMSI d’après les dernières données sur les bénéfices dont disposait l’ASFC. Il a été établi à 17,85 %Note de bas de page 16, ce qui représente les bénéfices des grossistes-marchands de produits et de fournitures pharmaceutiques en 2016 d’après un rapport produit par Industrie Canada.

[61] Pour les marchandises en cause qui ont été importées, mais qui n’ont pas été vendues par l’importateur dans la PVE, les prix à l’exportation ont été déterminés selon l’alinéa 25(1)e) de la LMSI par le calcul du prix à l’exportation moyen pondéré de chaque dosage vendu par l’importateur dans la PVE selon la méthode prévue à l’alinéa 25(1)c).

[62] Aux fins de la décision définitive, la comparaison de la valeur normale totale avec le prix à l’exportation total donne pour Sobi AB une marge de dumping qui s’élève à 1 594 % du prix à l’exportation.

Sommaire des résultats

[63] Sont présentés sommairement ci-dessous les résultats de l’enquête en dumping pour toutes les marchandises en cause dédouanées au Canada dans la PVE (voir aussi l’annexe 1).

Sommaire de la marge de dumping
(PVE : du 1er janvier 2018 au 30 juin 2018)
Pays d’origine ou d’exportation Marge de dumping
(en % du prix à l’exportation)
Volume de marchandises en cause en % du total des importations
Suède
Sobi AB 1 594 % 100 %
Tous les autres exportateurs S. o. 0 %

[64] L’alinéa 41(1)a) de la LMSI exige que l’ASFC mette fin à l’enquête au sujet des marchandises d’un exportateur donné si elle acquiert la conviction que celles-ci ne sont pas sous-évaluées ou qu’elles ne le sont que pour une marge de dumping minimale (moins de 2 % du prix à l’exportation).

[65] Comme on le voit dans le tableau ci-dessus, les marchandises visées par l’enquête sont sous-évaluées et la marge de dumping dépasse le seuil de 2 % et n’est donc pas minimale. Les conditions légales sont réunies pour une décision définitive de dumping.

Décision

[66] Le 20 mars 2019, conformément à l’alinéa 41(1)b) de la LMSI, l’ASFC a rendu une décision définitive de dumping concernant la nitisinone originaire ou exportée de la Suède.

Mesures à venir

[67] La période provisoire a commencé le 20 décembre 2018 et se terminera le jour où le TCCE rendra ses conclusions, soit au plus tard le 18 avril 2019. D’ici là, des droits antidumping provisoires continueront à être imposés sur les importations de marchandises en cause en provenance de la Suède. Pour en savoir plus sur l’application des droits provisoires, on consultera l’Énoncé des motifs de la décision provisoire sur le site Web de l’ASFC à l’adresse https://www.cbsa-asfc.gc.ca/sima-lmsi/menu-fra.html.

[68] Si le TCCE conclut que les marchandises sous-évaluées n’ont pas causé de dommage et ne menacent pas non plus d’en causer, toute la procédure prendra fin. En l’occurrence, la totalité des droits provisoires payés ou des garanties déposées seront rendus aux importateurs.

[69] Si, en revanche, le TCCE conclut que les marchandises sous-évaluées ont causé un dommage, les droits antidumping payables sur les marchandises en cause dédouanées par l’ASFC durant la période provisoire seront rendus définitifs, conformément à l’article 55 de la LMSI. Les importations dédouanées par l’ASFC après le jour des conclusions du TCCE seront frappées de droits antidumping équivalents à la marge de dumping.

[70] L’importateur au Canada devra acquitter tous les droits exigibles. Si les importateurs de telles marchandises n’indiquent pas le code LMSI requis ou ne décrivent pas correctement les marchandises dans les documents douaniers, une sanction administrative pécuniaire pourrait être imposée. La Loi sur les douanes régit le paiement, la perception et le remboursement des droits au titre de la LMSI, et prévoit des intérêts pour les paiements en retard.

Droits rétroactifs sur les importations massives

[71] Il est parfois possible d’imposer des droits antidumping rétroactifs sur les marchandises en cause importées au Canada. Lorsque le TCCE mène son enquête sur le dommage sensible causé à la branche de production nationale, il peut se demander si les marchandises sous-évaluées importées un peu avant ou après l’ouverture de l’enquête constituent des importations massives sur une courte période ayant causé un dommage à la branche de production nationale. S’il conclut par l’affirmative, les importations de marchandises en cause dédouanées auprès de l’ASFC dans les 90 jours précédant la date de la décision provisoire pourraient être frappées de droits antidumping.

