Énoncé des motifs — décision concernant un réexamen relatif à l’expiration : Éviers en acier inoxydable (SSS 2022 ER)

Décision

Ottawa, le 12 mai 2023

Le 27 avril 2023, conformément à l’alinéa 76.03(7)a) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, l’Agence des services frontaliers du Canada a décidé que l’annulation de l’ordonnance rendue par le Tribunal canadien du commerce extérieur le 8 février 2018 à l’issue du réexamen relatif à l’expiration RR-2017-001 causerait vraisemblablement :

• la poursuite ou la reprise du dumping des marchandises en provenance de la Chine; et
• la poursuite ou la reprise du subventionnement des marchandises en provenance de la Chine.

Résumé

[1] Le 28 novembre 2022, conformément au paragraphe 76.03(1) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation (LMSI), le Tribunal canadien du commerce extérieur (TCCE) a ouvert un réexamen relatif à l’expiration de son ordonnance rendue le 8 février 2018 à l’issue du réexamen relatif à l’expiration RR-2017-001 concernant le dumping et le subventionnement de certains éviers en acier inoxydable originaires ou exportés de la République populaire de Chine (Chine).

[2] Par suite de l’avis du TCCE, l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) a ouvert le 29 novembre 2022 une enquête de réexamen relatif à l’expiration pour établir si l’annulation de l’ordonnance causerait vraisemblablement la poursuite ou la reprise du dumping et/ou du subventionnement des marchandises en cause en provenance de la Chine.

[3] L’ASFC a reçu une réponse à son questionnaire de réexamen relatif à l’expiration (QRE) pour producteurs canadiens de la part de Franke Kindred Canada Limited (Franke)^{Note de bas de page 1} et de Novanni Stainless Inc. (Novanni)^{Note de bas de page 2}, des producteurs d’éviers en acier inoxydable au Canada. Les exposés de Franke et de Novanni contenaient des renseignements à l’appui de leur point de vue que la poursuite ou la reprise du dumping et du subventionnement des éviers en acier inoxydable en provenance de la Chine est vraisemblable si l’ordonnance du TCCE est annulée.

[4] L’ASFC a reçu une réponse à son QRE pour importateurs de la part de Canac-Marquis Grenier Ltée (Canac-Marquis)^{Note de bas de page 3}, de Deccor Living Innovations Inc. (Deccor)^{Note de bas de page 4}, de Tec Vanlife Ltd. (TecVan)^{Note de bas de page 5}, de Stone Gallery Ltd. (Stone)^{Note de bas de page 6} et de Superprem Industries Ltd. (Superprem)^{Note de bas de page 7}. Canac-Marquis, Deccor et Superprem ont exprimé un point de vue quant à la vraisemblance de la poursuite ou de la reprise du dumping et/ou du subventionnement des marchandises en cause. Les autres importateurs n’ont pas exprimé de point de vue à ce sujet.

[5] L’ASFC a reçu une réponse à son QRE pour exportateurs de la part d’IKEA Supply AG (IKEA)^{Note de bas de page 8}, un grossiste mondial et exportateur des marchandises en cause. IKEA n’a pas exprimé de point de vue quant à la vraisemblance de la poursuite ou de la reprise du dumping et/ou du subventionnement des marchandises en cause.

[6] L’ASFC n’a pas reçu de réponse à son QRE pour gouvernements étrangers de la part du gouvernement de la Chine.

[7] Aucune partie n’a présenté de mémoire ou de contre-exposé.

[8] Il ressort de l’analyse des renseignements au dossier administratif que la poursuite ou la reprise du dumping, au Canada, des éviers en acier inoxydable en provenance de la Chine est vraisemblable si l’ordonnance du TCCE est annulée. Cette analyse repose sur les facteurs suivants :

• La concurrence des éviers fabriqués à la main;
• Le statut de produit de base des éviers en acier inoxydable;
• La capacité de production excédentaire des producteurs chinois;
• La vocation exportatrice des producteurs chinois;
• La tendance au dumping des producteurs chinois;
• La faiblesse des conditions du marché et de la demande d’éviers en acier inoxydable en Chine; et
• La poursuite du dumping d’éviers en acier inoxydable de la Chine pendant que l’ordonnance était en vigueur.

[9] De plus, il ressort de l’analyse des renseignements au dossier administratif que la poursuite ou la reprise du subventionnement des éviers en acier inoxydable en provenance de la Chine est vraisemblable si l’ordonnance du TCCE est annulée. Cette analyse repose sur les facteurs suivants :

• L’offre continue de programmes de subvention aux producteurs d’éviers en acier inoxydable en Chine;
• La prise de mesures compensatoires à l’égard d’éviers en acier inoxydable de la Chine par les autorités dans d’autres pays;
• La prise de mesures antidumping et compensatoires à l’égard de feuilles et feuillards en acier inoxydable de la Chine;
• La poursuite du subventionnement d’éviers en acier inoxydable de la Chine pendant que l’ordonnance était en vigueur; et
• L’importance du volume de marchandises subventionnées exportées vers le Canada.

[10] C’est pourquoi, après étude des renseignements pertinents au dossier, et conformément à l’alinéa 76.03(7)a) de la LMSI, l’ASFC a décidé le 27 avril 2023 que l’annulation de l’ordonnance à l’égard des éviers en acier inoxydable causerait vraisemblablement :

• la poursuite ou la reprise du dumping des marchandises en provenance de la Chine; et
• la poursuite ou la reprise du subventionnement des marchandises en provenance de la Chine.

Contexte

[11] Le 27 octobre 2011, à la suite d’une plainte déposée par Franke et Novanni, l’ASFC a ouvert des enquêtes conformément au paragraphe 31(1) de la LMSI pour établir s’il y avait eu dumping et/ou subventionnement des éviers en acier inoxydable en provenance de la Chine.

[12] Le 24 avril 2012, conformément à l’alinéa 41(1)a) de la LMSI, l’ASFC a rendu des décisions définitives de dumping et de subventionnement concernant les éviers en acier inoxydable en provenance de la Chine^{Note de bas de page 9}.

[13] Le 24 mai 2012, conformément au paragraphe 43(1) de la LMSI, le TCCE a conclu que le dumping et le subventionnement des éviers en acier inoxydable en provenance de la Chine avaient causé un dommage. Son exposé des motifs des conclusions rendues à l’égard des éviers en acier inoxydable a été publié le 8 juin 2012^{Note de bas de page 10}.