Publication

[72] Un avis de la décision définitive de dumping sera publié dans la Gazette du Canada, comme le veut l’alinéa 41(3)a) de la LMSI.

Renseignements

[73] Le présent Énoncé des motifs est publié sur le site Web de l’ASFC à l’adresse ci-dessous. Voir ci-dessous à qui s’adresser pour en savoir plus.

Renseignements

Adresse :

Centre de dépôt et de communication des documents de la LMSI
Direction des programmes commerciaux et antidumping
Agence des services frontaliers du Canada
100, rue Metcalfe, 11e étage
Ottawa (Ontario)  K1A 0L8
Canada

Téléphone :
  • Hugo Dumas : 613-954-7262
  • Jonathan Thiffault : 613-948-7809
Courriel :

simaregistry-depotlmsi@cbsa-asfc.gc.ca

Site web :

www.cbsa-asfc.gc.ca/sima-lmsi/

Le directeur général
Direction des programmes commerciaux et antidumping
Doug Band

Annexe 1 – Sommaire de la marge de dumping

Le tableau ci-dessous résume la marge estimative de dumping et les droits provisoires exigibles en conséquence de la décision susmentionnée. Les droits provisoires ci-dessous s’appliquent aux importations de marchandises en cause dédouanées par l’Agence des services frontaliers du Canada à compter du 20 décembre 2018.

Pays d’origine ou d’exportation Marge de dumping*
Suède
Swedish Orphan Biovitrum AB 1 594 %
Tous les autres exportateurs S. o.

*En pourcentage du prix à l’exportation.

Remarque : La marge de dumping indiquée dans le tableau ci-dessus a été établie par l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) aux fins de la décision définitive. Elle pourrait ne pas correspondre aux montants de droits antidumping à percevoir sur les importations futures de marchandises sous-évaluées. Au cas où le Tribunal canadien du commerce extérieur (TCCE) conclurait à un dommage, des valeurs normales pour les expéditions futures vers le Canada ont été attribuées aux exportateurs ayant fourni des renseignements suffisants à l’ASFC. Ces valeurs normales entreraient en vigueur le jour suivant des conclusions de dommage. Il faudra obtenir les renseignements sur les valeurs normales pour les marchandises en cause auprès des exportateurs concernés. Les importations faites auprès de tout autre exportateur seront assujetties à des droits antidumping fixés par prescription ministérielle, égaux à la marge de dumping calculée pour « tous les autres exportateurs » au moment de la décision définitive.

Le Guide d’autocotisation LMSI explique comment déterminer les droits exigibles en vertu de la LMSI.

Il n’est pas d’usage d’appliquer des valeurs normales rétroactivement, mais cela peut arriver quand les parties n’avisent pas l’ASFC à temps de changements majeurs qui se répercutent sur les valeurs pour l’application de la LMSI. Quand les prix, les conditions du marché, ou bien les coûts de production ou de vente subissent des changements qui portent à conséquence, il incombe aux parties concernées d’en avertir l’ASFC.

Annexe 2 – Observations

Le 7 décembre 2018, un exposé contenant un mémoire a été reçu au nom de Swedish Orphan Biovitrum AB (Sobi AB) et de Sobi Canada Inc. (Sobi Canada)Note de bas de page 17 (collectivement « Sobi »).

À la clôture du dossier le 4 février 2019, l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) a reçu des mémoires au nom de Laboratoires KABS Inc. et MendeliKABS Inc. (la plaignante)Note de bas de page 18 et de SobiNote de bas de page 19.

À l’échéance pour la présentation des contre-exposés le 11 février 2019, l’ASFC a reçu des contre-exposés au nom de toutes les partiesNote de bas de page 20Note de bas de page 21.

Certains renseignements fournis dans les mémoires et les contre-exposés ont été désignés confidentiels par les avocats qui les ont présentés. Cela a limité la capacité de l’ASFC de discuter de toutes les questions soulevées dans ces exposés.

L’ASFC a fourni les réponses ci-dessous aux observations concernant la décision définitive de dumping. Elle ne donnera pas suite aux observations concernant l’exécution future du présent Énoncé des motifs.