[14] Le 1er avril 2014, l’ASFC a conclu un premier réexamen pour mettre à jour les valeurs normales, les prix à l’exportation et les montants de subvention des éviers en acier inoxydable de la Chine^{Note de bas de page 11}.

[15] Le 7 juillet 2016, l’ASFC a conclu un deuxième réexamen pour mettre à jour les valeurs normales, les prix à l’exportation et les montants de subvention des éviers en acier inoxydable de la Chine^{Note de bas de page 12}.

[16] Le 8 février 2018, le TCCE a rendu une ordonnance prorogeant ses conclusions en vertu de l’alinéa 76.03(12)b) de la LMSI^{Note de bas de page 13}.

[17] Le 28 novembre 2022, conformément au paragraphe 76.03(1) de la LMSI, le TCCE a ouvert un réexamen relatif à l’expiration de son ordonnance rendue le 8 février 2018 à l’issue du réexamen relatif à l’expiration RR-2017-001.

[18] Le 29 novembre 2022, l’ASFC a ouvert l’enquête de réexamen relatif à l’expiration qui nous intéresse pour établir si l’annulation de l’ordonnance risquait de faire reprendre ou se poursuivre le dumping et/ou le subventionnement des éviers en acier inoxydable en provenance de la Chine.

Les produits

[19] Les marchandises en cause dans le présent réexamen relatif à l’expiration se définissent comme suit :

Précisions

[22] Aux fins de la définition des marchandises en cause, le volume est le produit de la longueur, de la largeur et de la profondeur de la cuvette, peu importe l’évasement et le rayon de la cuvette. La longueur est mesurée de l’avant à l’arrière du rebord de la cuvette et la largeur, de gauche à droite du rebord de la cuvette. La profondeur, quant à elle, est mesurée à partir du rebord de la cuvette jusqu’au fond de l’évier au point se trouvant le plus près du drain.

[23] Aux fins de la définition des marchandises en cause, les « éviers fabriqués à la main » s’entendent du processus par lequel les éviers sont fabriqués. Les matériaux servant à fabriquer l’évier sont encochés et pliés, puis les côtés sont soudés et polis à la main pour fabriquer un évier ayant la forme d’une boîte. Les éviers fabriqués à la main peuvent aussi être appelés des éviers artisanaux ou des éviers faits à la main.

[24] Les marchandises en cause peuvent être fournies avec des joints d’étanchéité, une crépine ou des ensembles de crépines, des agrafes de verrouillage, des attaches, des coussinets d’insonorisation, des modèles de découpe et des accessoires supplémentaires, comme des paniers de rinçage et des grilles de fond.

[25] Les éviers en acier inoxydable sont fréquemment utilisés dans des installations résidentielles et non résidentielles, notamment dans les cuisines, les salles de bain, les pièces de service et les salles de lavage. Ils sont disponibles sous diverses formes et configurations. Ils peuvent avoir une simple cuvette ou de multiples cuvettes et peuvent être montés en dessous, au-dessus ou conçus comme surface de travail.

[26] L’image ci-dessous illustre la façon dont les mesures de la cuvette servent à calculer le volume.

Version texte : Comment nous mesurons les puitss

Dimensions de cuvette individuelle

• “Longueur x largeur x profondeur”
• « L » (longueur);
• « W » (largeur);
• « D » (profondeur)

Classement des importations

[27] Les marchandises en cause s’importent généralement au Canada sous les numéros de classement tarifaire suivants :

• 7324.10.00.10
• 7324.10.00.90

[28] Les numéros de classement tarifaire ci-dessus sont fournis à titre purement informatif. Ils n’incluent pas toutes les marchandises en cause, et inversement, ils incluent des marchandises non en cause. Seule la définition du produit fait autorité au sujet des marchandises en cause.

Période visée par le réexamen

[29] La période visée par le réexamen (PVR) pour l’enquête de réexamen relatif à l’expiration de l’ASFC est du 1er janvier 2019 au 30 septembre 2022.

Branche de production nationale

[30] La branche de production nationale des éviers en acier inoxydable se compose actuellement de Franke Kindred Canada Limited (Midland, Ontario) et de Novanni Stainless Inc. (Coldwater, Ontario).

Franke Kindred Canada Limited

[31] Franke appartient à la division « cuisine » de Franke Holdings AG, une entreprise de Midland en Ontario. Tout a commencé en 1946, année où Kitchen Installations Inc. (KIL) a fait ses débuts à Toronto comme usine de petits produits métalliques; KIL a déménagé en 1960 à son adresse actuelle de Midland, puis s’est rebaptisée Kindred Industries Limited en 1962. Elle a finalement été achetée en novembre 1998 par Franke Holdings AG^{Note de bas de page 14}.

Novanni Stainless Inc.

[32] Novanni est une société privée avec des usines à Coldwater en Ontario. Son histoire a commencé en 1955, quand Wessan Plumbing Manufacturing (Wessan) s’est mise à fabriquer des éviers en acier inoxydable à Brampton dans la même province. Wessan a déménagé son usine à Coldwater en 1965. Puis en 1999, Wessan s’est fait acheter par Elkay Manufacturing Company, société américaine fermée fabriquant des produits de plomberie. Elle a ainsi fonctionné sous le nom d’Elkay Canada Ltd. jusqu’au 20 mars 2008, année de son acquisition par Novanni^{Note de bas de page 15}.

Marché canadien

[33] L’ASFC ne peut publier de données quantitatives précises sur la valeur et le volume de la production nationale d’éviers en acier inoxydable vendus pour consommation intérieure puisque cela reviendrait à divulguer des renseignements confidentiels de Franke et de Novanni, les deux seuls producteurs canadiens. Par conséquent, seules les importations d’éviers en acier inoxydable dans la PVR sont présentées au tableau 1 ci-dessous.

[34] D’après les renseignements au dossier administratif, le marché canadien apparent total a augmenté globalement en termes de valeur et de volume de 2019 à 2021.

[35] D’après les renseignements au dossier administratif, la part des producteurs canadiens du marché canadien apparent a diminué en termes de valeur et de volume dans la PVR. La part du marché des importations en provenance de la Chine a diminué en termes de volume, mais a augmenté en termes de valeur dans la PVR. La part du marché des importations en provenance des autres pays a augmenté globalement en termes de valeur et de volume dans la PVR.

[36] Par conséquent, les renseignements montrent que, dans la PVR, les importations en provenance de la Chine et des autres pays ont conquis une part de plus en plus grande du marché canadien apparent total au détriment des producteurs canadiens.

Perception des droits

[37] Comme on le voit dans le tableau 2 ci-dessous, l’exécution de l’ordonnance du TCCE dans la PVR a donné lieu à la perception d’un total d’environ 7,3 millions de dollars de droits antidumping et compensateurs sur les importations de marchandises en cause de la Chine. En pourcentage de la valeur en douane totale, les droits antidumping et compensateurs totaux perçus dans la PVR étaient égaux à 18,5 %.

Parties à la procédure

[38] Le 29 novembre 2022, l’ASFC a envoyé un avis d’ouverture d’enquête de réexamen relatif à l’expiration et un QRE aux producteurs canadiens, aux importateurs et aux exportateurs connus des marchandises en cause. Elle a aussi envoyé un QRE pour gouvernements étrangers portant sur le subventionnement des marchandises en cause.

[39] Les QRE demandaient des renseignements nécessaires à la prise en compte des facteurs pertinents de réexamen relatif à l’expiration qui figurent au paragraphe 37.2(1) du Règlement sur les mesures spéciales d’importation (RMSI).

[40] Les deux producteurs canadiens, Franke et Novanni, ont participé à l’enquête de réexamen relatif à l’expiration et ont fait une réponse au QRE pour producteurs canadiens.

[41] Un distributeur et vendeur, IKEA, a fait une réponse au QRE pour exportateurs.

[42] Cinq importateurs canadiens, Canac-Marquis, Deccor, TecVan, Stone et Superprem, ont fait une réponse au QRE pour importateurs.

[43] Le gouvernement de la Chine n’a pas fait de réponse au QRE pour gouvernements étrangers de l’ASFC.

[44] Aucune partie n’a présenté de mémoire ou de contre-exposé.

Renseignements pris en compte par l'ASFC

[45] Les renseignements que l’ASFC a pris en compte aux fins de l’enquête de réexamen relatif à l’expiration figurent au dossier administratif. Ce dossier contient les renseignements énumérés dans la liste des pièces justificatives de l’ASFC, laquelle comprend les pièces justificatives de l’ASFC et les renseignements présentés par les parties intéressées, notamment ceux qu’elles estiment pertinents pour la décision concernant la vraisemblance de la poursuite ou de la reprise du dumping ou du subventionnement en l’absence de l’ordonnance du TCCE. Ces renseignements peuvent être des rapports d’analystes-experts, des extraits de revues spécialisées et de journaux, des ordonnances et des conclusions rendues par les autorités au Canada ou ailleurs, des documents d’organismes comme l’Organisation mondiale du commerce (OMC), et des réponses au QRE présentées par les producteurs canadiens, les importateurs, les exportateurs et les gouvernements.

[46] Dans toute enquête de réexamen relatif à l’expiration, l’ASFC fixe une « date de clôture du dossier » après laquelle aucun nouveau renseignement ne peut être versé au dossier administratif; ici, c’était le 18 janvier 2023. Il s’agit en effet de donner le temps aux participants de préparer leurs mémoires et leurs contre-exposés d’après ce qui se trouve au dossier administratif en date de sa clôture.

Position des parties : dumping

Considération et analyse : dumping

[88] Quand elle décide au titre de l’alinéa 76.03(7)a) de la LMSI si, selon toute vraisemblance, l’annulation de l’ordonnance causera la poursuite ou la reprise d’un dumping, l’ASFC peut prendre en compte tous les facteurs pertinents dans les circonstances, sans se limiter à ceux du paragraphe 37.2(1) du RMSI.

[89] Guidée par les facteurs susmentionnés, et tenant compte des documents présentés par les divers participants ainsi que du fruit de ses propres recherches, qui sont tous au dossier administratif, l’ASFC a analysé la question du dumping dans l’enquête de réexamen relatif à l’expiration qui nous intéresse. La liste suivante résume son travail d’analyse :

• La concurrence des éviers fabriqués à la main;
• Le statut de produit de base des éviers en acier inoxydable;
• La capacité de production excédentaire des producteurs chinois;
• La vocation exportatrice des producteurs chinois;
• La tendance au dumping des producteurs chinois;
• La faiblesse des conditions du marché et de la demande d’éviers en acier inoxydable en Chine; et
• La poursuite du dumping d’éviers en acier inoxydable de la Chine pendant que l’ordonnance était en vigueur.

[90] L’ASFC note qu’elle n’a pas mené de procédures pour mettre à jour les valeurs normales et les prix à l’exportation depuis que le TCCE a rendu l’ordonnance prorogeant ses conclusions le 8 février 2018. Par ailleurs, n’ayant pas reçu de réponse au QRE de la part de producteurs et exportateurs chinois dans le cadre de la présente enquête, l’ASFC s’est fiée aux renseignements disponibles au moment de la conclusion le 1er septembre 2017 de la dernière enquête de réexamen relatif à l’expiration concernant les éviers en acier inoxydable ainsi qu’au fruit de ses propres recherches pour évaluer la vraisemblance de la poursuite ou de la reprise du dumping si l’ordonnance du TCCE est annulée.

La concurrence des éviers fabriqués à la main

[91] Une tendance à la substitution des produits pour les éviers en acier inoxydable milieu de gamme s’affirme depuis quelques années au Canada et ne semble pas près de s’essouffler. Les plaignantes elles-mêmes, qui ont relevé cette tendance dans la dernière enquête de réexamen relatif à l’expiration, la relèvent de nouveau dans la présente enquête. Deccor, un importateur et détaillant d’éviers en acier inoxydable, d’éviers fabriqués à la main et d’accessoires de plomberie, corrobore également la tendance dans ses observations pour la présente enquête. Des éléments de preuve donnés par Franke indiquent que, de 2019 à 2021, les importations d’éviers fabriqués à la main sont passées de 481 000 unités à 700 000 unités, une hausse de 45,5 %.

[92] Cette tendance est nourrie par la chute du prix déjà bas des éviers fabriqués à la main que proposent les exportateurs chinois. Le prix de détail de certains éviers fabriqués à la main, tel qu’observé par Novanni, a diminué à un cinquième de leur prix de détail depuis la dernière enquête de réexamen relatif à l’expiration, et était même inférieur au prix de détail des éviers en acier inoxydable de production nationale.