Les questions importantes soulevées par les parties se résument comme suit :

Observations

Le producteur des marchandises en cause

Mémoire

Dans un exposé reçu par l’ASFC le 7 décembre 2018, l’avocat de Sobi affirme que Sobi AB est le producteur des marchandises en cause en Suède, puisqu’il est à l’origine de la production des marchandises, détient les droits de propriété intellectuelle et de production des capsules de nitisinone, et est propriétaire des marchandises en cause durant tout le processus de productionNote de bas de page 22. Bien que Sobi AB ait recours à des fournisseurs de services pour la synthèse de l’ingrédient pharmaceutique, l’encapsulage et l’emballage final des marchandises, l’avocat soutient que les ententes avec ces fournisseurs sont, en fait, des contrats d’achat fermeNote de bas de page 23. L’avocat ajoute que, selon le Guide LMSI, les fournisseurs visés par de tels contrats ne peuvent pas être considérés comme les exportateurs et, par extension, les producteurs des marchandises.

Contre-exposés

L’avocat de la plaignante soutient que l’ASFC ne dispose pas de tous les renseignements nécessaires pour confirmer que Sobi AB conserve la propriété des marchandises en tout temps, puisque que les producteurs en sous-traitance n’ont pas répondu à la Demande de renseignements (DDR) de l’ASFC. C’est pourquoi l’avocat soutient que l’information présentée à l’ASFC par Sobi AB devrait être considérée comme incomplèteNote de bas de page 24.

L’avocat de Sobi AB répond que Sobi a pleinement coopéré avec l’ASFC et a fourni tous les renseignements qui lui ont été demandés. L’avocat soutient que l’ASFC peut se fier à l’information de Sobi qui figure au dossierNote de bas de page 25.

Position de l’ASFC

D’après l’information au dossier, l’ASFC a jugé que Sobi AB est le producteur des marchandises.

Détermination des valeurs normales selon l’article 15 de la LMSI

Mémoire

L’avocat de Sobi a formulé un certain nombre d’observations concernant la détermination des valeurs normales au titre de l’article 15 de la LMSI. En particulier, il soutient que le contrôle gouvernemental, sous forme de processus d’appel d’offres pour médicaments d’ordonnance dirigé par le gouvernement et de réglementation gouvernementale empêchant les hausses de prix, sans compter le remboursement de la nitisinone prévu par le régime de prestations de la Suède, fait en sorte que les ventes de nitisinone en Suède ne répondent pas à l’exigence de l’alinéa 15c) de la LMSI, c’est-à-dire que les ventes soient réalisées en situation de concurrence. De plus, l’avocat de Sobi soutient que les ventes de Sobi AB en Suède ne peuvent pas servir à déterminer les valeurs normales, puisqu’elles ne répondent pas à l’exigence de l’alinéa 16(2)a), c’est-à-dire que des ventes intérieures à plusieurs parties non associées soient réalisées à peu près au même momentNote de bas de page 26.

Contre-exposés

L’avocat de la plaignante a formulé des observations concernant l’alinéa 15c) de la LMSI au sujet des ventes intérieures réalisées en situation de concurrence. Il soutient que le marché intérieur de l’exportateur, bien qu’il soit réglementé, demeure concurrentiel, puisqu’aucun élément de preuve à l’appui de l’existence d’une situation particulière du marché selon la définition prévue à l’alinéa 16(2)c) de la LMSI n’a été fourniNote de bas de page 27. En ce qui concerne l’alinéa 16(2)a), l’avocat de la plaignante affirme qu’aucune disposition de la LMSI ne prévoit de périodes de soixante jours au moment de la sélection de ventes intérieures comparables, et que l’ASFC devrait sélectionner une période pertinente en fonction de l’information propre à l’enquête.

L’avocat de Sobi répond que la plaignante n’explique pas comment l’ASFC pourrait se fier aux prix du marché suédois en l’absence de ventes à plusieurs clients non associés réalisées à peu près au même moment. Par ailleurs, l’avocat de Sobi soutient que la plaignante n’a pas fourni d’élément de preuve quelconque pour réfuter ses arguments. L’avocat de Sobi soutient que la réglementation des médicaments en Suède a un effet de distorsion sur les prix, surtout en raison de l’incapacité des fournisseurs de hausser ceux-ci. L’avocat ajoute que cette incapacité et les conséquences qui en découlent (les fournisseurs sont dissuadés de réduire irrévocablement les prix) font en sorte que les prix sur le marché suédois ne sont pas soumis au jeu de l’offre et de la demande, comme l’exige l’alinéa 15c) de la LMSI, ce marché ne pouvant donc pas servir à la détermination des valeurs normalesNote de bas de page 28.