[93] L’ASFC juge que le virage vers les éviers fabriqués à la main a entraîné non seulement une augmentation de la concurrence, mais aussi une réduction de la taille du marché canadien des éviers en acier inoxydable. Elle juge également qu’en raison du virage continu vers les éviers fabriqués à la main observé sur le marché canadien, les producteurs chinois d’éviers en acier inoxydable pourraient être contraints à se livrer à une concurrence féroce pour maintenir leur part du marché et prévenir la perte de ventes. Par conséquent, si le TCCE annulait son ordonnance, ce facteur pourrait faire croître la vraisemblance de la poursuite ou de la reprise du dumping.

Le statut de produit de base des éviers en acier inoxydable

[94] Selon les plaignantes, la plupart des éviers en acier inoxydable vendus au Canada se situent dans la tranche inférieure du marché et sont considérés comme des produits de base. C’est pourquoi le prix est le facteur déterminant dans la décision d’achat des clients. Les plaignantes font valoir que la concurrence dans toutes les filières est féroce et que les importateurs cherchent le meilleur prix, notamment en se procurant des marchandises sous-évaluées, pour se livrer à une guerre des prix et obtenir un avantage concurrentiel.

[95] Sont présentés au tableau 3 ci-dessous les prix unitaires moyens des importations d’éviers en acier inoxydable de la Chine et des autres pays d’après les données de l’ASFC sur les importations et la perception des droits.

[96] Comme on le voit dans le tableau 3, même si le prix unitaire moyen des éviers en acier inoxydable de la Chine est demeuré stable de 2019 à 2022, avec une légère hausse en 2022, celui des éviers en acier inoxydable des autres pays a diminué au cours de la même période. La baisse des prix unitaires moyens des importations des autres pays s’est accompagnée d’une augmentation de la part du marché de ces importations au cours de la même période.

[97] Comme nous l’avons déjà vu dans la section Marché canadien, dans la PVR, la part du marché des importations de la Chine a diminué en termes de volume de 2019 à 2021, tandis que celle des importations des autres pays a augmenté.

[98] Compte tenu de la sensibilité au prix pour les marchandises en cause, l’ASFC juge que le remplacement du volume d’importations au Canada en provenance de la Chine par des importations en provenance d’autres pays peut raisonnablement être attribué au prix moindre de celles-ci.

[99] En raison de leur statut de produit de base, pour occuper de nouveau une part plus grande du marché, les éviers en acier inoxydable de la Chine devraient concurrencer les importations à prix moindre d’autres pays. Par conséquent, si le TCCE annulait son ordonnance, ce facteur pourrait faire croître la vraisemblance de la poursuite ou de la reprise du dumping.

La capacité de production excédentaire des producteurs chinois

[100] Selon les plaignantes, la capacité de production totale des producteurs et exportateurs chinois est grande, comparée à la taille du marché canadien apparent, et il y a une capacité de production d’éviers en acier inoxydable excédentaire en Chine. Les plaignantes font valoir que, compte tenu de leur capacité de production, les producteurs chinois d’éviers en acier inoxydable cherchent à vendre sur les marchés d’exportation afin de maintenir l’utilisation de la capacité.

[101] Est présentée au tableau 4 ci-dessous la capacité de production totale des quatre exportateurs coopératifs, Dongyuan Kitchenware, Yingao Kitchen, New Star Hi-Tech et Komodo Kitchen. Faute de réponse de ces quatre exportateurs dans le cadre de la présente enquête, les renseignements disponibles à la conclusion de la dernière enquête de réexamen relatif à l’expiration concernant les éviers en acier inoxydable sont retenus, comme suit :

[102] La capacité de production annuelle des quatre exportateurs coopératifs réunis était de 4,3 millions d’unités en 2016. Les données semblent indiquer que les producteurs chinois ont par le passé augmenté la capacité de production au fil du temps. Cependant, même si l’on suppose qu’il n’y a eu aucun autre investissement depuis 2016, la capacité de production de ces quatre exportateurs chinois à eux seuls fait environ sept fois la taille de l’ensemble du marché canadien apparent actuel des éviers en acier inoxydable.

[103] L’estimation de l’ASFC de la capacité de production totale est prudente en raison du nombre limité d’exportateurs coopératifs. Dans ses décisions rendues le 14 août 2018^{Note de bas de page 60}, la Commission du commerce international (ITC) des États-Unis a noté que les producteurs chinois avaient déclaré une capacité de production totale de 9 260 000 unités en 2017.

[104] Même si elle reconnaît que la pandémie de COVID-19 a pu entraîner des arrêts d’usines et des pénuries de main-d’œuvre temporaires et que les producteurs chinois subissent peut-être des pressions sur les coûts et l’inflation, comme Canac-Marquis et Superprem le font valoir, l’ASFC est d’avis que les producteurs seront incités à exporter en attendant que l’économie chinoise se redresse complètement dans le long terme.

[105] Par ailleurs, il ressort de l’analyse des statistiques de l’ASFC sur la perception des droits au tableau 2 que le volume des importations d’éviers en acier inoxydable de la Chine, même s’il est passé de 163 571 unités en 2019 à 157 602 unités en 2020, s’est redressé pour se chiffrer à 198 762 unités en 2021 et à 148 919 unités déjà au cours des trois premiers trimestres de 2022.

[106] Les éléments de preuve dont dispose l’ASFC indiquent également que, par le passé, les exportateurs coopératifs en Chine avaient une capacité de production excédentaire. Sont présentés au tableau 5 ci-dessous les taux d’utilisation de la capacité pour Dongyuan Kitchenware, Yingao Kitchen, New Star Hi-Tech et Komodo Kitchen. Faute de réponse de ces quatre exportateurs dans le cadre de la présente enquête, les renseignements disponibles à la conclusion de la dernière enquête de réexamen relatif à l’expiration concernant les éviers en acier inoxydable sont retenus, comme suit :

[107] D’après les renseignements au tableau 5, le taux moyen pondéré d’utilisation de la capacité des exportateurs coopératifs allait de 54,2 % à 68,5 %, pour une capacité excédentaire de 1,4 million à 2,0 millions d’unités.

[108] Si l’on suppose que les exportateurs coopératifs ont actuellement un taux d’utilisation de la capacité tel qu’indiqué dans le tableau 5 et une capacité de production correspondant aux pics de 2016 telle qu’indiquée dans le tableau 5, le volume de la capacité excédentaire fait plus de deux fois la taille actuelle du marché canadien apparent des éviers en acier inoxydable.