Position de l’ASFC

L’article 15 de la LMSI énumère les exigences à respecter pour la détermination des valeurs normales en fonction du prix de marchandises similaires sur le marché intérieur de l’exportateur. En particulier, aux termes de l’alinéa 15c), l’ASFC ne doit prendre en compte que les ventes réalisées dans le cours ordinaire des affaires pour consommation dans le pays d’exportation en situation de concurrence.

Bien que le secteur industriel des médicaments d’ordonnance en Suède soit réglementé, l’ASFC a jugé que les ventes intérieures de Sobi AB ont été réalisées dans le cours ordinaire des affaires, c’est-à-dire conformément aux pratiques commerciales courantes de ce secteur industriel. De plus, puisque les fournisseurs participent aux appels d’offres mensuels, l’ASFC mentionne que les ventes de nitisinone en Suède ont été réalisées en situation de concurrence.

Par conséquent, pour déterminer les valeurs normales selon l’article 15 de la LMSI, l’ASFC était convaincue que toutes les exigences légales ont été respectées, y compris les alinéas 15c) et 16(2)a) de la LMSI.

Les modifications à la LMSI et au RMSI qui sont entrées en vigueur le 26 avril 2018 comprennent des dispositions pour la prise en compte des situations particulières du marché. À ce titre, pour la détermination des valeurs normales selon l’article 15 de la LMSI, l’ASFC doit exclure, conformément à l’alinéa 16(2)c), toute vente de marchandises similaires réalisée dans le pays d’exportation si elle estime qu’une situation particulière du marché existe sur le marché intérieur de l’exportateur, laquelle empêcherait d’effectuer une comparaison utile.

Dans l’enquête qui nous intéresse, d’après l’information au dossier, l’ASFC estime que les éléments de preuve ne sont pas suffisants pour établir l’existence d’une situation particulière du marché en Suède, laquelle empêcherait d’effectuer une comparaison utile des ventes de marchandises similaires réalisées par Sobi AB sur son marché intérieur en Suède avec les ventes de marchandises en cause faites à l’importateur au Canada.

Rectification du niveau du circuit de distribution

Mémoire

L’avocat de Sobi a formulé des observations concernant l’application d’une rectification du niveau du circuit de distribution selon l’article 9 du RMSI. En particulier, il soutient que Sobi AB est responsable de la commercialisation et de la vente des capsules de nitisinone en Suède, tandis que Sobi Canada est entièrement responsable de ces activités au Canada. L’avocat ajoute que, puisque Sobi Canada est un distributeur national au Canada, une rectification du niveau du circuit de distribution s’imposeNote de bas de page 29.

Position de l’ASFC

Après examen des faits au dossier, l’ASFC a jugé qu’une rectification du niveau du circuit de distribution selon l’article 9 du RMSI s’impose. L’ASFC a donc appliqué une rectification du niveau du circuit de distribution aux prix de vente de marchandises similaires à l’égard des frais que Sobi AB a engagés pour les activités liées aux ventes intérieures et que l’exportateur n’a pas engagés pour les ventes faites au Canada.

Détermination des valeurs normales selon l’alinéa 19a) de la LMSI

Mémoire

L’avocat de Sobi soutient que des valeurs normales calculées en fonction des prix de vente de Sobi AB en Norvège selon l’alinéa 19a) refléteraient plus équitablement la valeur marchande des ventes au Canada que celles calculées selon les méthodes prévues à l’article 15 et à l’alinéa 19b) de la LMSINote de bas de page 30. L’avocat ajoute que le bien-fondé d’essayer de fixer un montant raisonnable pour les bénéfices aux fins d’établissement de la valeur normale selon l’alinéa 19b) est douteux, puisque l’alinéa 13a) du RMSI limite la mesure dans laquelle des ventes ne répondant pas aux exigences de l’article 15 et du paragraphe 16(2) peuvent servir à déterminer un montant raisonnable pour les bénéfices.