[109] D’après les éléments de preuve dont elle dispose, l’ASFC juge que la capacité de production d’éviers en acier inoxydable est extrêmement grande et qu’il y a une capacité de production excédentaire en Chine. Par conséquent, si le TCCE annulait son ordonnance, le Canada serait un marché intéressant pour les producteurs chinois d’éviers en acier inoxydable à la recherche de débouchés pour leur capacité de production excédentaire, ce qui pourrait faire croître la vraisemblance de la poursuite ou de la reprise du dumping.

La vocation exportatrice des producteurs chinois

[110] Les plaignantes affirment que les producteurs d’éviers en acier inoxydable en Chine sont à vocation exportatrice et que les importations d’éviers en acier inoxydable au Canada sont demeurées stables dans la PVR.

[111] Sont présentées au tableau 6 ci-dessous les ventes déclarées des quatre exportateurs coopératifs, Dongyuan Kitchenware, Yingao Kitchen, New Star Hi-Tech et Komodo Kitchen, sur leurs marchés intérieur et d’exportation. Faute de réponse de ces quatre exportateurs dans le cadre de la présente enquête, les renseignements disponibles à la conclusion de la dernière enquête de réexamen relatif à l’expiration concernant les éviers en acier inoxydable sont retenus, comme suit :

[112] En termes de valeur, les ventes intérieures totales en pourcentage des ventes totales sur tous les marchés étaient égales à 4,8 % en 2011, à 5,2 % en 2013 et à 27,2 % en 2016. Sans réponse des exportateurs coopératifs, rien n’indique qu’il y a eu un changement à la configuration des échanges des producteurs chinois. L’ASFC juge que la part des ventes intérieures, comparée à celle des ventes totales, indique que les producteurs chinois sont à vocation exportatrice et dépendent des marchés d’exportation pour les ventes.

[113] Par ailleurs, d’après les statistiques de l’ASFC sur la perception des droits au tableau 2, les importations d’éviers en acier inoxydable de la Chine ont augmenté de 21,5 %, passant de 163 571 unités en 2019 à 198 762 unités en 2021, avec une légère baisse en 2020. Cette baisse peut être attribuée aux effets de la pandémie de COVID-19. Déjà, 148 919 unités ont été importées au Canada au cours des trois premiers trimestres de 2022.

[114] L’ASFC juge que le taux de croissance et le volume accru d’exportations d’éviers en acier inoxydable vers le Canada au cours de la période où l’ordonnance était en vigueur indiquent un intérêt continu envers le marché canadien par les exportateurs chinois, qui sont à vocation exportatrice. Si le TCCE annulait son ordonnance, ce facteur pourrait faire croître la vraisemblance de la poursuite ou de la reprise du dumping.

La tendance au dumping des producteurs chinois

[115] Les plaignantes font valoir que les producteurs chinois d’éviers en acier inoxydable ont tendance à pratiquer le dumping sur les marchés étrangers.

[116] Le 26 février 2013, le département du Commerce (DOC) des États-Unis a rendu une décision définitive de dumping concernant des éviers en acier inoxydable emboutis de la Chine. Dans cette enquête, les exportateurs de la Chine se sont vu attribuer des marges de dumping moyennes pondérées allant de 27,1 % à 76,5 %^{Note de bas de page 63}. Il convient de noter que Dongyuan Kitchenware, Yingao Kitchen et New Star Hi-Tech figuraient parmi les 25 exportateurs ayant coopéré à l’enquête du DOC des États-Unis.

[117] Le 14 août 2018, le DOC et l’ITC des États-Unis ont décidé que l’annulation des ordonnances de droits compensateurs et antidumping sur les éviers en acier inoxydable emboutis de la Chine causerait vraisemblablement la poursuite ou la reprise du dommage sensible à la branche de production aux États-Unis dans un avenir raisonnablement prévisible^{Note de bas de page 64}.

[118] Le 26 mars 2015, la Commission antidumping de l’Australie (ADC) a rendu une décision définitive de dumping concernant certains éviers en acier inoxydable emboutis profonds de la Chine. Dans cette enquête, les marges de dumping allaient de 5,0 % à 49,5 %^{Note de bas de page 65}. Il convient de noter que New Star Hi-Tech et Komodo Kitchen figuraient parmi les 11 exportateurs ayant coopéré à l’enquête de l’ADC.

[119] Le 28 février 2020, l’ADC a décidé que l’expiration des mesures causerait ou serait susceptible de causer la poursuite ou la reprise du dumping et du subventionnement ainsi que du dommage sensible que les mesures étaient censées prévenir^{Note de bas de page 66}.

[120] Le 22 avril 2015, le ministère de l’Économie du Mexique a rendu une décision définitive de dumping concernant des éviers en acier inoxydable de la Chine. Le 7 juin 2021, les autorités mexicaines ont conclu leur réexamen relatif à l’expiration, maintenant les mesures antidumping à l’égard des éviers en acier inoxydable de la Chine^{Note de bas de page 67}.

[121] L’ASFC juge que la prise de mesures antidumping à l’égard d’éviers en acier inoxydable de la Chine par les autorités américaines, australiennes et mexicaines montre que les exportateurs chinois ont tendance à pratiquer le dumping. Si le TCCE annulait son ordonnance, en raison de leur tendance à pratiquer le dumping, les exportateurs chinois détourneraient des éviers en acier inoxydable, des marchés américain, australien et mexicain vers le marché canadien, ce qui pourrait faire croître la vraisemblance de la poursuite ou de la reprise du dumping.

La faiblesse des conditions du marché et de la demande d’éviers en acier inoxydable en Chine

[122] Pour les producteurs d’éviers en acier inoxydable, les mises en chantier sont un indicateur important des tendances des ventes. La demande future d’éviers en acier inoxydable est jugée faible sur le marché chinois. Plusieurs rapports font état d’un ralentissement de la croissance économique en Chine.

[123] En août 2022, Goldman Sachs a réduit sa prévision de croissance du produit intérieur brut de la Chine pour 2022, de 3,3 % à 3,0 %, après avoir pris en compte les données économiques plus faibles que prévu ainsi que les contraintes énergétiques des mois précédents. C’est la troisième fois que la banque réduit sa prévision depuis mai 2022^{Note de bas de page 68}.

[124] Selon Exportation et développement Canada (EDC), les perspectives pour l’économie de la Chine indiquent une croissance historiquement faible de 3 % en 2022 et de 4,9 % en 2023. Toujours selon EDC, la Chine est l’un des rares pays où il y aura vraisemblablement un assouplissement plutôt qu’un resserrement de la politique monétaire. Les répercussions sur l’économie des politiques de tolérance zéro à l’égard de la COVID-19 ne devraient pas s’améliorer en 2023. Parallèlement, l’accumulation de dettes et la surcapacité continues dans le secteur immobilier nécessiteront un soutien stratégique pour limiter les répercussions économiques plus larges^{Note de bas de page 69}.

[125] Dans son rapport Perspectives de l’économie mondiale de juillet 2022, le Fonds monétaire international (FMI) a réduit ses projections de croissance pour la Chine, de 8,1 % en 2021 à 3,3 % en 2022 et à 4,6 % en 2023. Le FMI mentionne aussi le défaut de paiement et le refinancement désordonnés et à grande échelle de la dette de sociétés, par exemple dans le secteur immobilier chinois, ce qui pourrait rendre le marché volatil^{Note de bas de page 70}.

[126] De nouvelles estimations de S&P Global Ratings prévoient une chute de 30 % des ventes de propriétés en 2022, soit plus que pendant la crise financière de 2008^{Note de bas de page 71}.

[127] D’après les données publiées le 16 mars 2023 par le Bureau national de la statistique de la Chine, l’indice immobilier chinois se chiffrait à 94,67 en février 2023, contre un creux de 94,36 à la fin de décembre 2022. L’indice immobilier demeure faible, car des lectures inférieures à 100 indiquent un ralentissement dans l’industrie immobilière chinoise, tandis que des lectures supérieures à 100 indiquent une croissance économique^{Note de bas de page 72}.

[128] Compte tenu de cette faiblesse des perspectives, l’ASFC juge que les producteurs chinois, confrontés à une réduction de la demande sur leur marché intérieur, pourraient être de plus en plus enclins à exporter. Aussi, compte tenu du ralentissement dans le secteur de la construction en Chine, il est vraisemblable que les producteurs chinois devront se tourner vers des marchés d’exportation comme le Canada pour remplacer les ventes intérieures. Par conséquent, si le TCCE annulait son ordonnance, ce facteur pourrait faire croître la vraisemblance de la poursuite ou de la reprise du dumping.

La poursuite du dumping d’éviers en acier inoxydable de la Chine pendant que l’ordonnance était en vigueur

[129] Comme on l’a vu dans le tableau 2, dans la PVR, un total de 7,3 millions de dollars de droits antidumping et compensateurs (droits LMSI) ont été perçus sur un total de 668 854 unités (valeur en douane de 39 662 221 $) d’éviers en acier inoxydable importés au Canada en provenance de la Chine. D’après les données sous-jacentes, sur ce total, 241 872 $ de droits LMSI ont été perçus sur les marchandises en cause des exportateurs coopératifs, ou 3,3 % de tous les droits LMSI perçus dans la PVR. En d’autres mots, la plus grande partie des droits LMSI ont été perçus sur des marchandises d’exportateurs non coopératifs.

[130] Les données sur la perception des droits semblent aussi indiquer qu’en pourcentage de la valeur en douane totale, le total combiné des droits LMSI perçus dans la PVR est égal à 18,5 %, ce qui n’est pas minimal.

[131] L’ASFC juge que les exportateurs chinois, y compris les exportateurs coopératifs ayant des valeurs normales établies, ont continué d’exporter les marchandises en cause au Canada à des prix sous-évalués pendant que l’ordonnance était en vigueur. Elle juge en outre que, si le TCCE annulait son ordonnance, ce facteur pourrait faire croître la vraisemblance de la poursuite ou de la reprise du dumping.

Position des parties : subventionnement

Considération et analyse : subventionnement

[135] Quand elle décide au titre de l’alinéa 76.03(7)a) de la LMSI si, selon toute vraisemblance, l’annulation de l’ordonnance causera la poursuite ou la reprise d’un subventionnement, l’ASFC peut prendre en compte tous les facteurs pertinents dans les circonstances, sans se limiter à ceux du paragraphe 37.2(1) du RMSI.

[136] Guidée par les facteurs susmentionnés et tenant compte du dossier administratif, l’ASFC a analysé la question du subventionnement dans l’enquête de réexamen relatif à l’expiration qui nous intéresse. La liste suivante résume son travail d’analyse :

• L’offre continue de programmes de subvention aux producteurs d’éviers en acier inoxydable en Chine;
• La prise de mesures compensatoires à l’égard d’éviers en acier inoxydable de la Chine par les autorités dans d’autres pays;
• La prise de mesures antidumping et compensatoires à l’égard de feuilles et feuillards en acier inoxydable de la Chine;
• La poursuite du subventionnement d’éviers en acier inoxydable de la Chine pendant que l’ordonnance était en vigueur; et
• L’importance du volume de marchandises subventionnées exportées vers le Canada.

[137] L’ASFC note qu’elle n’a pas mené de procédures pour mettre à jour les montants de subvention depuis que le TCCE a rendu l’ordonnance prorogeant ses conclusions le 8 février 2018. Par ailleurs, n’ayant pas reçu de réponse au QRE de la part de producteurs et exportateurs chinois ni du gouvernement de la Chine dans le cadre de la présente enquête, l’ASFC s’est fiée aux renseignements disponibles au moment de la conclusion le 1er septembre 2017 de la dernière enquête de réexamen relatif à l’expiration concernant les éviers en acier inoxydable ainsi qu’au fruit de ses propres recherches pour évaluer la vraisemblance de la poursuite ou de la reprise du subventionnement si l’ordonnance du TCCE est annulée.

L’offre continue de programmes de subvention aux producteurs d’éviers en acier inoxydable en Chine

[138] Pour la décision définitive dans l’enquête initiale en subventionnement en 2011, l’ASFC a jugé que les exportateurs coopératifs d’éviers en acier inoxydable avaient bénéficié de 15 programmes de subvention. Le montant de subvention moyen pondéré s’établissait à 38,8 % du prix à l’exportation^{Note de bas de page 73}.

[139] Dans son réexamen de 2013, l’ASFC a jugé que les exportateurs coopératifs d’éviers en acier inoxydable avaient bénéficié de sept programmes de subvention. Elle a établi que les trois exportateurs coopératifs avaient reçu des montants de subvention allant de 4,53 yuans (CNY) l’unité à 6,58 CNY l’unité^{Note de bas de page 74}.