Le 7 décembre 2018, l’avocat de Sobi a désigné le Danemark et la Finlande comme marchés de remplacement pour la détermination des valeurs normalesNote de bas de page 31. Dans le dernier mémoire présenté le 4 février 2019, l’avocat a désigné la Norvège comme le seul marché de remplacement approprié, s’agissant du seul marché sur lequel Sobi AB vend, à des importateurs non associés et à plusieurs acheteurs, des capsules de nitisinone faisant l’objet d’une concurrence de produits génériquesNote de bas de page 32.

Contre-exposés

L’avocat de la plaignante a aussi formulé des observations au sujet de la détermination des valeurs normales selon l’alinéa 19a) en utilisant le Danemark et la Finlande comme marchés de remplacement. L’avocat soutient que les marchés ne sont pas de taille comparable, puisque les ventes y sont très limitées et n’offrent pas une base comparable aux fins de la LMSI. Par ailleurs, l’avocat soutient que Sobi était le seul soumissionnaire à l’appel d’offres au Danemark, ce qui place Sobi AB en situation de monopoleNote de bas de page 33.

L’avocat de la plaignante affirme que les États-Unis auraient été un meilleur marché de remplacement, puisque le marché fait l’objet d’une concurrence de produits génériques, les prix des capsules de nitisinone y sont publiés, et le nombre de patients prenant le médicament est semblable à celui au CanadaNote de bas de page 34.

L’avocat de Sobi répond que les États-Unis ne peuvent pas servir de pays de remplacement au titre de l’alinéa 19a). L’avocat soutient qu’il existe une différence très importante entre les États-Unis et les autres pays proposés comme pays de remplacement. En effet, l’avocat affirme que les États-Unis ne disposent pas d’un mécanisme public de contrôle des prix. Il ajoute que toutes les ventes de Sobi AB aux États-Unis ont été à un importateur associé et, donc, ne peuvent pas servir à la détermination des valeurs normalesNote de bas de page 35. Par ailleurs, l’avocat de Sobi affirme que l’ASFC n’a pas demandé de données sur les ventes faites aux États-Unis, et que les données non vérifiées sur les prix auxquelles s’est fiée la plaignante ne peuvent pas remplacer des données détaillées et vérifiées. En outre, l’avocat soutient que les prix auxquels s’est fiée la plaignante ne correspondent pas à ceux offerts par Sobi AB et surviennent à un niveau du circuit de distribution loin en aval par rapport à celui auquel Sobi AB vend au Canada; c’est pourquoi on ne peut pas s’y fierNote de bas de page 36.

L’avocat de la plaignante répond que, bien que le marché suédois soit réglementé, il permet une comparaison utile aux fins de la LMSI, puisqu’il tient compte de la situation concurrentielle du producteur et fait l’objet d’une négociation entre producteurs et distributeurs. L’avocat affirme que les médecins et les pharmaciens prescripteurs ont le droit de choisir un produit substituable pour raison d’ordre médical et que les patients ont le droit de demander un médicament de substitution, pourvu qu’ils paient la différence entre le produit remboursé et le produit substitué. L’avocat soutient que le remboursement ultérieur des marchandises par le programme de soins de santé du gouvernement n’est aucunement pertinent aux fins de la LMSINote de bas de page 37.

Enfin, l’avocat de la plaignante affirme que, selon le Guide LMSI, pour l’examen des ventes sur un marché de remplacement, les prix ne doivent pas être inférieurs à ceux de marchandises similaires sur le marché intérieur de l’exportateur. L’avocat ajoute que, selon le Guide LMSI, l’une des principales difficultés liées au recours à un marché de remplacement est le fait que, si l’exportateur fait le dumping de marchandises au Canada, il pourrait aussi le faire sur d’autres marchés, ce qui empêcherait de recourir à ces ventes aux fins de détermination des valeurs normales. L’avocat de la plaignante a étayé cette affirmation par un tableau comparatif des prix de vente de la nitisinone en Norvège et en SuèdeNote de bas de page 38.

Position de l’ASFC

Dans les cas où l’exportateur n’a pas réalisé un nombre suffisant de ventes de marchandises similaires sur son marché intérieur qui remplissent toutes les conditions prévues à l’article 15 de la LMSI, l’ASFC a déterminé les valeurs normales selon l’alinéa 19b), comme étant la somme du coût de production, d’un montant raisonnable pour les frais, notamment les frais administratifs et les frais de vente, et d’un montant raisonnable pour les bénéfices. Le montant pour les bénéfices a été déterminé selon le sous-alinéa 11(1)b)(i) du RMSI.