[140] Dans son réexamen de 2016, l’ASFC a jugé que les exportateurs coopératifs d’éviers en acier inoxydable avaient bénéficié de 11 programmes de subvention. Elle a établi que les quatre exportateurs coopératifs avaient reçu des montants de subvention allant de 0,001 CNY l’unité à 2,27 CNY l’unité^{Note de bas de page 75}.

[141] Outre les éviers en acier inoxydable, l’ASFC a déjà jugé que les producteurs dans le secteur des produits de plomberie, dont les tubes en cuivre et les raccords de tuyauterie en cuivre, avaient reçu des subventions du gouvernement de la Chine. Dans son réexamen de 2015 sur les tubes en cuivre de la Chine, faute de réponse de tout exportateur, l’ASFC a fixé le montant de subvention pour tous les exportateurs par prescription ministérielle, soit à 25 239 CNY la tonne métrique^{Note de bas de page 76}. Dans son réexamen de 2019 sur les raccords de tuyauterie en cuivre de la Chine, l’ASFC a jugé que les deux exportateurs coopératifs avaient reçu des montants de subvention allant de 0,18 CNY le kilogramme à 2,28 CNY le kilogramme^{Note de bas de page 77}.

[142] Outre les produits de plomberie, l’ASFC a également jugé que les producteurs dans d’autres secteurs des biens de consommation, dont les sièges domestiques rembourrés et les matelas, avaient reçu des subventions du gouvernement de la Chine. Dans son enquête de 2020 sur les sièges domestiques rembourrés de la Chine, l’ASFC a jugé que les exportateurs coopératifs avaient bénéficié de 15 programmes de subvention. Le montant de subvention moyen pondéré s’établissait à 12,7 % du prix à l’exportation^{Note de bas de page 78}. Dans son enquête de 2022 sur les matelas de la Chine, l’ASFC a jugé que les exportateurs coopératifs avaient bénéficié de 23 programmes de subvention. Le montant de subvention moyen pondéré s’établissait à 24,1 % du prix à l’exportation^{Note de bas de page 79}.

[143] Le 27 août 2021, le gouvernement de la Chine a fait sa dernière notification à l’OMC dans laquelle il recensait les programmes offerts de 2019 à 2020^{Note de bas de page 80}. La PVR pour la présente enquête couvre la période visée par la notification du gouvernement de la Chine. Dans sa notification, le gouvernement de la Chine recensait les subventions offertes par les paliers central et sous-centraux sous forme de subventions en espèces, de droits d’utilisation des sols, d’intrants à prix réduit, de prêts à taux préférentiel, de remises de taxes spéciales, de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), et d’exemptions tarifaires.

[144] Après examen du document, l’ASFC recense 11 programmes susceptibles de conférer des avantages aux producteurs d’éviers en acier inoxydable en Chine, comme suit :

• Traitement fiscal préférentiel lié au calcul et à la déduction de dépenses supplémentaires en recherche et développement;
• Politiques fiscales préférentielles pour les entreprises transférant des technologies;
• Exemption d’impôt générale pour les microentreprises et les petites entreprises;
• Exemption du fonds de la sécurité d’emploi pour les personnes handicapées;
• Exemption du fonds géré par le gouvernement;
• Politiques préférentielles de la TVA pour les entreprises qui emploient des personnes handicapées;
• Politiques préférentielles de l’impôt sur le revenu pour les entreprises qui emploient des personnes handicapées;
• Traitement tarifaire préférentiel pour l’importation de matériel;
• Fonds spécial pour le développement économique et commercial étranger;
• Prime et subvention pour la réduction des frais liés aux prêts garantis aux microentreprises et aux petites entreprises; et
• Traitement fiscal préférentiel lié au financement.

[145] D’après ce qui précède, l’ASFC juge que, depuis la décision définitive dans l’enquête initiale, et tout au long de la période où l’ordonnance était en vigueur, le gouvernement de la Chine a continué d’offrir des programmes de subvention aux producteurs et exportateurs de marchandises dans les secteurs des produits de plomberie et des biens de consommation, dont les éviers en acier inoxydable. L’ASFC juge que, si le TCCE annulait son ordonnance, ce facteur pourrait faire croître la vraisemblance de la poursuite ou de la reprise du subventionnement.

La prise de mesures compensatoires à l’égard d’éviers en acier inoxydable de la Chine par les autorités dans d’autres pays

[146] Même si les autorités mexicaines ont seulement imposé des droits antidumping sur les importations d’éviers en acier inoxydable de la Chine, les autorités américaines et australiennes, elles, ont aussi imposé des droits compensateurs sur ces mêmes importations.

[147] Le 26 février 2013, le DOC des États-Unis a rendu une décision définitive de subventionnement concernant des éviers en acier inoxydable emboutis de la Chine. Les taux de subvention pouvant donner lieu à une mesure compensatoire déterminés pour les exportateurs de la Chine allaient de 4,8 % à 12,26 %^{Note de bas de page 81}. Comme nous l’avons déjà vu dans l’analyse de la vraisemblance de la poursuite ou de la reprise du dumping, Dongyuan Kitchenware, Yingao Kitchen et New Star Hi-Tech figuraient parmi les 25 exportateurs ayant participé à l’enquête du DOC des États-Unis.

[148] Le 14 août 2018, l’ITC des États-Unis a décidé que l’annulation des ordonnances de droits compensateurs et antidumping sur les éviers en acier inoxydable emboutis de la Chine causerait vraisemblablement la poursuite ou la reprise du dommage sensible à la branche de production aux États-Unis dans un avenir raisonnablement prévisible^{Note de bas de page 82}.

[149] Le 26 mars 2015, la Commission antidumping de l’Australie (ADC) a rendu une décision définitive de subventionnement concernant certains éviers en acier inoxydable emboutis profonds de la Chine. Les marges de subventionnement déterminées pour les exportateurs allaient de 3,3 % à 6,4 %^{Note de bas de page 83}. Il convient de noter que New Star et Komodo figuraient parmi les 11 exportateurs ayant coopéré à l’enquête de l’ADC.

[150] Le 28 février 2020, l’ADC a décidé que l’expiration des mesures causerait ou serait susceptible de causer la poursuite ou la reprise du dumping et du subventionnement ainsi que du dommage sensible que les mesures étaient censées prévenir^{Note de bas de page 84}.

[151] L’ASFC juge que la prise de mesures compensatoires à l’égard d’éviers en acier inoxydable de la Chine par les autorités américaines et australiennes montre que le gouvernement de la Chine offre des programmes de subvention conférant des avantages aux producteurs des marchandises dans ce pays. Elle juge en outre que, si le TCCE annulait son ordonnance, ce facteur pourrait faire croître la vraisemblance de la poursuite ou de la reprise du subventionnement.

La prise de mesures antidumping et compensatoires à l’égard de feuilles et feuillards en acier inoxydable de la Chine

[152] Le 8 février 2017, le DOC des États-Unis a rendu une décision définitive de subventionnement concernant des feuilles et feuillards en acier inoxydable de la Chine. Les taux de subvention pouvant donner lieu à une mesure compensatoire déterminés pour les exportateurs de la Chine allaient de 45,6 % à 190,7 %^{Note de bas de page 85}.

[153] Récemment, le 4 novembre 2022, le DOC et l’ITC des États-Unis ont décidé que l’annulation des ordonnances de droits antidumping et compensateurs sur les feuilles et feuillards en acier inoxydable de la Chine causerait vraisemblablement la poursuite ou la reprise du dumping, des subventions pouvant donner lieu à une mesure compensatoire, ainsi que du dommage sensible à la branche de production aux États-Unis^{Note de bas de page 86}.

[154] Puisque les feuilles et feuillards en acier inoxydable sont les principaux intrants de production des marchandises en cause, une partie ou la totalité des subventions pourraient être attribuées aux éviers en acier inoxydable sous forme de subventions en amont indirectes. Comme l’ASFC l’a établi dans son enquête initiale et ses réexamens subséquents, le gouvernement de la Chine, par l’intermédiaire de fournisseurs et fabricants appartenant à l’État ou contrôlés par lui, a fourni des intrants à prix insuffisant aux producteurs d’éviers en acier inoxydable. Dans ces procédures, l’ASFC a établi qu’il y avait une subvention financière et que la subvention avait bénéficié aux producteurs et exportateurs d’éviers en acier inoxydable.

[155] D’après les éléments de preuve ci-dessus, l’ASFC juge que, si le TCCE annulait son ordonnance, ce facteur pourrait faire croître la vraisemblance de la poursuite ou de la reprise du subventionnement.

La poursuite du subventionnement d’éviers en acier inoxydable de la Chine pendant que l’ordonnance était en vigueur

[156] Comme on l’a vu dans le tableau 2, un total de 7,3 millions de dollars de droits LMSI ont été perçus sur les marchandises en cause importées dans la PVR^{Note de bas de page 87}. Les données sur la perception des droits montrent également qu’en pourcentage de la valeur en douane totale, le total combiné des droits LMSI perçus dans la PVR était égal à 18,5 %, ce qui n’est pas minimal.

[157] Même si le paiement de droits compensateurs ne peut être évité, les données au tableau 2 semblent indiquer que les importateurs au Canada ont pris en compte les droits dans leur décision d’achat d’éviers en acier inoxydable. Pendant que l’ordonnance était en vigueur, les importateurs auraient continué d’acheter des volumes importants d’éviers en acier inoxydable auprès d’exportateurs coopératifs et non coopératifs de la Chine à des prix subventionnés. L’ASFC juge que, si le TCCE annulait son ordonnance, ce facteur pourrait faire croître la vraisemblance de la poursuite ou de la reprise du subventionnement.

L’importance du volume de marchandises subventionnées exportées vers le Canada

[158] Comme on l’a vu dans le tableau 2, dans la PVR, un total de 668 854 unités (valeur en douane de 39 662 221 $) d’éviers en acier inoxydable de la Chine ont été importées au Canada. Les importations de la Chine ont augmenté de 21,5 %, passant de 163 571 unités en 2019 à 198 762 unités en 2021, avec une légère baisse en 2020. Cette baisse peut être attribuée aux effets de la pandémie de COVID-19. Déjà, 148 919 unités ont été importées au Canada au cours des trois premiers trimestres de 2022.

[159] L’ASFC juge que le taux d’augmentation et le volume total de marchandises subventionnées importées au Canada dans la PVR sont importants, comparés à la taille du marché canadien apparent. Elle juge en outre que, si le TCCE annulait son ordonnance, ce facteur pourrait faire croître la vraisemblance de la poursuite ou de la reprise du subventionnement.

Conclusion

[161] Aux fins de la décision dans l’enquête de réexamen relatif à l’expiration qui nous intéresse, l’ASFC a procédé à une analyse en s’en tenant aux facteurs énoncés au paragraphe 37.2(1) du RMSI et aux autres facteurs pertinents dans les circonstances. Ayant considéré les facteurs pertinents et les renseignements au dossier, elle a décidé le 27 avril 2023, conformément à l’alinéa 76.03(7)a) de la LMSI, que l’annulation de l’ordonnance rendue par le TCCE le 8 février 2018 à l’issue du réexamen RR-2017-001 à l’égard de certains éviers en acier inoxydable originaires ou exportés de la Chine causerait vraisemblablement :

• la poursuite ou la reprise du dumping des marchandises; et
• la poursuite ou la reprise du subventionnement des marchandises.

Mesures à venir

[162] Le TCCE a maintenant commencé son enquête pour déterminer si, selon toute vraisemblance, l’expiration de son ordonnance concernant le dumping et le subventionnement des marchandises en cause causerait un dommage. D’après le calendrier du réexamen relatif à l’expiration, le TCCE doit rendre sa propre décision d’ici le 4 octobre 2023.

[163] Si le TCCE décide que l’expiration de son ordonnance causerait vraisemblablement un dommage, il la prorogera, avec ou sans modification. Alors, l’ASFC continuera de percevoir des droits antidumping sur les importations sous-évaluées, et des droits compensateurs sur les importations subventionnées, de marchandises en cause.

[164] Si, au contraire, le TCCE décide que l’expiration de son ordonnance ne causerait vraisemblablement pas de dommage, il l’annulera, et plus aucuns droits antidumping ou compensateurs ne seront perçus sur les importations de marchandises en cause, et ceux perçus sur des marchandises dédouanées après que l’ordonnance devait expirer seront rendus à l’importateur.

Communiquer avec nous

[165] Voici à qui s’adresser pour en savoir plus :

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• Alex Wu : 343-573-2930

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