Identité de l’importateur aux fins de la LMSI

Mémoire

L’avocat de Sobi AB a formulé un certain nombre d’observations concernant l’identité de l’importateur aux fins de la LMSI. En particulier, il soutient que Sobi AB est l’importateur aux fins de la LMSI, puisque les conditions de livraison pour les ventes réalisées sont RDA (« rendu droits acquittés »), que Sobi AB est propriétaire des marchandises à leur entrée au Canada, et qu’il en est responsable jusqu’à leur livraison à l’entrepôt de Sobi Canada. De plus, l’avocat indique que Sobi AB détient la licence canadienne d’établissement pour produits pharmaceutiques, qu’il retient les services du courtier en douane et qu’il contrôle le prix auquel Sobi Canada vend les marchandisesNote de bas de page 39. L’avocat ajoute que la Cour suprême a défini l’importateur comme la partie qui est propriétaire des marchandises durant leur transport vers le Canada, et que le TCCE s’est appuyé sur cette définition dans plusieurs décisionsNote de bas de page 40.

Contre-exposés

L’avocat de la plaignante a aussi formulé des observations concernant l’identité de l’importateur aux fins de la LMSI. En particulier, il affirme qu’aux fins de la décision provisoire, l’ASFC a établi que Sobi Canada est l’importateur selon la LMSI, et que cette décision ne peut pas être renversée aux fins de la décision définitiveNote de bas de page 41.

L’avocat de la plaignante répond aussi au mémoire de Sobi en soutenant que, selon le paragraphe 2(1) de la LMSI, l’importateur se définit comme la personne qui est le véritable importateur des marchandises. L’avocat affirme que cette notion est très différente de la question de l’identité de l’importateur au titre de la Loi sur les douanes. L’avocat renvoie à l’affaire MP-2003-001, en date du 11 mars 2004, demandant une décision concernant l’identité de l’importateur, dans laquelle le TCCE a jugé que l’intention du Parlement était de désigner « l’importateur au Canada » plutôt que simplement « l’importateur »Note de bas de page 42.

L’avocat de Sobi répond à son tour que la décision rendue par l’ASFC aux fins de la décision provisoire n’est pas contraignante. L’avocat affirme que le libellé de l’alinéa 38(1)c) confirme que la personne désignée comme l’importateur aux fins de la décision provisoire est un indice de l’opinion à laquelle le président est alors arrivé d’après les renseignements limités à sa disposition. Par ailleurs, l’avocat soutient que de nouveaux renseignements viennent confirmer que Sobi AB est l’importateurNote de bas de page 43.

Position de l’ASFC

D’après l’information au dossier, l’ASFC estime que Sobi Canada est l’importateur aux fins de la LMSI. C’est pourquoi dans l’enquête qui nous intéresse l’ASFC a désigné Sobi Canada comme l’importateur des marchandises en cause dans la PVE.

Détermination des prix à l’exportation

Mémoire

L’avocat de Sobi AB a formulé un certain nombre d’observations concernant la détermination des prix à l’exportation. En particulier, il affirme que le prix à l’exportation doit être calculé selon l’alinéa 25(1)c) de la LMSI en l’absence de vente véritable à l’importationNote de bas de page 44.

Contre-exposé

L’avocat de la plaignante a aussi formulé des observations concernant la détermination du prix à l’exportation. En particulier, il affirme que ce prix doit être calculé selon l’article 25 de la LMSINote de bas de page 45.

Position de l’ASFC

Quand l’information au dossier était suffisante, le prix à l’exportation des marchandises en cause a été déterminé selon l’alinéa 25(1)c) de la LMSI d’après le prix de vente de l’importateur à une partie non associée, rectifié par la déduction des coûts engagés par l’importateur à compter de l’importation des marchandises ou jusqu’à leur vente, d’un montant pour les bénéfices de l’importateur, des frais entraînés par la préparation des marchandises en vue de leur expédition vers le Canada, et des frais découlant de l’exportation et de l’expédition des marchandises.

Quand le prix à l’exportation des marchandises en cause n’a pas pu être déterminé selon l’alinéa 25(1)c) de la LMSI, il l’a été conformément à l’alinéa 25(1)e) par le calcul du prix à l’exportation moyen pondéré déterminé pour chaque dosage vendu par l’importateur dans la PVE selon la méthode prévue à l’alinéa 25(1)c).

Déductions pour le calcul du prix à l’exportation selon l’article 25

Mémoire

L’avocat de Sobi soutient qu’il faut sélectionner une période spécifique pour calculer les frais de vente de Sobi Canada afin de déterminer le prix à l’exportation selon l’article 25 de la LMSINote de bas de page 46. L’avocat soutient que la PVE a coïncidé avec une période de démarrage et d’adaptation pour Sobi Canada, durant laquelle les coûts de fonctionnement ont été exceptionnellement élevés; c’est pourquoi l’ASFC devrait déduire les frais de fonctionnement enregistrés au cours du deuxième semestre de 2018 pour déterminer le prix à l’exportation selon l’article 25.

Contre-exposé

L’avocat de la plaignante répond que la rectification demandée par Sobi n’est pas raisonnableNote de bas de page 47. L’avocat soutient que Sobi Canada, qui a été constituée en société au Canada le 1er novembre 2015, ne traversait pas une période de démarrage durant la PVE. Par ailleurs, l’avocat affirme que, bien qu’une rectification de la valeur normale pour coûts de démarrage soit prévue aux paragraphes 23(1) de la LMSI et 13.1(1) du RMSI, la LMSI ne contient aucune disposition pour une telle rectification du prix à l’exportation.

Position de l’ASFC

Pour déterminer le prix à l’exportation des marchandises selon l’alinéa 25(1)c) de la LMSI, l’ASFC a déduit les coûts engagés par l’importateur à compter de l’importation des marchandises ou jusqu’à leur vente, un montant pour les bénéfices de l’importateur, les frais entraînés par la préparation des marchandises en vue de leur expédition vers le Canada, et les frais découlant de l’exportation et de l’expédition des marchandises.

Première vente à une partie non associée

Mémoire

L’avocat de la plaignante soutient que McKesson Canada est un distributeur embauché par le Centre Hospitalier Universitaire (CHU) Sainte-Justine comme tiers fournisseur de services de logistique, et qu’elle n’est pas une partie principale à la transaction. C’est pourquoi l’avocat de la plaignante soutient que, selon les dispositions de l’alinéa 25(1)c) de la LMSI, le prix de vente de CHU Sainte-Justine devrait servir de base pour la détermination des prix à l’exportation avec rectification visant à tenir compte des frais administratifs du distributeur au CanadaNote de bas de page 48.

Contre-exposé

L’avocat de Sobi répond que la vente à McKesson Canada représente la première vente à une partie non associée au Canada. L’avocat soutient que le contrat signé avec SigmaSanté pour l’approvisionnement des hôpitaux québécois en nitisinone exige que Sobi fournisse les produits au distributeur désigné de la province. Par ailleurs, l’avocat affirme que Sobi a fourni des bons de commande et des factures liés à ces ventes, et que l’ASFC devrait se servir de cette information pour son analyse des prix à l’exportation au titre de l’article 25Note de bas de page 49.

Position de l’ASFC

D’après l’information au dossier, l’ASFC a jugé que la première vente réalisée par Sobi Canada à une partie non associée a été à McKesson Canada.

Le montant pour les bénéfices selon le sous-alinéa 25(1)c)(ii) de la LMSI

Mémoire

L’avocat de Sobi soutient que le montant pour les bénéfices à déduire du prix de vente de Sobi Canada selon le sous-alinéa 25(1)c)(ii) de la LMSI devrait se fonder sur l’étude des prix de transfert menée par Deloitte et révisée en décembre 2018Note de bas de page 50. L’avocat soutient que l’approche suggérée serait conforme aux exigences des alinéas 22b) et c) du RMSI, s’agissant des meilleurs renseignements sur les bénéfices au dossierNote de bas de page 51.

Contre-exposé

L’avocat de la plaignante répond que l’approche proposée n’est pas conforme aux alinéas 22a) à c) du RMSI, affirmant que le montant pour les bénéfices réalisés sur la vente des marchandises aux fins de rectification selon le sous-alinéa 25(1)c)(ii) de la LMSI doit provenir de ventes faites au CanadaNote de bas de page 52.

Position de l’ASFC

Le montant pour les bénéfices a été déterminé selon l’alinéa 22c) du RMSI d’après un rapport produit par Industrie Canada, qui représente les bénéfices des grossistes-marchands de produits et de fournitures pharmaceutiques en 2016. Il s’agit des dernières données sur les bénéfices dont dispose l’ASFC.

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